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"Il est temps" d'avoir pour la première fois un Africain à la tête de l'OMC, affirme le Suisso-égyptien Hamid Mamdouh, qui convoite le poste bientôt vacant de directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).
"Dans le cadre de l'Union africaine, les pays africains ont décidé en juillet 2019 que le prochain directeur général de l'OMC devrait être Africain. C'est un sentiment fort", a déclaré à l'AFP Hamid Mamdouh, qui travaille pour le cabinet d'avocats américain King & Spalding à Genève.
"L'Afrique n'a jamais occupé ce poste auparavant et il est temps, car toutes les autres régions ont occupé ce poste", a déclaré cet ancien diplomate égyptien, installé en Suisse depuis 35 ans.
Né au Caire, Hamid Mamdouh, 67 ans, diplômé en droit, n'est pas le seul candidat africain prêt à entrer dans la bataille. Le Nigérian Yonov Frederick Agah, actuellement l'un des vice-directeurs de l'OMC, le Béninois Eloi Laourou, ambassadeur auprès des Nations unies à Genève, ont également été pré-sélectionnés par l'Union africaine en février.
L'Union africaine espérait choisir un candidat unique d'ici juillet, la période de désignation du prochain chef de l'OMC devant débuter en décembre. Mais l'annonce du départ anticipé de l'actuel patron de l'OMC, le Brésilien Roberto Azevedo, a pris tout le monde de court.
Le sixième directeur général de l'OMC a annoncé à la mi-mai qu'il quitterait ses fonctions fin août, un an plus tôt que prévu, pour des raisons "familiales".
Cette annonce a obligé l'OMC à accélérer le processus de désignation de son successeur, les candidats ayant du 8 juin au 8 juillet pour déposer leur dossier.
Reste à savoir si les pays africains parviendront à s'entendre autour d'un candidat unique d'ici-là. D'autant que la Kényane Amina Mohamed, déjà candidate en 2012 et ancienne diplomate à Genève, semble vouloir aussi se lancer dans la course.
En attendant, M. Mamdouh fait déjà campagne à Genève, faisant valoir sa longue expérience à l'OMC.
Arrivé à Genève en 1985 en tant que négociateur commercial au sein du service diplomatique de l'Egypte, il a rejoint en 1990 le GATT, l'ancêtre de l'OMC, comme conseiller juridique puis assistant du directeur général adjoint.
"L'une de mes responsabilités importantes au sein de ce système a été la négociation et la rédaction de l'Accord général sur le commerce des services", entré en vigueur en 1995, année de naissance de l'OMC, a expliqué M. Mamdouh.
Il a ensuite passé plus de 20 ans à l'OMC, comme Secrétaire du Conseil du commerce des services jusqu'en 2001, puis à la tête de la division Services et Investissement jusqu'en 2017.
Il a rejoint en 2018 le cabinet d'avocats King & Spalding, et est également professeur invité au Centre d'études de droit commercial à l'Université Queen Mary de Londres.
- Un "ingénieur" -
M. Mamdouh reconnaît que son profil professionnel "s'écarte un peu des profils typiques des directeurs généraux précédents", mais quoi de mieux qu'un "ingénieur" pour réparer une voiture en panne, comme l'OMC?
"L'OMC est conduite par ses membres. Mais pour pouvoir conduire votre voiture, elle doit être en état de marche", dit-il.
"Si vous vous engagez dans un processus de réforme, ne préféreriez-vous pas avoir à vos côtés un des ingénieurs qui a participé à la conception et mise en place du système (...) pour vous aider à remettre en état de marche la voiture"? a-t-il ajouté.
En plein marasme économique mondial causé par la pandémie de Covid-19, plusieurs chantiers de taille attendent le futur patron de l'OMC: préparer la conférence ministérielle de 2021, donner un coup de fouet aux négociations qui piétinent et dénouer les conflits qui opposent l'organisation aux Etats-Unis.
"Tout le monde est d'accord pour dire qu'une réforme est nécessaire" mais les divergences surgissent lorsqu'il s'agit d'"interpréter cela", a indiqué M. Mamdouh.
Sa "première priorité" sera de relancer le dialogue, et de "réunir les membres autour d'une même table" pour trouver le "problème" et "un terrain d'entente". "C'est grandement nécessaire!"
Une autre de ses priorités sera aussi de relancer le bras législatif de l'OMC, a-t-il affirmé, faisant valoir que les négociations piétiennent "depuis plus de vingt ans", réduisant l'organisation à un organe chargé de trancher les conflits commerciaux.