Partager:
Le procès des laboratoires Servier et de l'Agence du médicament dans l'affaire du Mediator, un antidiabétique tenu pour responsable de centaines de morts, a repris mercredi à Paris sur une offensive procédurale de la défense.
Après une première journée lundi, entièrement consacrée à l'organisation de ce procès-fleuve prévu pour s'achever fin avril 2020, le tribunal correctionnel a examiné trois questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) soulevées par les avocats des laboratoires.
La première d'entre elles porte sur le point de départ du délai de prescription en matière de tromperie, l'une des infractions reprochées au groupe pharmaceutique. La jurisprudence a évolué en 2005 et a modifié ce point de départ.
Les avocats des laboratoires estiment que celui-ci ne doit pas commencer à partir de la révélation des faits, mais bien avant, la loi n'étant pas rétroactive.
Le tribunal a rejeté cette première QPC, considérant qu'elle ne présentait pas de "caractère sérieux" et qu'il n'y avait donc "pas lieu de la transmettre à la Cour de cassation".
Il se prononcera jeudi, à la reprise de l'audience, sur deux autres questions prioritaires de constitutionnalité débattues en fin de journée et portant elles sur les délits de "prise illégale d'intérêts" et de "pantouflage". Le parquet a estimé qu'elles étaient toutes deux "dépourvues de caractère sérieux".
Après avoir tranché sur ces deux QPC, le tribunal doit se pencher sur d'autres questions de procédure posées par la défense. Les débats sur le fond du dossier ne sont pas attendus avant mardi.
A la reprise de l'audience mercredi, les laboratoires Servier avaient assuré qu'il n'y aurait "aucun déni de la réalité" des souffrances vécues par les utilisateurs du Mediator.
Le groupe pharmaceutique a "une très grande conscience de la réalité et de la gravité des effets secondaires parfois mortels" et "une très grande compréhension de la douleur vécue" par les victimes, a affirmé Hervé Temime, l'un des quatre avocats des laboratoires.
Présenté comme un antidiabétique mais largement prescrit comme coupe-faim, le Mediator est à l'origine de graves lésions cardiaques et pourrait être responsable à long terme de 2.100 décès, selon une expertise judiciaire. Commercialisé pendant 33 ans jusqu'à son retrait du marché le 30 novembre 2009, il a été utilisé par cinq millions de personnes en France.
L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM, ex-Afssaps) est jugée au côté des laboratoires Servier pour "homicides et blessures involontaires" par "négligence", pour avoir tardé à suspendre la vente du médicament.
Onze personnes morales et douze personnes physiques comparaissent au total devant le tribunal correctionnel.