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De Trump à l'avion abattu, le président ukrainien tient bon face aux crises

Ex-comédien sans expérience politique, le président ukrainien est parvenu en neuf mois à asseoir sa stature dans des situations politiques périlleuses, qu'il s'agisse de l'avion abattu par l'Iran, du scandale Trump ou de Poutine.

L'humoriste populaire de 41 ans, Volodymyr Zelensky doit cependant encore faire ses preuves sur les réformes stratégiques, lui qui a juré de "casser le système" des élites corrompues. Cette promesse et d'autres lui avaient permis de terrasser en avril 2019 son prédécesseur à la présidentielle et d'obtenir une majorité absolue au Parlement.

L'arrivée au pouvoir de cet homme sans pedigree politique, dans un pays en guerre avec des séparatistes prorusses, au coeur d'un bras de fer russo-occidental et rongé par la pauvreté et la corruption, en inquiète alors plus d'un.

Finalement, "les craintes quant à son manque d'expérience se sont avérées exagérées", constate Oleksiï Melnyk, analyste au Centre Razoumkov à Kiev.

Sa cote de popularité tient bon, à 60% en décembre, le mois où il rencontrait pour la première fois Vladimir Poutine.

Encore la semaine dernière, le scandale autour de propos désobligeants à l'égard du président de la part du Premier ministre perturbe à peine le pays.

M. Zelensky a évacué le problème en remettant publiquement à sa place son subordonné, en refusant la démission de cet homme de confiance, tout en ordonnant aux services de sécurité d'établir l'origine de cette fuite destinée à l'affaiblir.

A l'international, les difficultés n'ont pas manqué non plus.

M. Zelensky s'est d'abord retrouvé au milieu du scandale qui vaut une procédure de destitution à Donald Trump, soupçonné de lui avoir fait du chantage.

Il s'est extrait du débat en martelant ad nauseam qu'il s'agissait d'une pure affaire intérieure américaine. Une manière de ne s'aliéner ni les démocrates ni les républicains, alors que le soutien militaire et financier de Washington est crucial pour Kiev.

Face à Moscou, le président ukrainien a aussi plutôt bien manœuvré, alors qu'il ambitionne de mettre fin à la guerre dans l'est du pays, qui a fait plus 13.000 morts en six ans.

- 'Il apprend vite' -

Il a relancé les négociations de paix paralysées depuis trois ans et négocié des échanges de prisonniers, sans que son rendez-vous avec le maître du Kremlin ne se solde en Bérézina, comme le prédisaient ses adversaires.

Lors de la récente crise liée au crash de l'avion de ligne ukrainien abattu par "erreur" par l'Iran début janvier avec 176 personnes à bord, la réaction de Kiev a plus étonné.

Alors qu'Ottawa et Londres évoquaient un missile iranien, l'Ukraine se montrait dubitative pendant que Téhéran niait ce scénario. Ce qui a valu bien des critiques au chef de l'Etat.

"C'est (le Premier ministre canadien) Justin Trudeau qui a agi en leader politique de l'Ukraine" en accusant l'Iran, ironise l'analyste Mykola Davydiouk.

Kiev relève de son côté qu'en ménageant Téhéran, l'Ukraine a eu accès à l'épave et au site du crash, ce qui permettra de faire la lumière sur le drame.

"Zelensky apprend vite" et "agit avec de plus en plus de confiance", résume David Stulik, expert du centre d'analyse Valeurs européennes à Prague et ancien diplomate de l'UE à Kiev.

- Défis et attentes -

Cette gestion plutôt réussie des crises ponctuelles ne donne cependant guère d'indications quant à sa capacité à progresser sur les défis systémiques: éradiquer la corruption, réformer la justice, relancer l'économie d'un des pays les plus pauvres d'Europe...

Autant de promesses électorales et d'attentes de la part des alliés Occidentaux.

"C'est dommage qu'il n'utilise pas sa forte popularité pour faire quelque chose de vraiment grand", regrette M. Davydiouk.

Ainsi, un des projets phares économiques présenté par Volodymyr Zelensky jusqu'ici est l'ouverture du marché des terres agricoles du pays, très attendue des investisseurs mais qui inquiète de nombreux exploitants.

Depuis des mois son adoption traîne, les amendements se multiplient, la rue se mobilise. Et la présidence ne tranche pas, malgré une super-majorité au Parlement.

"Nous sommes dans une zone à risques" estime Oleksandre Sushko, directeur exécutif de la Fondation internationale Renaissance, expliquant notamment les tergiversations du président par un entourage "non professionnel" et composé de collègues de show-business.

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