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Printemps de Bourges: Favé, Eesah Yasuke, la relève du rap

Largement ouvert au hip-hop cette année, le Printemps de Bourges a misé sur des poids lourds, Dinos ou Gazo, mais aussi sur la nouvelle génération, comme Favé, tout en ego-trip, ou Eesah Yasuke, plume engagée.

Favé, 18 ans, est une météorite venue de la région parisienne. Repéré à 16 ans grâce à des morceaux postés sur les réseaux sociaux, il entre à cet âge-là "pour la première fois en studio, chez un mec qui faisait des sons pas trop chers", se souvient-il pour l'AFP.

Depuis, Gazo l'a contacté pour un featuring, une de ces collaborations dont le rap est friand, sur "No Lèche". Et un des titres de Favé, "Urus", approche les 40 millions d'écoute sur Spotify, première plateforme musicale mondiale.

Favé est l'incarnation de cette "scène rap frénétique", comme le dit à l'AFP Boris Vedel, directeur du Printemps de Bourges. "Le public du rap, il n'est même plus amoureux, il est passionné, du jour au lendemain, des artistes inconnus encore il y a quelques mois remplissent des salles juste en passant par leurs propres réseaux sociaux", déroule le responsable.

"Tellement ça va vite, je n'ai pas eu le temps de réaliser que c'est une chance de +ouf+ tout ce que je vis", glisse le rappeur. "Je n'ai jamais été voir dans ma vie ni un concert ni un festival, ma première expérience de tout ça, c'est maintenant", confesse-t-il.

Nullement impressionné, Favé a donc chanté pour la première fois en festival au Printemps de Bourges, pour son quatrième passage seulement sur scène dans sa carrière naissante.

- "Prêt pour faire bouger tout Paris" -

Il est programmé pour aller loin, comme on entend dans son morceau "Mercedes": "J'suis préparé/Banlieusard prêt pour faire bouger tout Paris".

Sur scène, Favé est épaulé par un DJ juché sur une sorte de Space Invader géant. Quand il déboule, une forêt de smartphones s'allume pour le filmer et les spectateurs, adolescents en écrasante majorité, connaissent déjà refrains et punchlines par cœur. Il passera cet été par le festival Solidays, entre autres.

Eesah Yasuke lui a succédé sur scène, avec un rap différent, plus posé, plus réfléchi, qui a réussi à capter l'attention d'un public pourtant venu là pour faire la fête. La jeune femme -- qui ne dit pas son âge -- a commencé à écrire des poèmes à 14 ans pour coucher sur le papier une vie heurtée. Originaire de Roubaix (elle vit aujourd'hui à Lille), elle est alors placée dans un foyer qui l'éloigne de son projet de sport-études pour devenir sprinteuse.

"Quand ton projet ne se fait pas, tu as l'impression que tout s'arrête, mais c'était un jalon", décortique-t-elle pour l'AFP. Son prochain mini-album prévu pour le 30 mai, "Prophétie", s'inspire de son parcours.

- Éducatrice spécialisée -

L'envie d'écrire, devenue envie de rapper, a resurgi quand la jeune adulte allait devenir "éducatrice spécialisée pour bosser en accueil de jour, avec des personnes en situation d'exclusion".

"J'ai envie de chanter sur ce qui me touche": Ses morceaux dénoncent le racisme ("NGR") ou la montée des idées d'extrême droite ("X-Trem"). Son premier mini-album "Cadavre exquis" sorti en 2021 a touché les oreilles qui comptent. Outre son propre show, elle était une des voix d'une soirée au Printemps de Bourges concoctée par Oxmo Puccino, figure du rap hexagonal.

Oxmo Puccino a été séduit par le rap sensible de cette rappeuse dont le nom de scène vient de Yasuké, premier samouraï noir au XVIe siècle. Capturé par des marchands d'esclaves au Mozambique, il arriva au Japon, où il entra au service d'un seigneur. Eesah Yasuke a, elle, pratiqué le ju-jitsu, autant pour cet art martial que pour sa philosophie: "on ne l'utilise pas pour agresser, on sait se défendre quoi qu'il arrive".

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