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La grève au Journal du Dimanche ne faiblit pas: la rédaction de l'hebdomadaire a voté à la quasi-unanimité la poursuite du mouvement, qui entre dans sa deuxième semaine pour dénoncer l'arrivée à sa tête du journaliste d'extrême droite Geoffroy Lejeune.
Au total, 96% des votants se sont exprimés pour la poursuite de la grève (89 pour, quatre contre, trois qui ne se prononcent pas), détaille vendredi la Société des journalistes (SDJ) dans un communiqué, précisant qu'un nouveau vote se tiendra samedi matin sur la reconduction ou non du mouvement.
En conséquence, le JDD, qui n'était pas paru la semaine précédente, sera à nouveau absent des kiosques dimanche, a indiqué à l'AFP un membre de la SDJ.
C'est la deuxième grève entraînant la non-parution du journal, après celle de 2016, et d'ores et déjà le mouvement le plus long connu par la rédaction, selon des anciens du journal.
La rédaction du JDD demande à la direction de Lagardère News, propriétaire de l'hebdomadaire, de "renoncer à la nomination de Geoffroy Lejeune" et d'"offrir à la rédaction des garanties d'indépendance juridique et éditoriale".
Ces deux revendications ne semblent pas près d'aboutir: la direction du journal a annoncé la venue mercredi de Geoffroy Lejeune à la rédaction pour présenter son "projet éditorial", a appris l'AFP d'une source interne au JDD.
Les grévistes ont eu toutefois l'oreille de la ministre de la Culture Rima Abdul Malak, qui a reçu une délégation de journalistes vendredi à leur demande, a fait savoir la SDJ sur Twitter.
"Nous avons demandé à la ministre de porter une évolution de la législation afin d'assurer l'indépendance réelle des rédactions et de protéger l'exercice du métier de journaliste dans le respect des règles déontologiques", a détaillé l'instance.
"Charte éthique contraignante, droit de veto sur le choix du directeur de la rédaction , statut protecteur pour les représentants des sociétés de journalistes", la délégation affirme avoir également "plaidé pour le lancement, dans les plus brefs délais, des +états généraux du droit à l'information+".
"Urgentes pour le JDD, ces mesures se révèlent plus que jamais nécessaires, aussi bien dans l'audiovisuel que pour la presse écrite".
"Dans un contexte de défiance vis-à-vis des médias, il y va de la protection du droit des citoyens à une information pluraliste, honnête et fiable", conclut la rédaction du journal.
- Arnaud Lagardère assume -
Nombre d'observateurs voient dans l'arrivée de M. Lejeune à la tête du journal, très suivi par les milieux politique et économique, la main du milliardaire Vincent Bolloré, aux opinions réputées ultra-conservatrices.
Ce dernier pilote le groupe Vivendi, mastodonte des médias en France, qui compte notamment dans son giron le groupe Canal+ et ses chaînes C8 et CNews ainsi que Prisma media, premier groupe de presse magazine, et le groupe d'édition Editis.
La nomination de Geoffroy Lejeune est survenue juste après le feu vert donné sous conditions par la Commission européenne à Vivendi pour absorber Lagardère, groupe auquel appartient également Paris Match, Europe 1 et le leader de l'édition, Hachette.
"J'ai pris cette décision seul. Ni Vincent Bolloré, ni quiconque de Vivendi, n'a été impliqué", avait nié Arnaud Lagardère, dirigeant du groupe du même nom, mardi dans le journal Le Figaro.
Selon des informations de presse, la journaliste Charlotte d'Ornellas, également marquée à l'extrême droite et venue de Valeurs Actuelles, devrait rejoindre Geoffroy Lejeune à la direction du JDD.
Depuis ces annonces, plusieurs appels au soutien de la rédaction du JDD ont été organisés, notamment un rassemblement, sous l'égide de Reporters sans frontières (RSF), qui a réuni mardi près d'un millier de personnes.
Une caisse de grève a été ouverte pour soutenir financièrement le mouvement. Plus de 11.500 euros avaient été récoltés jeudi soir, selon le compte Twitter de la SDJ du JDD.
Une pétition a été également lancée sur le site change.org. Vendredi, elle comptait plus de 33.000 signatures.