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Le géant bancaire espagnol Santander a dégagé l'an dernier le bénéfice le plus élevé de son histoire, grâce à la hausse des taux d'intérêt qui a conduit le gouvernement de gauche à instaurer un impôt exceptionnel sur le secteur financier.
Sur l'ensemble de son exercice 2022, la première banque espagnole, fortement implantée en Europe et en Amérique latine, a engrangé 9,6 milliards d'euros de bénéfice net, soit une hausse de 18% par rapport à 2021.
Ce résultat, atteint à la faveur d'un dernier trimestre solide (2,29 milliards de profits nets), est supérieur aux prévisions des analystes interrogés par Factset, qui tablaient en moyenne sur 9,1 milliards.
"2022 a de nouveau été une très bonne année pour Santander", s'est félicitée jeudi la présidente du groupe, Ana Botin, en vantant lors d'une conférence de presse un "bilan très solide", dans un contexte d'"incertitude" provoqué par la guerre en Ukraine.
Le bénéfice engrangé l'an dernier est de fait le plus important de l'histoire de la banque: le précédent record (9,06 milliards d'euros) datait "de 2007", soit avant la crise financière de 2008, a précisé un porte-parole de Santander à l'AFP.
- 160 millions de clients -
Ces résultats - publiés au lendemain de l'annonce par BBVA, deuxième banque du pays, d'un bénéfice record de 6,42 milliards - ont été accueillis favorablement à la Bourse de Madrid, où Santander gagnait 6,4% à 14H00 (13H00 GMT) dans un marché en hausse (+1,6%).
Le groupe espagnol les explique par le dynamisme de ses principaux marchés, notamment dans la zone euro et au Royaume-Uni, où les remontées des taux d'intérêt décidée par les banques centrales pour freiner l'inflation ont dopé ses revenus.
Son produit net bancaire, équivalent de son chiffre d'affaires, a ainsi progressé de 16% l'an dernier, pour atteindre 38,6 milliards d'euros - un chiffre conforme aux attentes.
Cette forte dynamique commerciale a également été soutenue par l'arrivée de sept millions de nouveaux clients, portant à 160 millions le nombre total de clients de Santander dans le monde, dont 51 millions ont souscrit à ses services en ligne.
La banque laisse entrevoir un exercice à nouveau solide en 2023, "avec un objectif de croissance des revenus à deux chiffres", malgré la dégradation de la conjoncture mondiale et l'"augmentation des coûts liée à l'inflation", souligne Santander.
- Impôt exceptionnel -
En raison des bons résultats engrangés l'an dernier, le groupe précise qu'il portera la rétribution de ses actionnaires à 40% de son résultat net, distribuée "à parts égales" entre dividendes et rachats d'actions.
Cette annonce survient en plein débat sur l'envolée des bénéfices des banques, que le gouvernement de gauche espagnol a prévu de soumettre à un impôt exceptionnel en 2023 et 2024 afin de financer ses mesures de soutien au pouvoir d'achat.
Les banques "augmentent leurs profits" alors que les particuliers se trouvent "coincés" par la hausse des taux, mais "ne vous avisez pas de dire que Santander et Ana Botin, c'est du capitalisme impitoyable", a ironisé jeudi Pablo Echenique, l'un des dirigeants du parti de gauche radicale Podemos, partenaire des socialistes au sein du gouvernement espagnol.
Cet impôt, contre lequel les banques n'ont cessé de ferrailler ces derniers mois, sera payé par une dizaines d'entre elles et permettra à l'État de récupérer 1,5 milliard d'euros en 2023 comme en 2024.
Interrogée en conférence de presse, Ana Botin a évalué entre 220 et 230 millions d'euros l'impact de cette mesure pour Santander en 2023, en précisant que le groupe était encore en train d'"évaluer" un éventuel recours judiciaire contre ce prélèvement.
"Nous sommes d'accord avec le fait que les gouvernements collectent" des impôts, mais il faut "que tout le monde paie", car "les banques paient déjà cinq points" d'impôts de plus "que les autres entreprises", a-t-elle souligné, en ajoutant que Santander consacrait "un tiers" de ses bénéfices aux impôts.
Les résultats de 2022 pourraient également relancer le débat sur la répartition des bénéfices au sein du groupe bancaire, l'un des principaux syndicats espagnols, l'UGT, réclamant depuis plusieurs semaines des hausses de salaires pour les employés.