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La sidérurgie européenne face à des vents contraires

Difficultés financières de British Steel, abandon du projet de fusion Thyssenkrupp-Tata Steel Europe, résultats mitigés pour ArcelorMittal: les sidérurgistes européens connaissent un début d'année délicat sur fond de ralentissement économique.

La fédération européenne du secteur, Eurofer, a prévenu dans ses dernières prévisions début mai que le marché de l'acier dans l'UE devrait connaître un ralentissement cette année avec une baisse de la demande attendue de 0,4%, après une hausse de 3,3% en 2018.

Le marché européen "avait été plutôt dynamique ces dernières années" avec une consommation d'acier qui augmentait en moyenne de 1% à 2% par an, observe Ambroise Lecat, analyste du cabinet Roland Berger.

Mais aujourd'hui, "on sent un ralentissement industriel assez marqué", en particulier du côté de l'automobile allemande, note-t-il. La consommation d'acier en Europe est passée à un régime "au mieux stable et au pire légèrement décroissant vers les moins 1%".

A cette baisse de demande "quand même significative" s'ajoute "une pression à l'importation plus forte", ajoute l'analyste.

La fédération Eurofer a mis en cause la forte hausse des importations que, selon elle, les mesures de sauvegarde pour protéger le marché européen contre le risque de surcapacités en acier, mises en place par l'UE à titre provisoire en juillet 2018 et confirmées en février, n'ont pas permis d'endiguer.

L'an dernier, les importations ont bondi de 12,6% tandis que les ventes intérieures ne progressaient que de 1,7%, a indiqué Eurofer.

- taxe carbone en hausse -

"Avec une prévision de consommation d'acier en baisse de 0,4% en 2019, la situation des producteurs européens va se détériorer", a alerté le directeur général d'Eurofer, Axel Eggert.

Un point de vue partagé par le géant sidérurgique ArcelorMittal, qui a publié début mai des résultats trimestriels toujours dans le vert, mais en net recul. Le groupe assure que le ralentissement de la demande en Europe a été aggravée par la hausse des importations.

ArcelorMittal réclame un renforcement des mesures de sauvegarde, alors qu'un assouplissement des quotas d'importation est envisagé pour juillet. Le groupe a revu en baisse sa prévision de la demande d'acier en Europe cette année, désormais attendue en baisse de 1%.

Dans ce contexte, ArcelorMittal a décidé de réduire temporairement sa production d'acier, en mettant à l'arrêt son site polonais de Cracovie, pénalisé par les importations d'acier russe, et en réduisant l'activité de celui des Asturies.

La surcapacité mondiale persiste, et en outre d'autres facteurs pèsent sur l'acier européen, indique Ambroise Lecat. Il cite les prix de l'énergie "pas très favorables en Europe en ce moment" et les montants liés à la taxe carbone qui ont "énormément augmenté".

ArcelorMittal réclame que les importations d'acier dans l'UE soient soumises aux mêmes taxes carbone que les ventes des producteurs européens.

- zones d'incertitude -

Nouveau coup de tonnerre il y a une semaine lorsque le sidérurgiste britannique British Steel, choisi pour reprendre l'aciérie française Ascoval, a fait état de difficultés de trésorerie.

Le groupe a mentionné des "incertitudes créées par le Brexit", venues s'ajouter au poids de la taxe carbone qui avait déjà nécessité un accord de financement de 120 millions de livres avec le gouvernement.

Autre surprise il y a dix jours, lorsque le conglomérat allemand Thyssenkrupp a enterré son mariage prévu avec les activités européennes de l'indien Tata Steel, faute d'avoir pu convaincre les autorités européennes de la concurrence.

Dans la foulée, Thyssenkrupp a publié des résultats trimestriels janvier-mars en recul dans sa division acier.

"L'acier a tendance à aggraver les variations de la conjoncture industrielle", rappelle Ambroise Lecat. "La consommation d'acier, c'est le PIB avec des suramplifications", résume l'analyste de Roland Berger.

Sur le moyen terme, la demande en métaux de base, dont le minerai de fer, va se maintenir, mais actuellement l'économie est dans une phase "attentiste", estime de son côté Christian Mion, associé du cabinet EY.

D'autre facteurs interviennent et en premier lieu, "la Chine (qui) est en clair ralentissement", relève-t-il, alors que ce pays représente entre 40% et 60% de la consommation de la plupart des matières premières.

Ensuite, le contexte géopolitique présente "de grosses zones d'incertitude", dont notamment "l'Europe dans une phase électorale, le Brexit, l'Iran, les relations Chine-Etats-Unis". Ces "éléments anxiogènes freinent un appétit consumériste", juge Christian Mion.

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