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Tribunal spécial sur l'Ukraine, confiscation d'avoirs russes: l'UE procède "par étapes"

Tribunal spécial sur l'Ukraine, confiscation d'avoirs russes gelés: l'Union européenne a défendu vendredi une démarche "par étapes" sur ces deux demandes de Kiev qui soulèvent des questions juridiques complexes.

"Nous voulons nous assurer que seront traduits en justice tous les auteurs de tous les types de crimes (commis en Ukraine), et que la Russie paiera pour la reconstruction et le dédommagement" des victimes, a déclaré le commissaire européen à la Justice Didier Reynders, lors d'une conférence de presse avec le procureur général d'Ukraine, Andriï Kostine.

Il a annoncé qu'un "centre international de coordination pour la poursuite du crime d'agression", basé à La Haye, serait "opérationnel" en juillet.

Il s'agit d'une sorte de parquet, destiné à "rassembler et conserver les preuves du crime d'agression et permettre des discussions entre procureurs (...) non seulement sur les enquêtes, mais sur les poursuites possibles".

Il est envisagé comme une première étape avant l'établissement d'un tribunal spécial pour juger les plus hauts responsables russes, une demande de Kiev.

La Cour pénale internationale (CPI) n'est compétente que pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité perpétrés en Ukraine, et non pour le "crime d'agression" commis par la Russie, imputable à ses plus hauts dirigeants.

L'UE soutient la création d'une juridiction compétente pour ce type de crime, mais les Etats membres divergent sur la forme exacte qu'elle peut prendre --un tribunal international spécial basé sur un traité multilatéral, ou une juridiction hybride, relevant du droit ukrainien mais comportant des juges internationaux--.

- 21,5 mds d'euros d'avoirs gelés -

Le "parquet" intérimaire sera installé au siège d'Eurojust, l'agence de l'UE pour la coopération judiciaire en matière pénale. Il sera intégré à une "équipe commune d'enquête", déjà constituée de six pays de l'UE (Lituanie, Pologne, Estonie, Lettonie, Slovaquie, Roumanie) et de l'Ukraine, à laquelle participe aussi la CPI.

Le procureur ukrainien et le commissaire européen ont ensuite participé à la réunion de la "task force" de l'UE sur "le gel et la confiscation" des avoirs russes.

Didier Reynders a indiqué que 21,5 milliards d'euros d'avoirs d'oligarques et d'entités frappés par des sanctions européennes avaient été immobilisés dans l'UE. Sans compter les transactions bloquées en Belgique et au Luxembourg par le biais des chambres de compensation Euroclear et Clearstream.

Les Occidentaux ont en outre gelé pour plus de 300 milliards d'euros d'actifs de la Banque centrale russe.

"Pour les Ukrainiens il est extrêmement important de recevoir des compensations par le biais d'avoirs confisqués non seulement à des personnes privées qui ont aidé l'agresseur, mais aussi à l'Etat russe", a déclaré M. Kostine.

Mais cette option de confisquer ces avoirs russes pour reconstruire l'Ukraine et dédommager les victimes de crimes de guerre, défendue par Kiev, est un autre casse-tête juridique pour les Occidentaux.

L'Union européenne a mis en place mercredi un groupe de travail chargé de localiser précisément les avoirs gelés, et d'étudier les possibilités de les utiliser à ces fins.

La Commission européenne a proposé la création d'une structure qui serait chargée de gérer et d'investir les actifs publics russes, de verser les revenus ainsi générés à l'Ukraine, le capital ayant vocation à être restitué à la Russie une fois les sanctions levées.

L'UE est par ailleurs en train de mettre en place un cadre juridique pour confisquer les avoirs des personnes sanctionnées qui tentent de contourner ces sanctions.

"C'est un processus qui se construit étape par étape, comme pour la poursuite du crime d'agression, nous travaillons sur (la question de) la reconstruction et du dédommagement", a commenté Didier Reynders.

La Suisse a quant à elle estimé jeudi que la confiscation d'avoirs privés russes gelés serait contraire au droit fondamental helvétique.

Le procureur général ukrainien a dit espérer que cela "puisse changer" et que la Suisse "entende la position de l'Ukraine".

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