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Le fonds souverain de la Norvège, le plus gros au monde, a placé mercredi sur sa liste noire 12 nouveaux groupes, dont des géants miniers et énergétiques, signe du désamour croissant des investisseurs pour les gros émetteurs de CO2.
Dans un premier communiqué, la Banque de Norvège, qui chapeaute le fonds de plus de 1.000 milliards de dollars, a justifié l'exclusion des groupes miniers suisse Glencore et britannique Anglo American, et des producteurs d'électricité allemand RWE, australien AGL Energy et sud-africain Sasol par leur présence importante dans le charbon.
C'est la conséquence d'un durcissement des règles d'investissement décidé par le Parlement norvégien l'an dernier pour obliger le fonds à se désengager davantage de cette énergie fossile, accusée d'être responsable du réchauffement climatique.
Pour les mêmes raisons, BHP Group, Vistra Energy, Enel et Uniper ont été placées sous observation, les mettant à la merci d'une exclusion en cas de faux pas.
L'ONG environnementale allemande Urgewald s'est félicitée que le fonds, lui-même alimenté par les revenus pétroliers de l'Etat norvégien, poursuive son désengagement du secteur du charbon, mais elle dit rester sur sa faim.
"Nous sommes déçus car certaines entreprises placées sous observation auraient dû être clairement des candidates à l'exclusion", a commenté sa directrice, Heffa Schuecking.
"BHP, qui a produit en 2019 27,5 millions de tonnes de charbon thermique se situe clairement au-dessus du critère absolu du fonds qui est une production annuelle de charbon de 20 millions de tonnes", a-t-elle ajouté.
- "Première étape" -
Désormais sous observation, le géant italien Enel a répété son ambition de se développer en respectant l'Accord de Paris sur le climat, notamment en se désengageant du charbon.
Dans un second communiqué, la banque centrale a aussi fait état mercredi de l'exclusion de sept autres sociétés, cette fois-ci sur des critères purement éthiques.
Sur les recommandations du conseil d'éthique, organe consultatif qui guide le fonds dans ses placements, Canadian Natural Resources, Cenovus Energy, Suncor Energy et Imperial Oil ont été bannies en raison de leurs "émissions inacceptables de gaz à effet de serre".
C'est la première fois que le fonds exclut des entreprises pour ce motif, ajouté à ses règles de gouvernance en 2016.
"C'est une première étape nécessaire pour le fonds pétrolier (son nom populaire, ndlr) dans son désengagement de certains des plus grands coupables climatiques", a réagi un responsable de Greenpeace Norvège, Martin Norman.
"Nous voulons que ce soit le début de la fin de l'argent norvégien investi dans des entreprises qui ne feront clairement pas partie de la solution à l'avenir", a-t-il ajouté.
Le brésilien Vale, impliqué dans la rupture d'un barrage qui a fait quelque 270 morts en janvier 2019, et l'égyptien ElSewedy Electric ont également rejoint la liste noire, accusés de "dégâts graves sur l'environnement".
Idem pour l'électricien brésilien Eletrobras, à qui il est reproché d'avoir violé des droits des peuples indigènes lors du développement de la centrale électrique Belo Monte.
En revanche, deux autres sociétés, l'américaine Aecom et Texwinca Holdings (Hong Kong), ont été déclarées de nouveau fréquentables, la première n'étant plus impliquée dans la construction d'armes nucléaires, la seconde ayant liquidé une filiale accusée de violer les droits des travailleurs.
Investi dans plus de 9.200 entreprises et contrôlant l'équivalent de 1,5% de la capitalisation boursière mondiale, le fonds norvégien pesait mercredi près de 10.250 milliards de couronnes (1.011 milliards de dollars - 931 milliards d'euros).
Ses décisions ont d'autant plus d'impact qu'elles sont souvent suivies par d'autres investisseurs.