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Guerre en Ukraine: l'enquête sur la mort d'un journaliste franco-irlandais confiée à des juges d'instruction

Deux ans après la mort en Ukraine de Pierre Zakrzewski, journaliste franco-irlandais de Fox News tué le 14 mars 2022 alors qu'il couvrait l'offensive russe, les investigations ont été confiées à des juges d'instruction du tribunal de Paris.

Pierre Zakrzewski, caméraman de 55 ans, a été tué à Horenka, au nord-ouest de la capitale, avec une Ukrainienne qui l'accompagnait, Oleksandra Kuvshynova. Leur véhicule a été la cible de tirs, avait à l'époque indiqué Fox News Media.

Eu égard à la nationalité française du journaliste, le Parquet national antiterroriste (Pnat) avait ouvert dès mars 2022 une enquête pour crime de guerre, en l'occurrence "atteinte volontaire à la vie d'une personne protégée par le droit international" et "attaque délibérée contre une personne civile qui ne participe pas directement aux hostilités".

Une source judiciaire a indiqué mercredi à l'AFP qu'une information judiciaire pour crime de guerre contre X avait été ouverte le 5 avril et confiée à des juges d'instruction.

Les investigations, menées par l'Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité, les génocides et les crimes de guerre (OCLCH), visent à identifier les auteurs des tirs et déterminer les circonstances de cette attaque.

Selon les premiers éléments recueillis dans les mois suivant les faits, le journaliste aurait été directement visé par les tirs, avait indiqué une source proche du dossier.

"Pierre (Zakrzewski) utilisait sa caméra pour raconter les histoires des gens qu'il rencontrait avec clarté et vérité, même si c'était difficile ou dangereux", témoigne dans un communiqué transmis à l'AFP Michelle Ross-Stanton, sa femme. Sa mère, Marie-Ange Zakrzewska, souligne "sa liberté d'esprit, sa grande empathie et son énergie sans limite".

Les avocates de la famille de Pierre Zakrzewski, Clémence Witt et Anaïs Sarron, ont salué "la coopération judiciaire (qui) a extrêmement bien fonctionné dans le cadre de l'enquête préliminaire". "Cette seconde phase (...) permettra à ses proches (...) de participer plus activement aux investigations en cours".

"Lorsqu'une coopération internationale judiciaire sur le terrain est effective, la capacité de la justice française à avancer rapidement compte tenu du contexte de guerre permet de lutter efficacement contre l'impunité", a réagi Me Emmanuel Daoud, avocat de Reporters sans frontières (RSF).

Selon RSF, onze journalistes sont morts alors qu'ils couvraient la guerre en Ukraine.

- "Etablir des responsabilités" -

Depuis le déclenchement de l'offensive russe le 24 février 2022, le Pnat a ouvert au total dix enquêtes sur des crimes de guerre qui auraient été commis à l'encontre de Français.

Trois de ces enquêtes concernent des journalistes tués dans l'exercice de leur profession. Celle sur la mort de Pierre Zakrzewski est la première à être confiée à des juges d'instruction.

Deux autres reporters français ont perdu la vie alors qu'ils couvraient la guerre en Ukraine.

Un journaliste de BFMTV, Frédéric Leclerc-Imhoff, alors âgé de 32 ans, a été tué par un éclat d'obus le 30 mai 2022 alors qu'il suivait une mission humanitaire près de Severodonetsk, dans l'est du pays.

Un an après, le 9 mai 2023, le coordinateur vidéo de l'AFP en Ukraine, Arman Soldin, 32 ans, a été tué lors d'une attaque de roquettes russes près de la ville assiégée de Bakhmout.

Arman Soldin accompagnait, avec cinq reporters de l'AFP, des soldats ukrainiens sur le front alors le plus actif de la guerre.

Les autres enquêtes du Pnat concernent des faits commis au préjudice de ressortissants français en Ukraine, essentiellement dans les semaines ayant suivi le déclenchement de la guerre, notamment à Marioupol (sud), la région de Kiev et Tcherniguiv (nord).

L'une porte sur la mort de deux humanitaires français le 2 février 2024 lors d'un frappe sur Beryslav, commune sur la rive du fleuve Dniepr (sud), près de la ligne de front.

Le Parquet antiterroriste français dispose d'une compétence universelle en matière de crime de guerre et peut lancer des investigations sur des faits commis hors du territoire français si une victime est française.

"On ouvre des enquêtes pour établir in fine des responsabilités et qu'il y ait des procès, devant une juridiction française ou une autre", avait assuré à l'AFP le procureur antiterroriste, Jean-François Ricard, en septembre 2022 après un déplacement dans la région de Kiev.

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