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JDD: pas d'issue en vue pour le conflit, après la rupture des négociations

La crise s'enlise au JDD: le propriétaire Lagardère a rompu les discussions avec la rédaction, massivement opposée à l'arrivée de Geoffroy Lejeune, et refusé des garanties empêchant la publication de propos discriminatoires, au grand dam des journalistes en grève depuis un mois.

Preuve que leur détermination ne faiblit pas, le mouvement a de nouveau été reconduit mercredi pour 24h par la quasi-totalité des votants (93 pour, un contre, sept ne se prononcent pas), selon la Société des journalistes (SDJ) du titre en passe d'entrer dans le giron de Vivendi, le groupe de Vincent Bolloré.

Mais la perspective d'une vague de départs massifs, similaire à celles qui ont suivi les grèves d'Europe 1 (Lagardère) en 2021 et d'i-Télé (devenue CNews, propriété de Vivendi) en 2016, semble l'issue la plus probable.

"Assez vite, la seule réponse de la direction a été de nous dire: +Si vous n'êtes pas contents, partez+", a expliqué à l'AFP une journaliste du Journal du dimanche.

A défaut d'obtenir l'abandon de la nomination à sa tête de l'ancien directeur de l'hebdomadaire d'extrême droite Valeurs actuelles, "non négociable" pour la direction, la rédaction a tenté d'obtenir de bonnes conditions de départ pour les journalistes refusant de travailler sous sa direction, en particulier les plus précaires. Et réclamé des garanties d'indépendance juridique et éditoriale pour ceux qui décideraient de rester.

Mais les avancées glanées ces dernières semaines sur ces deux sujets se sont évaporées lundi quand Lagardère a sonné la fin des négociations, l'imputant à la SDJ dans sa première communication sur la crise depuis la nomination de Geoffroy Lejeune.

- "Fantasme" -

Lui renvoyant la balle, la rédaction a déploré à son tour la décision de la direction "de rompre unilatéralement les discussions, qui achoppaient sur les enjeux cruciaux de déontologie".

Elle lui reproche notamment d'avoir "refusé de s'engager" sur une charte pour empêcher "toute publication de propos racistes, sexistes et homophobes et, plus généralement, de tout contenu discriminatif ou haineux", alors même qu'Arnaud Lagardère, PDG du groupe éponyme, a fustigé lundi le "fantasme de l'extrême droite", selon lui "infondé et méprisant".

De quoi renforcer les craintes de la rédaction, puisque Valeurs Actuelles a été condamné, sous la direction de Geoffroy Lejeune, à une amende de 1.000 euros avec sursis pour injure publique à caractère raciste envers la députée LFI Danièle Obono.

Solidaire, la SDJ de Paris Match, autre titre de Lagardère concerné par la charte, a aussi dénoncé les garanties "largement insuffisantes" présentées par la direction "pour protéger les rédactions de l'influence des dirigeants et des actionnaires", dans un communiqué distinct.

- "Soudée" -

Sollicitée par l'AFP, la direction de Lagardère n'avait pas répondu mercredi après-midi.

Arnaud Lagardère a seulement rappelé mardi, lors de la publication des résultats du groupe, la possibilité pour les journalistes en désaccord avec l'arrivée de Geoffroy Lejeune de partir avec des indemnités via un dispositif prévu par la loi en cas de changement de propriétaire d'un média.

Problème: ce dernier ne sera mis en place qu'à l'automne, lors de la finalisation de la prise de contrôle de Lagardère par le géant français des médias Vivendi.

Les discussions interrompues lundi devaient justement permettre aux journalistes opposés à Geoffroy Lejeune de partir avant cette échéance.

Or, plutôt que de repousser l'arrivée du journaliste de 34 ans, comme cela avait été envisagé, la "direction a voulu accélérer (le calendrier) ces derniers jours en posant des ultimatums", avant de finalement officialiser sa prise de fonction au 1er août, explique la journaliste du JDD.

Fait inédit en 75 ans d'existence, le JDD n'est pas paru depuis cinq week-ends.

Si, selon Lagardère, Geoffroy Lejeune "prépare avec la direction les éditions" à venir, le retour du journal dans les kiosques semble peu probable sans le concours des grévistes. "La loi interdit de recruter des pigistes ou des CDD" pour contourner la grève, prévient la journaliste de l'hebdomadaire, rappelant que la rédaction est "très soudée".

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