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"Gloire au dirigeant turkmène, gloire au Protecteur !". Sous un soleil brûlant, ils sont des milliers, en tenue traditionnelle et drapeau en main, à chanter les louanges de l'homme fort du Turkménistan, Gourbangouly Berdymoukhamedov, pour l'inauguration d'une ville nommée en son honneur.
Cette cité, encore inhabitée, a été solennellement ouverte lors d'une fastueuse cérémonie à laquelle des journalistes de l'AFP ont été conviés, invitation exceptionnelle tant l'accès au Turkménistan, pays reclus d'Asie Centrale, est rare.
Trois heures durant, les participants ont enchaîné danses, spectacles et démonstration de dressage de chevaux, avant qu'un feu d'artifice en soirée ne vienne clôturer cette cérémonie.
Mais si le principal intéressé est en Arabie saoudite pour le grand pèlerinage musulman du hajj, tout ici rappelle la présence de Gourbangouly Berdymoukhamedov, qui fête ses 66 ans jeudi, dont plus de seize à présider au destin de cette ex-république soviétique.
Au centre de cette ville, trône un monument de 43 mètres de haut, à la gloire de ce dentiste de formation qui, après avoir passé la main à son fils Serdar en 2022, est resté aux commandes.
Nommé à la tête d'un organe suprême aux immenses prérogatives, il a été fait "chef de la nation turkmène" et porte le titre de "Héros-Protecteur" (Arkadag). Un nom donné à cette ville nouvelle, mais également à un club de football, composé des meilleurs joueurs du pays, et à des médias.
- "Ville intelligente" -
"Le monument au centre de la nouvelle ville d'Arkadag est un hommage à l'éminent homme politique de la modernité et au grand fils du peuple turkmène Gourbangouly Berdymukhamedov", a déclaré à l'AFP sous couvert d'anonymat un membre du ministère de la construction et de l'architecture.
De couleur or, le dirigeant est représenté sur son cheval préféré, tenant d'une main les rênes pour maitriser l'animal dressé sur ses pattes arrières, tandis que son bras droit semble montrer la voie à suivre, dans un geste grandiloquent.
Une posture laissant penser à une réinterprétation turkmène du célèbre tableau de Napoléon Bonaparte par Jacques-Louis David. Si, contrairement à l'ancien empereur, Gourbangouly Berdymoukhamedov n'a aucunes velléités expansionnistes, répétant à l'envie le caractère "pacifique" de son régime, il partage cependant avec lui son goût pour le faste.
Une habitude critiquée régulièrement par des ONG l'accusant de dépenser sans compter les revenus tirés des immenses réserves de gaz dans des projets grandioses sans grands bénéfices pour la population.
Mais les autorités l'assurent: "les meilleures conditions ont été créées" pour les futurs quelque 70.000 habitants d'Arkadag, première "ville intelligente" de ce pays recouvert par les sables et bordé par la mer Caspienne.
- "Projet grandiose" -
Tout est fait pour y vivre confortablement et cette ville respectera de nombreuses normes écologiques, renchérissent les médias étatiques, alors que le Turkménistan se situe dans les abysses du classement de l'ONG Reporters sans frontières (RSF) de la liberté de la presse.
La construction, "projet grandiose" débuté en 2019, a tout de même coûté environ 5 milliards de dollars. Mais la ville déjà a été récompensée par 21 certificats internationaux, se félicite le pouvoir.
En l'absence de Berdymoukhamedov père jeudi, inspecteur minutieux lors des travaux, c'est donc le fils Serdar qui s'est chargé d'inaugurer cette ville située à environ 30 kilomètres de la capitale Achkhabad, au pied de la chaîne de montagnes du Kopet-Dag, frontalière avec l'Iran.
"Ce jour véritablement historique sera inscrit en lettres d'or dans la glorieuse chronique de la patrie indépendante et neutre", assure l'agence de presse turkmène.
Et comme un bonheur n'arrive jamais seul au Turkménistan, le pays fêtait également la publication d'un énième livre de Gourbangouly Berdymoukhamedov, la suite de son ouvrage "le sens de la vie". Déjà un "trésor national", d'après le régime.