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Burn-out et démission: le mal-être grandit chez les maires ruraux

Il y a un peu plus d'un an, Hervé Neau, maire de Rezé, une commune de la métropole nantaise, mettait fin à ses jours au sein de sa mairie. Dans une lettre manuscrite, il expliquait être victime de harcèlement depuis quelques semaines.

L'enquête n'a pas permis d'identifier l'auteur des courriers malveillants pointés du doigt par Hervé Neau.

Depuis, les maires de France n'ont cessé de tirer la sonnette d'alarme sur leur situation entre multiplication des responsabilités et des compétences, déficit organisationnel et agressions régulières.

Les maires ruraux sont particulièrement touchés par ce blues. Un an après le suicide du maire de Rezé, ils ne s'estiment toujours pas entendus.

"Mon épouse pense que je suis en burn-out", lâche Roch Chéraud, maire de Saint-Viaud (Loire-Atlantique). Il est attaché à sa petite commune, à ses 2.700 habitants, à son air marin. Mais depuis son premier mandat en 1995, les difficultés se sont accentuées. "Aujourd'hui, on a de la chance de ne pas avoir plus de suicides de maires", ajoute-t-il, la voix grave.

"C’est le pire mandat qu’on ait pu voir", s'énerve Gwenaël Crahes, 45 ans, maire de La Grigonnais. Son rôle d'édile, il l'honore "du lundi au dimanche, de minuit à 23h59" dans sa petite commune de 1.760 habitants en Loire-Atlantique. Le Covid, les confinements, les nouvelles organisations dans les cantines scolaires, dans les classes, la guerre en Ukraine et la hausse de prix de l’énergie, l’inflation : il n'a pas le temps de souffler.

Plus la ville est petite, moins il y a de personnel administratif, alors le maire revêt un rôle multicasquette, il est sursollicité.

Le maire est souvent seul avec la personne qui s’occupe du secrétariat. Il doit alors préparer les budgets, les fiches de paye, s’occuper de l’état civil voir même administrer la page Facebook de la commune . "Vous êtes un Don Quichotte. Vous vous battez contre des moulins", regrette Roch Chéraud.

Les soucis quotidiens des habitants du village s’ajoutent à cette charge mentale.

Au sud de Grenoble, tout près du massif des Ecrins, Châtel-en-Trièves (Isère), ne compte que 500 habitant mais Fanny Lacroix, maire de la commune est souvent débordée : "Tout le monde a votre numéro de téléphone portable, on vous appelle pour tout : parce qu'il y a un chien errant qui aboie devant la porte, parce qu’une mamie n’a plus d'eau ou plus d'électricité, parce qu’il va y avoir de la neige et qu'il va falloir déneiger des escaliers."

"Je n’arrivais plus à tout concilier"

Lorsqu'elle a été élue en 2020, ses indemnités -qui sont proportionnelles au nombre d’habitants dans la commune- ne lui suffisaient pas, en tant que mère célibataire, pour vivre correctement et élever ses deux enfants. Elle décide de conserver son emploi de fonctionnaire.

Son médecin la déclare en arrêt maladie à l’automne 2022. "Je n’arrivais plus à tout concilier, c'était trop compliqué", explique-t-elle. Depuis, elle bénéficie d’une mise à disposition pour se consacrer à temps-plein à sa fonction de maire.

Les maires interrogés par l’AFP pointent aussi un manque de considération au niveau des conseils municipaux et de la part du législateur.

Face à l'absence de cellules psychologiques dédiées, ils font avec leurs propres moyens, à leur échelle. Avec quelques autres maires, Roch Cheraud a créé un groupe WhatsApp, "quand on a un coup de blues, un coup de mou, entre collègues, ça aide", explique-t-il. L'année dernière, ils ont fait leur Assemblée générale sur le thème des incivilités. "Grosso modo, c'était une thérapie de groupe", ironise-t-il.

En détresse, les maires choisissent parfois de démissionner, observe l’Association des Maires Ruraux de France. Depuis 2020, 900 ont quitté leurs fonctions. Lorsque cette éventualité est évoquée, Gwenaël Crahes hésite et finit par lâcher: "je refuse de me poser cette question".

Selon un sondage Ifop, plus d’un maire sur deux ne souhaite pas se représenter à la fin de son mandat en 2026. Cela concerne surtout les maires les plus âgés et ceux de petites communes. "Ils [sautent] du camion avant qu'il ne soit trop tard", se désole Cédric Szabo, directeur de l'AMRF.

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