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Le Sénat a entamé mardi la discussion du projet de loi sur l’industrie verte, "un vrai tournant dans l'histoire économique" de la France pour le ministre Bruno Le Maire, mais "très en deçà des objectifs affichés" déplorent les sénateurs.
Un peu plus de 300 amendements seront étudiés sur ce texte, dont l'examen en première lecture pourra se poursuivre jusqu'à jeudi soir.
"L'industrie verte n'est pas une contradiction dans les termes, c'est une évidence, et c'est même une tautologie", a assuré le ministre de l'Economie. "Si nous voulons avoir une industrie, elle doit être verte, et pour que nous soyons verts, nous avons besoin de notre industrie".
Le projet de loi est un "maillon indispensable d'une stratégie de réindustrialisation globale", a abondé son homologue à l'Industrie Roland Lescure.
Bruno Le Maire s'est engagé à ce que la Banque des territoires investisse "un milliard d'euros pour aménager 50 sites de 2.000 hectares clé en main".
"Le gouvernement nous promet 40.000 créations d'emplois et 23 milliards d'euros d'investissements supplémentaires à l'horizon 2030. Qui pourrait s'opposer à un tel programme?", s'est interrogé le rapporteur Laurent Somon (LR).
Il déplore toutefois un texte "très en deçà des objectifs affichés", regrettant que les mesures fiscales et financières, dont les crédits d'impôts, soient renvoyées à la loi de finances.
"Une petite loi, très loin de la +révolution+ revendiquée par le gouvernement", a jugé Fabien Genet (LR).
"Texte technique, ce projet de loi industrie a tout du fourre-tout mais rien de la révolution attendue", a renchéri le centriste Jean-François Longeot.
Malgré cette déception, les groupes LR et centristes ont annoncé qu'ils voteraient le texte amendé.
- Plan d'épargne vert -
Les premiers articles adoptés mardi par le Sénat visent à renforcer le verdissement de la commande publique, amorcé par la loi Climat.
Le Sénat a aussi voté plusieurs dérogations aux grands principes de la commande publique pour les opérateurs des secteurs de l'énergie, de l'eau et des transports, proposées par le gouvernement.
"Elles sont essentielles pour garantir le raccordement dans des délais rapides des industries vertes", a relevé Bruno Le Maire.
Mais le "gros morceau" du projet de loi reste la mobilisation du foncier industriel.
Le texte prévoit plusieurs mesures pour faciliter la mobilisation des friches, notamment industrielles, et accélère les procédures d'installation. L'objectif est de diviser par deux le délai moyen pour obtenir les autorisations administratives nécessaires à l'ouverture d'une usine, aujourd'hui estimé à 17 mois.
"Si le texte est insuffisant par rapport aux ambitions affichées, il ne lésine pas par contre sur les régressions concernant les règles environnementales", a critiqué l'écologiste Daniel Salmon, annonçant que son groupe s'y opposerait.
En commission, les sénateurs ont amendé l'article 9 du projet de loi qui avait provoqué une levée de boucliers des maires. Ces derniers jugeaient "inacceptable" que l'Etat puisse décider à leur place de l'implantation de certains grands projets industriels. Les sénateurs ont prévu une obligation d'avis conforme du maire.
Le texte repose aussi la question délicate de la mise en oeuvre du "zéro artificialisation nette" (ZAN) des sols. En commission, les sénateurs ont exclu l'ensemble des implantations industrielles concourant à la transition écologique ou à la souveraineté nationale du décompte du ZAN.
Mais une proposition de loi, votée en première lecture mi-mars au Sénat, pour faciliter la mise en oeuvre du "zéro artificialisation nette", est examinée cette semaine par l'Assemblée nationale. Le gouvernement souhaite que ce soit au sein de ce texte que soient déterminées les modalités dérogatoires de la prise en compte du ZAN.
L'artificialisation des sols consiste à transformer des sols agricoles ou forestiers en zones urbaines ou commerciales.
Sur le soutien à l'investissement, le texte crée notamment un plan d’épargne vert pour les jeunes avec une rémunération supérieure au Livret A. La collecte attendue est "de l'ordre de 1 milliard d'euros" sur 5 milliards d'investissements privés que le gouvernement souhaite mobiliser.