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La Russie a revendiqué mardi la reprise du village de Krynky, sur la rive occupée du Dniepr, dans le sud de l'Ukraine, où l'armée de Kiev avait difficilement bâti une tête de pont en octobre dernier, l'une de ses seules avancées après l'échec de sa contre-offensive estivale.
Ce nouveau succès de Moscou a été annoncé par le ministre de la Défense à Vladimir Poutine, peu de temps après la prise par l'armée russe de la ville d'Avdiïvka, dans l'est, et à quelques jours du début de l'entrée de la guerre dans sa troisième année.
"Krynky a été nettoyée, nous contrôlons de facto toute la rive", a assuré Sergueï Choïgou en réponse à une question du président russe au cours d'une réunion entre les deux hommes.
Les forces ukrainiennes - notamment deux brigades d'infanterie de marine - s'efforçaient depuis des mois de grignoter du terrain sur la rive gauche du Dniepr dans la région de Kherson.
Elles étaient parvenues à établir des positions dans le village de Krynky, dans des conditions particulièrement difficiles, en particulier en raison de la présence de marécages et de la traversée du fleuve sous les tirs. Les Russes ont massivement bombardé la zone et Krynky a été totalement détruit.
Vladimir Poutine a par ailleurs qualifié de "fuite chaotique" le retrait d'Avdiïvka de l'armée ukrainienne, le week-end dernier.
- "Grand succès" -
L'ordre de retrait des forces de Kiev a été donné "pour des raisons politiques, afin de dissimuler ce mouvement et lui donner l'apparence d'un retrait organisé", a commenté le chef de l'Etat russe.
La conquête d'Avdiïvka, après quatre mois d'assauts meurtriers pour les soldats russes, est "un grand succès", a estimé M. Choïgou.
Les troupes qui ont combattu sur place "se reposent et se préparent à de nouveaux combats", a-t-il ajouté, la Russie poursuivant son offensive sur plusieurs secteurs du front.
L'Ukraine a ainsi fait état mardi de dizaines d'attaques russes dans l'est et le sud.
Ces offensives russes surviennent sur fond de célébration par l'Ukraine du 10e anniversaire de la mort de dizaines de manifestants à Kiev, au moment de la "révolution du Maïdan", qui a conduit à la chute des dirigeants ukrainiens soutenus par Moscou.
C'est aussi à cette époque qu'ont commencé le processus d'annexion de la Crimée par la Russie dans le sud de l'Ukraine et le mouvement séparatiste prorusse dans l'est de ce pays.
"Cela fait 10 ans depuis (le début) des tentatives visant à nous détruire et à détruire notre indépendance", a déclaré mardi le président ukrainien Volodymyr Zelensky sur Facebook.
"Mais nous avons tenu bon il y a dix ans et nous continuons de le faire aujourd'hui", a-t-il ajouté.
- 84 attaques -
L'état-major de l'armée ukrainienne a relevé mardi pas moins de 84 attaques russes ces dernières 24 heures, toutes "repoussées", a-t-il assuré.
Si les opérations russes se sont nettement réduites autour d'Avdiïvka même, de nombreux assauts ont en revanche eu lieu près de Mariïnka (est), près de Bakhmout (est) et dans la région de Zaporijjia (sud).
"La situation est extrêmement difficile en plusieurs points de la ligne de front", a admis lundi soir M. Zelensky.
Les troupes russes "mettent à profit le retard dans l'aide à l'Ukraine", a-t-il jugé, ce pays étant privé d'une aide militaire américaine cruciale de 60 milliards de dollars, actuellement bloquée au Congrès.
Kiev manque de munitions d'artillerie, de défense antiaérienne ou encore d'armes de longue portée. L'armée peine aussi à regarnir ses rangs.
Le chef de l'Etat ukrainien a dans ce contexte remercié mardi la Suède qui a annoncé une nouvelle aide militaire, sous forme d'équipements d'un montant d'environ 633 millions d'euros.
En déplacement au Japon, le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal a dit être confiant dans le fait que le Congrès américain débloquera l'aide tant attendue.
"Je crois que les Etats-Unis soutiendront également l'Ukraine, comme l'Union européenne, comme le Japon, comme tous les pays du G7, le FMI et toutes les organisations financières internationales", a-t-il déclaré, démentant toute "fatigue".
- Besoin de tout -
Sur le terrain, Sviataslav Iaremenko, qui avait combattu contre les séparatistes dès 2014 puis a rejoint de nouveau l'armée après l'invasion de 2022, confie au contraire à l'AFP qu'"après deux ans de guerre, la fatigue s'est accumulée".
"Je pense qu'on continuera de combattre encore pendant plusieurs années", a-t-il poursuivi, "ça dépendra de l'ampleur de l'aide que nos partenaires occidentaux vont nous fournir", espère le militaire, rencontré à Kostiantynivka, une ville de l'est non loin du front.
Les Russes bombardent en outre toujours quasi-quotidiennement des localités au-delà du front.
Une mère, ses deux enfants et leur grand-mère ainsi qu'une autre femme ont été tués dans l'explosion sur leur maison d'un drone d'attaque russe Lancet, dans la région de Soumy (nord-est), selon l'armée ukrainienne.
Enfin, la défense antiaérienne a détruit 23 drones explosifs Shahed de conception iranienne, lancés dans la nuit de lundi à mardi par la Russie sur différentes régions d'Ukraine.