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A l'hôpital de campagne de Madrid, sortir guéri sous les applaudissements

Quand les soignants interrompent leur travail pour applaudir, c'est le signal qu'un patient est guéri du Covid-19, au parc des expositions de Madrid mué en hôpital de campagne où plus de mille malades sont alités.

A quelques minutes de l'aéroport, l'enceinte d'Ifema Foire de Madrid abrite habituellement congrès, concerts et défilés de mode.

Mais depuis le 21 mars, le nom "Ifema" ne sert plus qu'à désigner l'hôpital provisoire monté en hâte par l'armée et par la région de Madrid, la plus endeuillée d'Espagne avec près de 5.000 morts du nouveau coronavirus sur les près de 11.000 recensés dans le pays.

Sous la lumière crue des néons du pavillon 9, une infirmière seulement masquée s'arrête net en atteignant l'une des lignes jaunes qui délimitent la zone dite "sale", contaminée, où n'évoluent que des soignants entièrement protégés.

Des cloisons amovibles séparent des unités de douze lits blancs, distants de deux mètres les uns des autres et parfois équipés de bouteilles d'oxygène. Une malade dort profondément, une autre pianote sur son téléphone, une troisième pèle une orange.

Trois patients masqués attendent, assis. Ils ont été déclarés guéris. Et les applaudissements fusent quand ils se lèvent pour partir.

"Il y a déjà eu 900 personnes guéries dans cet hôpital où plus de 2.000 patients sont passés" et huit sont morts, dit à l'AFP Fernando Prados, coordinateur général de la structure, montée pour décongestionner des hôpitaux débordés.

Censée abriter à terme 5.500 lits, elle s'est "arrêtée pour le moment à 1.500", explique-t-il, parce que les hôpitaux de la région voient, peu à peu, diminuer l'affluence aux urgences.

- Trois gants pour chaque main -

Maria Sanchez Fernandez, une infirmière de 29 ans, désinfecte chaque jour soigneusement l'écran facial de protection en plastique sur lequel elle a écrit son nom.

"Au début, on nous donnait quatre gants (à enfiler les uns sur les autres, NDLR), maintenant ils disent que deux sont suffisants. Dans le doute, j'en mets trois, c'est ma santé d'abord", dit cette infirmière travaillant habituellement dans un centre de santé, et venue comme "volontaire".

Egalement âgée de 29 ans, Maria Luisa Prados Jimenez fait partie d'un bataillon de jeunes internes, en dernière année de médecine, réquisitionnés pour Ifema tout en poursuivant leurs gardes dans les véritables hôpitaux de la ville.

Cette structure a été conçue pour les cas les moins graves, "les patients relativement stables", explique-t-elle. Mais "un homme de 63 ans, sans antécédents importants, a vu son état empirer soudainement jeudi, on a dû l'envoyer à l'hôpital Gregorio Marañon en soins intensifs et maintenant, je me suis renseignée, il est dans un état très grave".

La soixantaine, "ça me paraît jeune, c'est l'âge de mon père", ajoute cette fille d'un médecin d'Andalousie (sud), qui se fait du souci pour lui.

Relevant qu'au tout début, "c'était un peu le chaos et la désorganisation" à Ifema, qui a fait l'objet de nombreuses critiques, elle constate que "ça s'est beaucoup amélioré" depuis lundi.

"On peut maintenant demander une analyse ou une radio des poumons" tandis qu'une petite unité de soins intensifs a commencé à fonctionner.

Dans un immense entrepôt voisin, où l'on n'entre qu'après avoir désinfecté ses chaussures, des militaires en treillis s'affairent à trier du matériel sanitaire, dont une partie est arrivée de Chine.

- "Tendresse" et "humanité" -

Sur le seuil du parc des expositions, Eduardo Lopez, employé du bâtiment de 59 ans, respire à pleins poumons le parfum du soulagement. Il fait partie des patients déclarés guéris et va s'engouffrer dans un taxi.

Très ému, il donne la note de "10/10" à tous ceux qui l'ont soigné "avec tendresse et une énorme dose d'humanité".

Mais il restera marqué par "la souffrance générée par la maladie et l'incertitude: ça affaiblit psychologiquement de savoir que tant de gens meurent et que c'est la réalité, pas une série que tu regarderais à la télé".

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