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Trois semaines après la catastrophe ferroviaire en Grèce, le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a annoncé mardi que les élections se tiendraient en mai alors que son gouvernement est fragilisé par un accident qui a révélé une colère plus ancienne des Grecs à l'égard de leurs dirigeants.
"Je peux vous dire avec certitude que les élections auront lieu en mai", a affirmé le chef du parti conservateur Nouvelle-Démocratie (ND) dans sa première interview télévisée depuis la collision frontale entre deux trains qui a fait 57 morts le 28 février au soir.
Il n'a pas précisé la date exacte de ce scrutin législatif qui devait se tenir d'ici à juillet, à l'expiration du mandat actuel de son gouvernement.
Mais il a ouvert la voie à un autre scrutin dans la foulée si le premier ne permet pas de dégager de majorité absolue ou si les partis ayant réalisé les meilleurs scores ne parviennent pas à former une coalition.
"Un deuxième scrutin pourrait être nécessaire. C'est très probable", a-t-il souligné sur la chaîne privée Alpha, trois semaines jour pour jour après cet accident ferroviaire, le pire qu'ait connu la Grèce.
Le conservateur, au pouvoir depuis 2019, est sous pression depuis cette catastrophe qui a bouleversé le pays et fait descendre dans les rues des dizaines de milliers de Grecs en colère.
- Gestion calamiteuse -
Car si l'accident a été imputé à une erreur du chef de gare, il a aussi révélé de graves dysfonctionnements dans les chemins de fer grecs, la vétusté du réseau et les retards flagrants pris dans sa modernisation, notamment en ce qui concerne la sécurité et la signalisation.
Le Premier ministre a en outre été vivement critiqué pour sa gestion jugée calamiteuse de cet accident notamment lorsqu'il a assuré d'emblée qu'il était dû à "une tragique erreur humaine".
Depuis il s'est employé à rectifier le tir en demandant pardon à plusieurs reprises aux familles des victimes ou en promettant la transparence absolue dans l'enquête judiciaire en cours pour établir les responsabilités.
Mais dans les cortèges qui scandent "assassins" et réclament des comptes aux autorités accusées de négligences voire d'incurie, les appels à la démission de Kyriakos Mitsotakis se multiplient.
Le 8 mars, au "pic" de la mobilisation, ils étaient au moins 65.000 dans les rues à crier leur ras-le-bol, dont 40.000 dans la capitale.
Après des arrêts de travail dans plusieurs secteurs, la Grèce a connu une grève quasi générale le 16 mars avec une paralysie presque complète des transports.
- Déliquescence -
Les cortèges, de par leur ampleur, ne sont pas sans rappeler les grandes manifestations au début des années 2010 quand la Grèce secouée par la crise financière s'était vu imposer des mesures drastiques d'économie par ses créanciers, l'Unio européenne et le Fonds monétaire international.
"Les manifestations après la tragédie à Tempé sont comparables à celles de 2011", juge ainsi l’institut Public Issue dans une récente analyse.
Nombreux sont les Grecs qui s'alarment de la déliquescence des services publics dans un pays qui pour éponger ses dettes a dû privatiser des pans entiers de son secteur public, dont le transport ferroviaire de voyageurs et de marchandises vendu en 2017 à la société publique italienne Ferrovie Dello Stato Italiane (FS).
Les derniers sondages réalisés après l'accident montrent que l'écart se ressert dans les intentions de vote entre la Nouvelle-Démocratie et la gauche radicale Syriza emmenée par Alexis Tsipras, prédécesseur de Kyriakos Mitsotakis.
Avec entre 28,5% et 30,2% des intentions de vote, la ND ne devance plus son principal rival que de 3,5 à 4,1 points, selon les instituts.
Les jeunes, notamment les étudiants, se retrouvent en tête des mécontents alors que médias et analystes estiment qu'ils ont souvent été sacrifiés ces dix dernières années.
Le quotidien Kathimerini évoquait récemment "la génération banqueroute et pandémie" à propos des moins de 25 ans également frappés par le chômage.
Au cours de son mandat, Kyriakos Mitsotakis a été aussi épinglé pour les atteintes aux libertés notamment de la presse.
Il est aussi au coeur d'un scandale d'écoutes téléphoniques qui a touché des centaines de personnalités dont le dirigeant du parti socialiste Pasok-Kinal.
Athènes a toujours réfuté avoir eu recours au logiciel espion israélien Predator.