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C'est un enjeu majeur du déconfinement: environ un million d'enfants doivent reprendre mardi le chemin de l'école, un redémarrage limité et strictement encadré mais qui suscite de nombreuses craintes face à une épidémie de coronavirus "toujours active" en France.
Avec cette décision contestée par des scientifiques et certains élus, le gouvernement entend poursuivre la levée progressive du confinement, qui a débuté lundi avec la réouverture de nombreux commerces et la fin de restrictions de déplacement imposées aux Français depuis 55 jours.
Pour répondre aux craintes des enseignants et des familles, les milliers d'écoles maternelles et primaires qui rouvrent leurs portes à partir de mardi seront soumises à un strict protocole sanitaire afin d'éviter toute nouvelle flambée de l'épidémie, qui a fait 26.643 morts en France selon le bilan officiel publié lundi soir.
Lavage de mains à répétition, port du masque recommandé pour les enseignants, respect "en permanence" des gestes barrières, limitation du nombre d'élèves par classe...: le protocole établi par le gouvernement doit permettre "une remise en marche" de l'école, selon le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer.
"Pour l'instant ça se présente bien, même si c'est très différent de ce qu'on a l'habitude de connaître et on est dans quelque chose de tout à fait inédit", a-t-il admis lundi tout en défendant une décision dictée par la volonté "de faire revenir ceux qui (se) sont les plus éloignés de l'école" pendant le confinement.
Pour tenter de calmer la fronde, l'exécutif a par ailleurs laissé aux parents le choix de ramener ou non leurs enfants à l'école et estime à 1,5 million (sur un total de 6,7) le nombre d'élèves concernés par cette rentrée qui s'échelonnera tout au long de la semaine, notamment jeudi à Paris et en Ile-de-France.
Les collèges doivent, eux, commencer à rouvrir à partir du 18 mai dans les seules zones où le virus circule peu.
- "A marche forcée" -
Ces garanties n'ont pas suffi à rassurer les enseignants et leurs syndicats qui dénoncent une rentrée "prématurée".
"Je n'y vais pas de gaité de coeur, je suis un peu stressée et inquiète car c'est une reprise dans des conditions inédites", témoignait Marie, institutrice dans une école élémentaire du Vaucluse, à la veille de la rentrée.
Très remontés, les syndicats rappellent que le conseil scientfique chargé d'éclairer le gouvernement s'était lui-même prononcé pour la feremeture des établissements jusqu'en septembre.
"Pourquoi avons-nous commencé par les enfants les plus jeunes pour mettre en place le déconfinement alors qu'on sait que c'est là que les gestes barrières sont les plus difficiles à appliquer?", s'est interrogée lundi Francette Popineau, secrétaire générale du SNUipp-FSU, premier syndicat du primaire.
Début mai, 332 maires de communes d’Ile-de-France, dont Anne Hidalgo à Paris, avaient déjà dénoncé dans une tribune commune un "calendrier intenable et irréaliste".
Les inquiétudes sont d'autant plus vives que l'épidémie reste "active et évolutive" en France malgré le reflux des admissions en réanimation, a insisté la Direction générale de la Santé lundi soir, en faisant état de 263 nouveaux décès en 24 heures après la relative accalmie observée dimanche (70 morts).
Avec le début du confinement, le pays redoute plus que tout une deuxième vague épidémique et garde un oeil attentif sur l'Allemagne ou la Corée du Sud qui ont dû rétablir des mesures de restrictions après l'apparition de nouveaux cas de contamination.
Dans un rapport publié lundi, le "Monsieur déconfinement" du gouvernement, Jean Castex, a d'ailleurs prévenu qu'un "reconfinement en urgence (devait) être anticipé".
Pour chasser ce spectre, le gouvernement pourra s'appuyer sur la loi prorogeant l'état d'urgence que le Conseil constitutionnel a validée lundi, confirmant notamment la limitation des déplacements à 100 km mais censurant certains éléments liés à l'isolement des malades et au "traçage" de leurs contacts.
Dénonçant "l'irresponsabilité de certains comportements", les autorités ont d'ores et déjà resserré la vis à Paris où la consommation d'alcool sera interdite sur les voies sur berges et le long d'un canal très fréquenté, où des dizaines de personnes s'étaient rassemblées lundi soir. "De voir du monde, de la vie, ça fait du bien", avait dit à l'AFP l'une d'elles, prénommée Nina.