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Supprimer les émissions de CO2 qui réchauffent la planète va nécessiter plus d'innovations, technologiques mais aussi financières: une trentaine de ministres de l'Energie ou du Climat planchent jusqu'à mercredi à Paris sur les moyens de financer les gigantesques investissements nécessaires à la transition énergétique et climatique.
Face au réchauffement qui "est en train d'arriver" en ce moment, le monde de l'énergie est encore trop dans le "business as usual" et doit évoluer vers plus "d'innovation", a enjoint l'émissaire du président américain pour le climat, John Kerry, lors du 50e anniversaire de l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
"Il est temps que les diplomates et les ministres de l'Environnement s'effacent devant les ministres de l'Energie, l'industrie et les chercheurs" pour faire avancer la lutte contre le réchauffement, a renchéri le ministre irlandais du Climat et de l'Environnement Eamon Ryan.
M. Ryan copréside cette première réunion internationale de haut niveau depuis la COP28 à Dubaï en décembre, où le monde est convenu de "transitionner hors" des énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz), émettrices de gaz à effet de serre et responsables du réchauffement de la planète.
"Nous devons déployer les technologies existantes et rentables aussi vite que possible", notamment dans les renouvelables, et "nous devons amener sur le marché de nouvelles technologies plus vite que nous ne le faisons actuellement", a jugé M. Kerry.
Il faisait allusion notamment aux technologies, pas toutes éprouvées, permettant d'économiser ou d'utiliser plus efficacement l'énergie, de capter le CO2, stocker l'électricité ou produire de l'hydrogène.
"Pourquoi? Parce que cette année il fait plus chaud que l'an dernier et que l'an prochain il fera plus chaud que cette année. C'est en train d'arriver et c'est garanti" par la science, a-t-il lancé devant un parterre de ministres de l’Energie et du Climat réunis par l'AIE.
"Même s'il y a eu une énorme augmentation des énergies propres comme l'éolien et le solaire, cela n'est pas suffisant pour atteindre les objectifs fixés pour 2050", a abondé le directeur de l'AIE Fatih Birol.
"Nous devons soutenir des technologies qui ne sont pas encore sur le marché" et l'industrie qui les produit, a-t-il ajouté.
M. Birol a lui aussi appelé les gouvernements à investir dans l'innovation.
Les investissements massifs à réaliser portent non seulement sur les énergies renouvelables, selon la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen, mais aussi sur "les réseaux d'interconnexions", les "entreprises de la clean tech" (technologies propres) et les "chaînes d'approvisionnement".
Bruno Le Maire, ministre français de l'Economie, de l'Industrie et de l'Energie, coprésident de la séance, a plaidé pour plus de créativité en matière de finance, en poussant le projet "d'Union européenne des marchés de capitaux", promu par le président français Emmanuel Macron pour financer la transition en Europe.
"Nous ne pouvons plus nous appuyer sur la dette publique en Europe (...) nous avons besoin de compter sur le financement privé" afin d'accélérer la transition, a-t-il dit. "Nous avons besoin d'une union des marchés de capitaux aussi vite que possible".
- "Plus une seule centrale au charbon" -
M. Kerry a salué l'action de la Chine qui construit actuellement "plus de capacités électriques en énergies renouvelables que l'ensemble du monde réuni".
Mais il a regretté que la mise en oeuvre de "l'équivalent de 500 gigawatts de capacités de production électrique dans des centrales au charbon" soit prévue en Asie, essentiellement en Asie du sud-est dans les années à venir.
"Sachant ce que nous savons et connaissant la réalité du changement climatique, il ne devrait plus y avoir une seule centrale au charbon relâchant du CO2 dans l'atmosphère en commande dans le monde aujourd'hui", a lâché John Kerry.
Cela va "annuler" tout "ce qui a été fait en Europe et aux Etats-Unis depuis 15 ans pour réduire les émissions de CO2", selon lui.
Pour développer des énergies alternatives aux énergies fossiles, les investissements mondiaux (publics et privés) devront s'élever à 4.500 milliards de dollars par an d'ici 2030, selon l'AIE, dont "au moins 2.200 milliards par an dans les pays émergents et en développement".
L'AIE, organisation intergouvernementale rattachée à l'Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE), composée de pays pour la plupart importateurs de pétrole, avait été créée en plein choc pétrolier dans les années 70 pour organiser l'approvisionnement.
La réunion doit se terminer mercredi par un communiqué fixant le mandat de l'AIE "pour les deux prochaines années".