Partager:
Les syndicats et l'exécutif vont se reparler: après une dixième journée d'action mardi, où les opposants à la réforme des retraites étaient moins nombreux dans la rue, l'intersyndicale, qui a programmé un nouvelle mobilisation le 6 avril, a été invitée à Matignon en début de semaine prochaine.
Coup de théâtre au soir d'une 10e journée de mobilisation avec les chiffres des autorités comme des syndicats en repli: le ministère de l'Intérieur a recensé 740.000 manifestants dans toute la France, dont 93.000 à Paris, la CGT "plus de 2 millions" dont 450.000 dans la capitale.
A l'heure où l'intersyndicale annonçait une 11e journée d'actions le 6 avril, le N.1 de la CFDT Laurent Berger révélait sur TMC que l'intersyndicale était invitée en début de semaine prochaine à Matignon par Elisabeth Borne, mettant fin à des semaines d'absence de dialogue entre les deux parties.
"On ira. On en a parlé entre nous. Oui, on pense collectivement qu'il faut y aller pour porter nos propositions", a déclaré Laurent Berger. "Y compris" la proposition de médiation dans le dur conflit des retraites dont l'hypothèse avait pourtant été balayée par Olivier Véran dans la journée.
Interrogé, Matignon a confirmé l'invitation mais n'a fait aucun commentaire sur son ordre du jour.
"Ce qui est sûr c'est que nous on ira discuter des retraites. Et du travail parce que ça va avec, mais (surtout) des retraites!" a insisté M. Berger.
Mardi, comme la semaine dernière, des heurts entre manifestants et forces de l'ordre ont éclaté dans plusieurs villes alors que les violences autour de la bassine de Sainte-Soline (Deux-Sèvres), durant le week-end, étaient encore dans toutes les têtes.
A Paris, où 10.000 contrôles ont eu lieu autour du cortège, un commerce Leclerc a été pillé et plusieurs feux de poubelles allumés avant des affrontements à l'arrivée place de la Nation. La préfecture de police a fait état de 55 interpellations vers 20h30.
Tensions aussi à Dijon, Lyon, Lille et Toulouse, où les forces de l'ordre ont fait usage de canons à eau. Nantes, Bordeaux, Strasbourg, Besançon et Nancy ont aussi connu des échauffourées.
Redoutant ces incidents, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait déployé un "dispositif de sécurité inédit": 13.000 policiers et gendarmes, dont 5.500 dans la capitale.
"La France ne se mène pas à coups de trique", a répliqué l'insoumis Jean-Luc Mélenchon, appelant ses troupes au "sang-froid".
- "Dans un impasse" -
Les syndicats ont reçu mardi l'appui des députés MoDem, membres de la majorité présidentielle, pour leur proposition de médiation. "C'est bien d'avoir une ou deux personnes pour essayer de retrouver le dialogue et avoir un certain recul", a déclaré leur chef de file Jean-Paul Mattei.
Le Conseil constitutionnel doit se prononcer sur le projet de loi d'ici à trois semaines.
- "Sortir par le haut" -
Sur le terrain, l'opposition à la réforme reste vive.
Dans le cortège toulousain, Paul Castagné, 26 ans, dénonce "une réforme injuste menée avec beaucoup trop d'autorité". Ce doctorant en écologie reproche au gouvernement de "laisser pourrir la situation et jouer sur la lassitude des gens".
La circulation des trains était perturbée, avec trois TGV sur cinq et un TER sur deux en moyenne selon la SNCF. A Paris, Lorient et Marseille, des manifestants ont envahi les voies ferrées.
La Tour Eiffel était aussi fermée, comme l'Arc de Triomphe ou le château de Versailles.
En revanche, chez les éboueurs parisiens, la CGT a annoncé la suspension de la grève et du blocage des incinérateurs à partir de mercredi, alors que 6.600 tonnes de déchets jonchent encore les rues de la capitale.
Si les enseignants étaient moins mobilisés (8% de grévistes selon le ministère), des dizaines de blocages d'universités, de lycées et même de collèges ont été recensés, d'Avignon au Havre, de Lille à Bordeaux.
La mobilisation des jeunes, surveillée comme le lait sur le feu par les autorités, a elle aussi marqué le pas: ils étaient 400.000 dans la rue selon les affirmations de l'Unef, contre 500.000 le 23 mars.
Mais leur détermination reste intacte, à l'image de l'étudiant lillois Siméon Ronzier, 20 ans: "Je suis encore très jeune mais la réaction du gouvernement, le 49.3, le fait de voir que le peuple n'est pas écouté, c'est ça qui m'a donné envie de me battre".
burs-gbh-juc-lby-chl/grd/dlm