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Emmanuel Macron a tenté lundi à la COP27 en Egypte d'endosser le costume de l'élève "exemplaire" de la lutte contre le changement climatique, avant d'enchaîner les rendez-vous pour afficher son bilan environnemental, face à des militants déjà déçus par ce début de quinquennat.
Arrivé au sommet de l'ONU sur le climat à Charm el-Cheikh, le président français a assuré que l'Europe et la France étaient sur la bonne "trajectoire" pour tenir leurs "objectifs" de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Et il a pointé du doigt ailleurs.
"Il faut qu'on ait les Etats-Unis et la Chine qui soient vraiment au rendez-vous" de cette "bataille", a-t-il estimé. "Les Européens payent" mais "on est les seuls à payer", et il faut donc "mettre la pression sur les pays riches non européens, leur dire +vous devez payer votre part+", a-t-il insisté.
"L'urgence climatique est bien là", a-t-il ensuite martelé à la tribune de la COP27, défendant son tryptique "sobriété énergétique", "énergies renouvelables" et relance du nucléaire, et plaidant pour que les pays émergents sortent "au plus vite" du charbon.
Le chef de l'Etat a aussi défendu la solidarité financière avec les pays les plus pauvres exposés aux effets dévastateurs du réchauffement, mais en demandant à "un groupe de sages de haut niveau" des propositions d'ici le printemps pour réformer le système financier international.
"Nous n'avons plus le luxe de perdre du temps", a protesté après son discours Clément Sénéchal, de Greenpeace France, estimant qu'Emmanuel Macron "paralyse" ainsi la COP27 en privilégiant cet "énième dialogue parallèle" plutôt qu'un accord immédiat à Charm el-Cheikh.
Surtout, "aucune mesure précise n'a été prononcée dans ce discours en Égypte concernant les émissions de CO2 françaises ou européennes, pourtant beaucoup trop élevées", a déploré le militant.
Seul a trouvé grâce aux yeux de l'association écologiste l'engagement d'Emmanuel Macron à plaider pour une interdiction de l'exploitation des grands fonds marins.
Le discours international sera suivi, mardi à Paris, par des travaux pratiques à l'échelle nationale: une réunion à l'Elysée avec les industriels français les plus émetteurs de gaz à effet de serre pour les inciter à hâter leur "décarbonation". En parallèle, Emmanuel Macron s'est engagé, dans une vidéo sur Twitter, à répondre cette semaine aux questions des Français sur "le défi écologique".
- "Deux fois plus vite" -
Après un premier mandat contrasté en matière environnementale, il avait promis de passer à la vitesse supérieure. Le second quinquennat "sera écologique ou ne sera pas", avait-il lancé en avril, fixant l'objectif d'aller "deux fois plus vite" pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
A l'Élysée, on met en avant de premiers résultats pour montrer que les actes sont au rendez-vous des promesses, comme le plan pour la sobriété qui permet déjà d'"économiser 10% de notre énergie", le vote au Sénat du projet de loi sur les éoliennes et le photovoltaïque, ou la présentation d'un texte pour accélérer le nucléaire.
Pas à la hauteur, répondent en choeur les opposants de gauche et les défenseurs de l'environnement.
Lors d'un échange avec des jeunes africains et français engagés pour le climat à Charm el-Cheikh, le président français a été interpellé sur l'absence de vraie taxation des "profits record" des groupes énergétiques.
"Ces profits sont criminels, ce sont des crimes contre l'humanité", lui a lancé Nathan Méténier, l'un des jeunes conseillers du secrétaire général de l'ONU sur le changement climatique.
"Je partage totalement la description que vous avez faite", a répondu Emmanuel Macron. Pour aussitôt botter en touche en expliquant qu'une taxation n'aurait de sens qu'à l'échelle mondiale, ce pourquoi il a assuré se "battre".
La semaine dernière, une décision a illustré, aux yeux de la gauche, l'absence de réelle volonté de l'exécutif, quand il a passé à la trappe des amendements pourtant adoptés par l'Assemblée nationale pour augmenter de 12 milliards d'euros les aides à la rénovation thermique des logements.
Anne Bringault, du Réseau Action Climat, note aussi que les émissions de gaz à effet de serre de la France, pourtant condamnée pour "inaction climatique", sont toujours "loin" de la bonne trajectoire.
Et ce alors même que "plusieurs mesures néfastes pour le climat ont été prises depuis le début de ce quinquennat", ajoute-t-elle, évoquant la réouverture de la centrale à charbon de Saint-Avold, un projet de nouveau terminal méthanier au Havre, des soutiens à l'achat de carburant pour tous "qui ont bénéficié davantage aux ménages les plus aisés".