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Justice des mineurs: une réforme "historique" mais contestée devant l'Assemblée nationale

L'Assemblée a clos dans la nuit de jeudi à vendredi, sa première journée de débats autour de la réforme de la justice pénale des mineurs, par une série de passes d'armes entre le Garde des Sceaux qui vante une occasion "historique" et la LFI qui dénonce un texte de "répression".

"Cette réforme est le fruit de plus de dix ans de consultations: ce sont quatre gardes des Sceaux et presque autant de majorités qui ont préparé" cette révision de l'ordonnance fondatrice de 1945 sur "l'enfance délinquante", a rappelé Eric Dupond-Moretti à l'ouverture des débats.

L'ex-avocat, qui rappelle volontiers avoir défendu des mineurs délinquants, fait valoir que le texte "consacre l'éducatif sur le répressif", comme depuis la Libération, et que la nouvelle ordonnance a été "concertée" et "co-construite".

Mais il y a une semaine, une centaine d'avocats, magistrats, greffiers et éducateurs manifestaient devant le palais de justice de Bobigny, le premier tribunal pour enfants de France, pour dénoncer la logique "répressive" du texte et un manque de moyens.

Le ministre de la Justice le martèle toutefois: "Le répressif, avec les gamins, ça marche pas", il faut "d'abord l'éducatif" et "une réponse rapide".

Cible de plus de 400 amendements des parlementaires jusqu'à vendredi, cette réforme prévoit d'instaurer une présomption d'irresponsabilité avant 13 ans et d'accélérer les jugements via une procédure en deux temps avec mise à l'épreuve.

Il y aura une première audience devant statuer sur la culpabilité dans des délais de trois mois maximum (contre 18 mois actuellement en moyenne) et une seconde audience pour prononcer une sanction ou des mesures éducatives.

Il est prévu en outre de limiter la détention provisoire des mineurs qui bat des records alors que la délinquance juvénile n'augmente pas depuis plus de dix ans.

L'entrée en vigueur a été reportée du 1er octobre 2020 au 31 mars 2021, en raison de la crise du coronavirus.

- accusations de "nihilisme" -

L'annonce surprise en novembre 2018 d'une nouvelle ordonnance par la ministre de la Justice d'alors, Nicole Belloubet, avait d'emblée provoqué une levée de boucliers des professionnels.

La nécessité d'une refonte d'ampleur du texte fondateur de la justice des mineurs, amendé 39 fois depuis sa création à la Libération, fait l'unanimité. Mais le choix d'une simple ordonnance, prise en septembre 2019 par le gouvernement et que les députés sont appelés à ratifier, froisse les syndicats du secteur, désireux d'un débat de société.

Les députés PCF ont défendu sans succès une motion de rejet du texte, "en rupture avec l'esprit de l'ordonnance de 1945" et ne présentant pas "les garde-fous nécessaires" pour les mineurs, vus au travers du "seul prisme de la délinquance", selon Elsa Faucillon.

Dans l'hémicycle, les débats en soirée ont été bien souvent monopolisés par les passes d'armes entre LFI et M. Dupond-moretti qui a régulièrement laissé percer son agacement, à l'égard notamment du député Bernalicis.

"Vous êtes systématiquement dans l'opposition avec les oppositions", a fait valoir le député du Nord.

"Vous ne proposez rien!", "le nihilisme devient votre programme", a balayé le Garde des Sceaux qui s'est également échauffé après une intervention en défense du travail parlementaire de la députée communiste Elsa Faucillon.

"Je n'ai pas 4 ans (...) Vous n'êtes mon institutrice", lui a séchement répliqué Eric Dupond-Moretti.

Les députés communistes ont toutefois fait adopter avec les LREM et l'accord du gouvernement, des amendements identiques visant à spécialiser les juges des libertés et de la détention (JLD) "dans les affaires impliquant des mineurs".

La gauche a déposé des amendements pour que la responsabilité pénale à 13 ans soit "irréfragable", c'est-à-dire que le juge ne puisse revenir dessus.

"Celui qui connaît l'enfant, c'est pas le code, c'est le juge", a répondu le garde des Sceaux. "Je préfère une solution pragmatique plutôt que dogmatique".

L'Assemblée a adopté un amendement de LREM permettant de libérer plus facilement des places en centres éducatifs fermés (CEF) et un autre de la "marcheuse" Aurore Bergé rendant obligatoires dans les CEF, la mise en place d'activités culturelles et socioculturelles.

Malgré des critiques et la volonté de durcir le texte, le groupe LR a annoncé qu'il votera cependant en faveur du projet de loi, "une base nécessaire", tout comme les députés RN.

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