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"Je fais ce qu'il dit. Vaut mieux": Valérie Bacot a raconté l'emprise qu'avait son ex-beau-père violent, devenu son mari et proxénète, lundi, au premier jour de son procès aux assises de Saône-et-Loire, pour l'avoir tué d'une balle dans la nuque.
"Au départ, j'étais contente qu'il revienne", se souvient Valérie Bacot quand elle est interrogée sur cette étonnante année 1997, où son beau-père rentre au foyer familial à sa sortie de prison, où il avait pourtant été incarcéré pour avoir violé celle qui était alors sa belle-fille âgée de 12 ans.
"Il avait dit à ma mère qu'il ne ferait plus rien", ajoute l'accusée. "Mais ça a recommencé".
Pendant plus de deux heures, cette femme à l'allure frêle, régulièrement secouée de sanglots, raconte alors son "enfer extrême".
A force de viols, elle tombe enceinte à 17 ans - il en a 42 -. Sa mère la chasse. "Je voulais garder mon enfant. J'avais personne. Où je pouvais aller?", dit-elle pour expliquer pourquoi, contre tout entendement, elle décide de suivre son violeur quand il lui propose de s'installer en couple.
"J'ai toujours voulu avoir des enfants et qu'ils aient un père", dit Valérie Bacot, qui a elle-même souffert d'un père absent. "Alors, c'était obligé".
"De l'amour?", demande la présidente de la cour, Céline Therme. "J'ai toujours fait ce qu'il m'a dit", ne peut que répondre l'accusée.
"Il trouvait toujours quelque chose. Il ne supportait pas d'entendre les enfants pleurer ou qu'ils soient dans ses pattes. Je faisais tout pour qu'ils soient calmes mais c'est compliqué".
"Au départ, c'était des claques, puis c'est devenu des coups de pied, des coups de poing et il m'étranglait. Au fil du temps, il y a eu des menaces avec l'arme" (un pistolet avec lequel Valérie Bacot tuera son mari, Daniel Polette).
"Il me la mettait sur ma tête et me disait: la prochaine fois, je te louperai pas", continue l'accusée dans des hoquets de larmes, se souvenant que, "surtout, il ne faut pas, il ne faut pas crier parce que, sinon, c'est encore pire".
- "Je voulais la sauver" -
Elle ira même jusqu'à épouser son bourreau, parce que ses quatre enfants "demandaient pourquoi ils n'avaient pas le même nom que moi". Deux d'entre eux, et le petit ami de sa fille, ont déjà été condamnés en 2019 à six mois de prison avec sursis pour avoir aidé leur mère à dissimuler le cadavre.
Obéir, c'est aussi le cas quand son mari lui dit que, elle, cette "bonne à rien", sa seule solution pour "ramener de l'argent" serait de se prostituer. L'homme aménage le monospace familial et y offre sa femme pour des passes de 20 à 50 euros le long de la départementale.
Dans un carton calfeutrant la vitre arrière, un trou a été pratiqué pour que "Dany" puisse regarder et, surtout, contrôler si elle faisait "ce qui fallait". Sinon, il lui glissait des "instructions" par les oreillettes qu'elle devait garder.
Mais, le dimanche 13 mars 2016, Dany lui annonce que ce soir, elle aura ce "brut" dont même lui a peur, et qu'il faudra faire "quelque chose de particulier". "J'avais mal. Il y avait du sang. Tout ce que j'avais vécu revenait d'un coup", dit-elle pour expliquer pourquoi elle s'est saisie du pistolet de son mari, caché dans le véhicule, et a fait feu dans sa nuque.
"Mais ce pistolet, c'est vous qui l'aviez amené?", corrige la présidente. "J'avais peur du client", répond Mme Bacot. "Et éventuellement pour l'utiliser contre Daniel Polette?", questionne la présidente. L'accusée raconte alors "la grosse peur" qu'elle a eue, ce même dimanche, quand sa fille Karline, 14 ans, lui confesse que son père lui avait demandé comment elle était "sexuellement".
"Je voulais la sauver", assure Valérie Bacot, qu'on surnomme souvent la "nouvelle Jacqueline Sauvage", condamnée pour avoir tué son mari, puis graciée en 2016. Ce sont d'ailleurs les mêmes avocates qui défendent Mme Bacot, Janine Bonaggiunta et Nathalie Tomasini.
"Il n'y avait pas d'autre solution?", hasarde la présidente. "J'sais pas. Je la cherche toujours, la solution".
Le procès est prévu jusqu'à vendredi.