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"Dialogue" avec les enseignants, valeurs de "respect et d'autorité" mais aussi système éducatif qui doit tâcher de "réduire les inégalités sociales": pour sa première prise de parole, la nouvelle ministre de l'Education Nicole Belloubet a cherché à apaiser, après quatre semaines de polémiques incessantes.
Nicole Belloubet a souhaité vendredi l'instauration "très rapide d'un dialogue" avec les enseignants, lors de la cérémonie de passation de pouvoir avec celle qu'elle remplace rue de Grenelle, Amélie Oudéa-Castéra, en poste pendant seulement 28 jours. "Je m'y attacherai dès la semaine prochaine. Vous pouvez compter sur mon engagement".
La nouvelle ministre, qui a été garde des Sceaux (2017-2020) dans le gouvernement d'Edouard Philippe, va "poursuivre la mise en oeuvre" des mesures récemment annoncées par le président de la République Emmanuel Macron et le Premier ministre Gabriel Attal, qui tous les deux veulent garder la main sur ce sujet.
Parmi ces mesures, l'application pour l'année scolaire prochaine des réformes du "choc des savoirs", avec la constitution des groupes de niveau en français et mathématiques. Ce projet crispe les enseignants du second degré, qui ont manifesté le 1er février et promettent de se mettre à nouveau en grève au retour des vacances d'hiver.
"Il va falloir que la nouvelle ministre tienne compte très rapidement de ce qui est en train de se passer sur le terrain et donc infléchir ce qui pose problème, notamment la mise en place de ce +choc des savoirs+", déclare à l'AFP Agnès Andersen, secrétaire générale du syndicat de chefs d'établissement ID-FO.
"Les chefs d'établissements ont été très présents dans les cortèges de manifestation du 1er février, un fait assez rare pour le souligner", ajoute-t-elle.
D'autres chantiers attendent la nouvelle ministre: attractivité du métier et formation des enseignants, conditions de travail et salaires, bilan du pacte (hausse de rémunération liée à de nouvelles missions) et le remplacement des professeurs.
Professeure de droit, issue des rangs du Parti socialiste, Nicole Belloubet, 68 ans, connaît l'éducation: elle a été rectrice d'académie pendant huit ans (1997-2005) à Limoges et Toulouse, avant de démissionner pour protester contre des suppressions de postes d'enseignants.
- Le "en même temps" -
"On entend sa volonté de dialogue. Mais on a beaucoup de choses à lui dire, il faut qu’elle mesure l’urgence et la profondeur de la crise", souligne Grégoire Ensel, président de la première fédération de parents d'élèves, la FCPE .
"On jugera sur pièce", indique de son côté Isabelle Vuillet, co-secrétaire générale de la CGT Educ'action.
Pour Jean-Rémi Girard, du syndicat Snalc, "il va falloir savoir quelle est sa boussole exactement: au-delà des problèmes structurels de l'Education nationale, le sujet c'est aussi l'organisation de la prochaine rentrée", compliquée par la mise en place des mesures du "choc des savoirs".
Évoquant les dossiers qui l'attendent, Nicole Belloubet a souhaité "tout faire pour mettre en place un système qui contribue à réduire les inégalités sociales, qui refuse tout tri social et qui n'exclut pas les élèves par l'échec".
Des paroles destinées à ceux qui craignent un tri entre élèves que pourraient entraîner les groupes de niveau en français et mathématiques au collège en classe de 6e et 5e.
La ministre a également évoqué "les valeurs de respect et d'autorité", reprenant cette fois des termes martelés par Gabriel Attal.
Elle semble ainsi vouloir rassurer à droite et à gauche. "Visiblement, elle maîtrise le +en même temps+", a ironisé Jean-Rémi Girard.
Amélie Oudéa-Castéra, elle, a assuré quitter le ministère de l'Education nationale "plus aguerrie que jamais" et la "tête haute" après un passage rue de Grenelle qui a ressemblé à un long chemin de croix.
"Je remercie le président de la République et le Premier ministre pour leur confiance renouvelée pour me permettre (...) de poursuivre ma mission au service du sport et des Jeux olympiques et paralympiques", a-t-elle ajouté.