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Dans l'Ouest américain, les Navajos envahis par le coronavirus

Certaines tribus amérindiennes aux Etats-Unis ont été épargnées par le nouveau coronavirus jusqu'à présent, notamment au Dakota du Sud. Mais le plus grand territoire amérindien, la réserve navajo, a un taux de contaminations proche de celui de New York, en étant loin d'avoir les mêmes infrastructures de santé.

"Nous sommes les premiers citoyens de ce pays, mais nous avons été oubliés", dit à l'AFP Jonathan Nez, président de la nation navajo, qui a ordonné le confinement au début du mois.

"J'espère que cela changera", ajoute-t-il.

La nation, établie en 1868, compte 175.000 habitants répartis sur un territoire grand comme l'Ecosse, à cheval sur trois Etats du sud-ouest du pays.

Le premier cas de Covid-19 y a été confirmé le 17 mars. Depuis, le chiffre a explosé à 1.282 cas: un taux d'infection juste derrière celui de New York, épicentre de l'épidémie américaine. Le nombre de morts, 49, est proportionnellement plus modéré, mais les habitants s'attendent à ce qu'il monte, quand la maladie terrassera les patients les plus graves.

La crise a révélé, avec une acuité particulière, les disparités économiques et sociales qui affectent historiquement les Amérindiens.

Comme d'autres tribus, les Navajos ont abandonné de gigantesques territoires en échange d'une promesse que l'Etat fédéral fournirait éducation et soins gratuitement, à perpétuité, rappelle Allison Barlow, directrice du Centre d'étude de la santé indienne à l'université Johns Hopkins.

La promesse n'a jamais été complètement tenue.

Sur les 71.000 kilomètres carrés de la réserve ne se trouvent que 12 établissements de santé.

L'agence fédérale dédiée, l'Indian Health Service, souffre de sous-financement chronique: elle ne dépense que 3.333 dollars par personne, alors que Medicare, la couverture maladie publique des Américains de plus de 65 ans, dépense 12.744 dollars par an, dit Allison Barlow.

Le Congrès a adopté une enveloppe de huit milliards de dollars spécifiquement pour les tribus affectées par la pandémie, "mais le défi, désormais, sera de pouvoir les dépenser, étant donnée la pénurie mondiale d'équipements et de personnels", ajoute la chercheuse.

- Maladies de la pauvreté -

L'histoire se répète pour les premières nations d'Amérique. La mortalité causée par la pandémie de grippe H1N1, en 2009, a été quatre fois plus importante chez les Amérindiens que chez toute autre minorité aux Etats-Unis.

Des tribus entières ont sans doute été décimées par la grippe espagnole de 1918.

Depuis l'arrivée des conquistadors européens, "ils ont subi des vagues de décimation de +nouveaux virus+", dit Allison Barlow.

Le retard d'infrastructures ne concerne pas que les cliniques.

La construction des réseaux d'eau a largement sauté les territoires amérindiens il y a un siècle, selon un rapport de l'ONG DigDeep.

"Ici même, au milieu de la première puissance mondiale, aux Etats-Unis d'Amérique, nos citoyens n'ont pas le luxe de pouvoir ouvrir un robinet pour se laver les mains avec de l'eau et du savon", dit Jonathan Nez, selon qui près de "30% de nos citoyens n'ont pas accès à l'eau courante et doivent aller chercher de l'eau à 30 ou 40 km".

Le manque d'internet à haut débit contribue au manque d'informations, et empêche les élèves de suivre des cours à distance. "Nous sommes à l'arrêt", dit Kathryn Ramos, professeure de sciences dans un collège.

La vulnérabilité des Navajos s'explique enfin par des affections chroniques souvent liées à la pauvreté: des problèmes cardiaques et pulmonaires, comme de l'asthme, et qui causent des complications graves du Covid-19, dit Matthew Heinz, médecin au centre médical de Tucson, où il traite habituellement des membres des tribus Apache et Tohono O'odham.

En particulier, les chiffres des Centres de prévention et de lutte contre les maladies montrent qu'ils sont plus susceptibles d'être diabétiques, un facteur qui semble mener à une réponse immunitaire anormale et souvent mortelle chez les personnes contractant le Covid-19.

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