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Le quotidien pro-démocratie Apple Daily à Hong Kong a annoncé lundi à ses lecteurs que son conseil d'administration se prononcera le 25 juin sur une éventuelle fermeture du journal, après le gel de ses actifs dans le cadre d'une loi sur la sécurité nationale.
Pendant des années, Apple Daily a affiché un soutien indéfectible au mouvement pro-démocratie et n'a jamais manqué de critiquer vertement les dirigeants chinois.
Son propriétaire, le magnat de la presse, Jimmy Lai, 73 ans, est actuellement en détention, condamné à plusieurs peines de prison pour son implication dans des manifestations pro-démocratie en 2019.
Il est également inculpé en vertu de la draconnienne loi sur la sécurité nationale, imposée l'an passée par Pékin, des faits passibles de la prison à vie.
Deux responsables du quotidien, le rédacteur en chef du titre Ryan Law et son directeur général Cheung Kim-hung ont été inculpés vendredi au nom de cette loi.
Les membres du conseil d'administration toujours en liberté se sont réunis lundi pour évoquer l'avenir du quotidien.
"Le conseil d'administration... a décidé de se réunir vendredi pour déterminer s'il doit mettre un terme à Apple Daily", a indiqué le quotidien dans une notification envoyée à ses lecteurs.
Des médias hongkongais, Now TV et Oriental Daily, des médias hongkongais, ont affirmé, en citant des sources, que le jour de la dernière publication du journal sera annoncé lors de la prochaine réunion qui se tiendra vendredi.
- Impossibilité de payer -
La fermeture du quotidien signifierait la fin d'un des rares journaux hongkongais d'opposition très critique à l'égard de Pékin.
Pour les autorités, qui n'ont jamais caché leur désir de réduire ce média au silence, il s'agirait d'une immense victoire.
Dans un entretien accordé à CNN, Mark Simon, un conseiller de M. Lai vivant à l'étranger, a indiqué lundi matin que le gel des actifs du journal l'empêchait de poursuivre ses activités.
"Notre problème n'est pas que nous n'avons pas de fonds, nous avons 50 millions de dollars (42 millions d'euros) en banque", a-t-il expliqué.
"Notre problème est que le ministre en charge de la Sécurité et la police ne nous laissent pas payer nos journalistes (...) notre personnel (...) et nos vendeurs. Ils ont bloqué nos comptes".
Cette mesure avait été ordonnée la semaine dernière, quelques heures après une perquisition au sein de la rédaction du journal et l'arrestation de cinq de ses dirigeants.
Le 17 juin, plus de 500 policiers ont effectué une descente dans les locaux du quotidien.
Ils ont arrêté cinq de ses dirigeants en raison d'une série d'articles qui, selon la police, appelaient à des sanctions internationales.
Un tribunal de Hong Kong a refusé samedi la libération sous caution de deux d'entre-eux.
C'est la première fois que des opinions politiques publiées par un organe de presse de Hong Kong entraînent des poursuites en vertu de cette loi controversée imposée par la Chine en 2020 pour tenter d'étouffer l'opposition toute dissidence dans l'ancienne colonie britannique.
- "Un crime très grave" -
La loi sur la sécurité nationale permet aux autorités hongkongaises de geler les avoir d'une personne physique ou de toute société susceptible de menacer la sécurité nationale.
Mi-mai, les avoirs de M. Lai, y compris ses participations dans les médias, ont été gelés au nom de la loi sur la sécurité nationale.
Le ministre hongkongais de la Sécurité John Lee avait affirmé le 17 juin que 18 millions de dollars de Hong Kong (2 millions d'euros) d'actifs détenus par Apple Daily avaient été gelés.
"Nous sommes face à une agence de sécurité, nous ne sommes pas face à des tribunaux", a dénoncé M. Simon sur CNN.
Il est lui-même recherché par la police de la ville pour avoir enfreint la loi sur la sécurité nationale. Il a cependant fui la ville l'an passé et vit depuis aux Etats-Unis.
Apple Daily a indiqué vouloir demander à M. Lee de débloquer une partie de l'argent gelé sur les comptes afin de pouvoir verser les salaires de ses 700 employés. En cas de refus, le journal entend saisir la justice.
Le ministère en charge de la sécurité à Hong Kong a refusé de dire s'il a été contacté par Apple Daily, invoquant des procédures judiciaires en cours.
"Mettre en danger la sécurité nationale est un crime très grave", a cependant rappelé un de ses porte-paroles à l'AFP.
"Nous traitons ces crimes conformément à la loi, en ciblant les actes illégaux, et nous invoquons le pouvoir de geler les avoirs liés à l'infraction en fonction des besoins et de la loi."