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Sûreté nucléaire: le Sénat valide la fusion contestée de l'ASN et de l'IRSN

La réforme de la sûreté nucléaire française a été approuvée mardi par le Sénat, favorable à la fusion entre l'ASN, gendarme du nucléaire, et l'IRSN, expert du secteur, malgré les oppositions vives de la gauche, des associations et des représentants de salariés.

La chambre haute, dominée par la droite et les centristes, a adopté à 228 voix contre 98 ce texte contesté, désormais transmis à l'Assemblée nationale, là même où le gouvernement avait tenté de l'introduire par simple voie d'amendement en mars 2023.

Les députés, très critiques à l'époque sur le procédé utilisé par l'exécutif, se pencheront sur le dossier à partir du 11 mars en séance publique.

Deux visions se sont opposées au Parlement sur ce dossier sensible: d'un côté les partisans d'une réforme nécessaire pour "regrouper les savoir-faire" et "s'adapter aux enjeux de notre décennie", de l'autre les inquiets face au "manque de transparence" et aux risques potentiels pour les salariés.

Dans le contexte national d'un vaste plan de relance de l'atome, le texte gouvernemental entend mettre fin au système dual actuellement en place, en regroupant l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), une sorte de police scientifique du secteur, et l'Autorité de sûreté du nucléaire (ASN), le gendarme des centrales.

Ces deux entités fusionnées formeront l'"Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection" (ASNR), et ce, dès le 1er janvier 2025. Un calendrier jugé "ambitieux mais réaliste et nécessaire" par le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu.

Porté initialement par l'ex-ministre déléguée à l'Energie Agnès Pannier-Runache, récupéré à la hâte par M. Béchu et désormais dans l'escarcelle du ministre délégué à l'Energie Roland Lescure, tout juste nommé, le projet entend fluidifier le secteur et réduire les délais dans les processus d'expertise, d'autorisation et de contrôle.

- Transparence -

Cette réforme "adapte la sûreté nucléaire aux enjeux de notre décennie", a appuyé le rapporteur centriste Pascal Martin lors des débats, estimant nécessaire de "regrouper les savoir-faire (...) pour adapter les parcs au dérèglement climatique".

Malgré les "défis" qu'il pose, ce texte est "de nature à renforcer la confiance du public car la nouvelle autorité sera indépendante", a renchéri le sénateur LR Patrick Chaize".

La droite sénatoriale et ses alliés centristes assurent en effet avoir "rééquilibré" le texte en renforçant la transparence à l'égard du grand public et la distinction dans la gouvernance entre expertise et prise de décision, deux enjeux majeurs de la réforme.

Ainsi, le Sénat a prévu d'imposer la publication des résultats d'expertise ou encore de créer une "commission d'éthique et de déontologie" chargée de "prévenir" d'éventuels conflits d'intérêt.

Plus symboliquement, les sénateurs ont aussi décidé de rebaptiser la future entité en Autorité "indépendante" de sûreté nucléaire et de radioprotection (AISNR), un choix que l'Assemblée nationale devra encore approuver à son tour.

Ces ajustements n'ont pas suffi, loin de là, pour convaincre les groupes de gauche, vent debout contre la réforme qu'ils contestent sur le fond comme sur la forme, alors que celle-ci est née dans le huis clos d'un conseil de politique nucléaire à l'Elysée en février 2023.

Le socialiste Sébastien Fagnen a dénoncé une réforme allant "à rebours de l'histoire du nucléaire français et marquée du sceau de la précipitation", disant craindre une "désorganisation" de la sûreté nucléaire.

Beaucoup, des communistes aux écologistes, ont également soulevé des reculs sociaux pour les salariés de l'IRSN, eux aussi mobilisés contre la réforme. Jeudi, plusieurs centaines d'entre eux, aux côtés de salariés de l'ASN et d'associations de défense de l'environnement comme Greenpeace, avaient manifesté à Paris.

Dans une lettre ouverte publiée lundi soir, l'intersyndicale de l'IRSN avait encore dénoncé un projet de loi qui "déstabilisera durablement le système de gouvernance des risques nucléaires".

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