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"Meilleur chef du monde" en titre et champion absolu du classement la Liste, le Français Guy Savoy, rétrogradé lundi par le guide Michelin, est l'ambassadeur de "l'art de vivre à la française", avec la gourmandise au centre de l'assiette.
La perte de la troisième étoile de son restaurant à la Monnaie de Paris, avec vue sur les quais de Seine, est d'autant plus surprenante que le chef de 69 ans, auréolé de trois macarons depuis 2002, semblait faire l'unanimité.
"Je suis sans concession" et "la gourmandise, c'est primaire pour moi. Je n'ai pas envie d'intellectualiser. Je me régale ou je ne me régale pas", avait déclaré Guy Savoy à l'AFP en novembre, alors qu'il était élu pour la sixième fois meilleur chef au monde par le classement La Liste.
Cet agrégateur établit les 1.000 meilleurs restaurants à partir des guides et critiques gastronomiques dans le monde entier.
"C'est une cuisine française d'excellence qui reste aussi moderne. Tout reste dans l'air du temps chez Guy Savoy, rien ne vieillit", avait commenté en novembre à l'AFP Hélène Pietrini, directrice de la Liste.
"Guy Savoy est apprécié par tous en France et est aussi connu à l'étranger", avait ajouté Jörg Zipprick, cofondateur et rédacteur en chef de La Liste.
Interrogé par l'AFP, le directeur du Michelin, Gwendal Poullennec, s'est refusé à révéler les raisons de la rétrogradation, que le guide ne communique qu'aux chefs.
- Soupe d'artichaut -
Fils d'un jardinier et d'une restauratrice, Guy Savoy a baigné dans l'univers de la gastronomie dès son enfance.
Il a commencé son apprentissage comme maître chocolatier, avant de le poursuivre en tant que cuisinier chez les Frères Troisgros, à Roanne. Il y a noué une grande amitié avec Bernard Loiseau, dont le suicide il y a 20 ans, continue de marquer les esprits.
Il décroche sa première étoile quand il n'a que 27 ans, en 1980. Quelques années plus tard, il ouvre son Restaurant Guy Savoy, à deux pays des Champs-Elysées, puis au sein de l'Hôtel de la Monnaie en 2015. Un restaurant jumeau existe depuis 2006 à Las Vegas dans le Caesars Palace.
Pendant la crise sanitaire, sa fameuse soupe d'artichaut à la truffe noire, servie avec une brioche feuilletée aux champignons, était dans une formule à emporter, à réchauffer au micro-ondes. Une expérience traumatisante pour un grand chef qui a dû faire du "traiteur" pour remonter le moral de ses équipes, après la décision de fermer les restaurants.
L'automne dernier, il a publié "Le geste et la manière, vive la cuisine française" sur cette période pour "évacuer les relents" des confinements.
- Défenseur du vin -
Le restaurant a su rebondir et était l'an dernier "plein midi et soir", avec le retour des Asiatiques ainsi que des Américains et Canadiens, se félicitait Guy Savoy à l'automne.
Grand défenseur du patrimoine français, Guy Savoy, qui avait prêté sa voix à un personnage du film "Ratatouille", refuse par exemple de suivre la mode des boissons sans alcool, venue des pays scandinaves et anglo-saxons et qui s'installe en France.
"On exporte pour 14 milliards d'euros de vins et spiritueux. (...) Les Airbus, c'est fabriqué partout. Les vins, ce sont des paysages, des emplois qui ne seront jamais délocalisés, des savoirs-faire uniques", insiste-t-il.
Contrairement à la plupart de ses confrères étoilés, il refuse le menu imposé, estimant que le client doit avoir le choix dans un établissement de ce niveau.
Et si le secteur a du mal à recruter depuis le Covid, avec des restaurants fermant le midi ou réduisant les jours d'ouverture, Guy Savoy n'est pas dans cette configuration.
Après la réouverture post-Covid, "tout le monde était là, du dernier stagiaire aux plus anciens. Il y a des gens qui ont 30 ans de maison", racontait-il. "Je les paie et je les aime. Je suis au milieu d'eux dès 8H30."