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"Parlez-moi d'amour"... la ville d'Annecy a choisi dimanche cette chanson célèbre en hommage aux victimes et aux héros de l'attaque au couteau survenue cette semaine dans un jardin d'enfants proche du lac.
Ce havre de paix situé près du centre historique s'est transformé jeudi matin en "scène de terreur" quand un homme a poignardé quatre enfants en bas âge et deux adultes, tous hors de danger désormais, comme l'a rappelé le maire EELV François Astorg lors du rassemblement citoyen.
Face à un tel acte de "cruauté et de barbarie", "il n'y a d'autre choix que de répondre par l'unité, la solidarité et l'espoir", a-t-il dit dans un bref discours en présence de plusieurs centaines de personnes.
Dans le public, Shana Barragan, une institutrice de 27 ans, se dit "bouleversée": "Ca fait du bien de voir qu'il y ait autant de personnes qui soient ici. Mais ça reste douloureux".
Très émue, la foule applaudit quand une chanteuse interprète Juliette Greco, les plus âgés fredonnant en choeur le refrain "Parlez-moi d'amour, dites-moi des choses tendres".
Lui-même visé par des messages haineux de l'extrême droite qui l'accuse d'avoir favorisé l'immigration, le maire d'Annecy a appelé dans son discours à "faire le choix de l'amour contre la destruction", à réagir avec "empathie et courage", à "ne pas céder à la peur, à la tentation de la défiance" .
L'assaillant, un réfugié syrien récemment parti de son pays d'accueil, la Suède, après des années de vie familiale, a été mis en examen pour "tentatives d'assassinat" et conduit en détention provisoire samedi. Mutique depuis son interpellation, Abdalmasih H. a été placé dans une cellule de protection d'urgence" du centre pénitentiaire d'Aiton, en Savoie, équipée pour prévenir les suicides, selon une source proche du dossier.
Le psychiatre qui l'a examiné "a relevé l'absence d'éléments délirants francs", mais il est trop tôt pour se prononcer sur une éventuelle "pathologie psychiatrique", selon le parquet d'Annecy.
Le pronostic vital des six blessés, pour la plupart hospitalisés en urgence absolue après l'attaque, n'est plus engagé, selon la même source.
Depuis jeudi, une foule afflue en continu sur l'aire de jeu où s'est déroulé le drame, peu à peu envahie par les bougies, les fleurs, les peluches et les ballons. "Alba, Ennio, Ettie, Peter, une petite pensée", dit un message inscrit dans un coeur, en soutien aux petites victimes, deux Français, un Britannique et une Néerlandaise, tous âgés de moins de trois ans. Un Français de 78 ans et un Portugais de 73 ans, ont également été blessés dans l'attaque.
- "Partage et convivialité" -
"Il faut que la vie continue... il ne faut pas vivre dans la peur, il faut vivre dans l'espoir", insiste Jean-Paul Naville, un retraité de 64 ans, venu en voisin pour le rassemblement.
"N'oublions pas les victimes de cet acte terrible, plus que jamais le Festival doit être un moment de partage et de convivialité", déclare le message d'ouverture du Festival international du Film d'animation, grand rendez-vous annuel qui réunit à partir de dimanche soir de très nombreux participants. L'an dernier, il avait accueilli quelque 13.000 personnes.
Dans son discours, le maire d'Annecy a aussi rendu un hommage vibrant à tous ceux qui ont "fait preuve de courage" pendant l'attaque.
Parmi ces héros ordinaires, deux agents municipaux ont tenté d'arrêter l'attaquant à coups de pelle, un jeune loueur de pédalo et un professeur de mathématiques en sortie avec des élèves ont essayé de s'interposer, une assistante maternelle s'est précipitée pour secourir deux enfants blessés, un jeune touriste catholique a pris en chasse l'agresseur... Certains étaient présents sur la tribune, aux côtés des secours, des soignants, des policiers et des pompiers.
Le président Emmanuel Macron leur avait déjà exprimé sa "gratitude" et sa "fierté", vendredi au cours d'une cérémonie officielle. Il s'était notamment attardé auprès de Henri, le jeune pèlerin catholique, célébré sur les réseaux sociaux comme "le héros au sac à dos".
Le hashtag #MerciHenri est devenu une antienne sur les comptes d'extrême droite, très focalisés, aussi, par le hashtag #francocide, un terme notamment utilisé par Eric Zemmour (Reconquête!). Le soir de l'attaque, quelques dizaines de militants d'ultradroite s'étaient retrouvés dans le parc puis dans les rues d'Annecy en scandant "Bleu, blanc, rouge, la France aux Français".
Après avoir fui son pays en guerre, Abdalmasih H. avait obtenu fin 2013 un permis de séjour permanent en Suède où il avait obtenu l'asile, ce qui lui conférait le statut de réfugié.
"Aucune motivation terroriste n'apparaît à ce stade", selon la procureure. Des témoins l'ont seulement entendu "évoquer sa femme et sa fille et prononcer le nom de Jésus Christ" pendant l'attaque.
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