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Davantage d'autonomie pour les établissements, autorité "hiérarchique" des directeurs sur les enseignants : le Sénat a adopté dans la nuit de mardi à mercredi, en première lecture, une proposition de loi LR sur l'école, rouvrant des débats clivants.
Dans l'hémicycle, les sénateurs se sont néanmoins opposés au port obligatoire de l'uniforme du primaire au lycée. C'était un point de désaccord entre Républicains et centristes, ces derniers y étant majoritairement hostiles.
L'école fait partie, avec la santé et l'écologie, des chantiers sur lesquels le président Emmanuel Macron a affirmé sa détermination à "avancer" malgré la crise des retraites.
La proposition de loi "pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité", votée par 220 voix contre 118, "porte des marqueurs de droite, assumés comme tels", avait prévenu son auteur Max Brisson, ancien inspecteur général de l'Education nationale.
La gauche a voté contre, de même que le groupe RDPI à majorité Renaissance.
La ministre de l'Education nationale Pap Ndiaye a pris ses distances avec le texte. "Nous partageons de nombreux constats, mais nos solutions pourront ne pas être les mêmes", a-t-il dit.
La communiste Céline Brulin a fustigé "une vision clairement de droite et même réactionnaire", tandis que l'écologiste Thomas Dossus s'est inquiété "d'un éventuel deal" entre la droite et le clan présidentiel.
Pour la socialiste Marie-Pierre Monier, "ce dont notre école a besoin c'est de moyens (...) et non pas de telles mesures qui ont vocation à la faire basculer dans une logique libérale et concurrentielle bien loin des principes républicains".
Le syndicat enseignant SE-Unsa s'est déclaré dans un communiqué "fermement opposé à cette proposition de loi synonyme de démantèlement du service public d'Éducation".
- "Asphyxie bureaucratique" -
Première disposition choc: pour tenter de remédier à "un système éducatif qui fonctionne mal" et donner un coup d'arrêt à "l'asphyxie bureaucratique", le texte entend permettre à des établissements scolaires volontaires de disposer de plus d'autonomie, à titre expérimental et sous forme contractuelle.
Cette extension de l'autonomie porterait sur cinq domaines : recrutement des élèves, affectation des personnels, moyens budgétaires, organisation pédagogique et dispositifs d'accompagnement des élèves.
Cette proposition n'est pas sans rappeler l'expérimentation pédagogique, contestée par les syndicats enseignants, testée à Marseille sous l'impulsion d'Emmanuel Macron.
Depuis la loi du 21 décembre 2021 créant la fonction de directeur d'école, ces derniers disposent d'une autorité "fonctionnelle". Max Brisson propose d'aller plus loin en leur conférant une "autorité hiérarchique" sur les enseignants de leur école, aujourd'hui exercée par l'inspecteur de l'éducation nationale.
La portée de cette mesure a été limitée aux écoles dont le nombre de classes dépasse un certain seuil. Mais le gouvernement y reste opposé.
La proposition de loi permettrait également de déroger aux règles d'affectation des enseignants pour créer, par exemple, des contrats de mission.
Autre sujet sensible, M. Brisson propose une réforme de la formation des enseignants du premier degré, avec la création dans chaque académie d'une "école supérieure du professorat des écoles".
La proposition de loi prévoit encore la création d'un service public du soutien scolaire, et la mise en place de "territoires ruraux à besoins éducatifs particuliers" qui bénéficieraient de moyens et dispositifs spécifiques.
Un dernier axe "laïcité et vivre ensemble" a remis sur la table la question du voile, en proposant à nouveau d'interdire le port de signes religieux ostentatoires aux parents accompagnant les sorties scolaires.
Un article ajouté en commission vise à prolonger, au-delà de la rentrée scolaire 2023-2024, la dérogation qui autorise les jardins d'enfants à assurer l'instruction des enfants de trois à six ans.
Le Sénat a aussi voté des amendements LR en faveur de l'instruction en famille, soumise à un régime d'autorisation depuis la loi "confortant le respect des principes de la République".