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"Rien n'a bougé", mais la discussion continue: Joe Biden et des ténors de l'opposition ont campé sur leurs positions mardi sur la dette publique américaine, alors qu'un défaut de paiement menace à court terme.
"J'espère que ce président comprend qu'en tant que dirigeant de cette nation, vous ne pouvez pas (...) tenir le pays en otage", a lancé le républicain Kevin McCarthy à la sortie d'un entretien dans le Bureau ovale.
Selon le président de la Chambre des représentants, "rien n'a bougé" après un échange d'une heure avec le dirigeant démocrate et trois autres leaders du Congrès.
Mais il a signalé que les mêmes protagonistes se retrouveraient vendredi, ce qu'a confirmé Joe Biden, lequel s'est voulu un peu plus optimiste lors d'un échange avec la presse.
Il a parlé d'une rencontre "productive" et promis qu'il ferait "tout ce qui est en (son) pouvoir pour éviter" un défaut de paiement de la première puissance mondiale, ce qui n'est jamais arrivé. Ce n'est "pas une option", a-t-il martelé.
Le président a même jugé "possible", si le blocage se poursuit, d'annuler un voyage devant l'emmener dans une dizaine de jours au Japon puis en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Australie afin de renforcer les alliances américaines dans la zone Asie-Pacifique.
- "Otage" -
Le chef des démocrates au Sénat Chuck Schumer a de son côté renvoyé la politesse à ses adversaires républicains, en accusant lui aussi Kevin McCarthy de tenir le plafond de la dette "en otage", parce qu'il conditionne le vote d'un relèvement du plafond de la dette à des coupes budgétaires.
Cette manoeuvre législative, propre aux Etats-Unis et qui consiste à augmenter le montant maximal d'endettement public autorisé, est indispensable pour éviter que la première puissance mondiale se retrouve, peut-être dès le 1er juin ou en tout cas cet été, incapable de payer ses factures, ses fonctionnaires et ses créanciers.
Dans cette affaire où chaque camp accuse l'autre de chantage au défaut, la Maison Blanche martèle que le relèvement du plafond de la dette, longtemps une simple formalité, doit être voté sans conditions ni négociations.
Les conservateurs demandent, eux, que la question de la dette soit liée à un effort sur la dépense publique, qu'ils jugent hors de contrôle.
Joe Biden a exclu, pour cause de complications juridiques, de recourir à court terme à une sorte de coup de force qui le verrait invoquer le 14ème amendement de la Constitution américaine afin de continuer à émettre de la dette en dépit du fameux plafond.
Mais il a fait savoir qu'une fois la crise actuelle terminée, il comptait y réfléchir pour "voir si cela fonctionne".
Cette impasse politique, si elle n'est pas complètement inédite --républicains et démocrates s'étaient déjà livrés à des joutes semblables pendant la présidence de Barack Obama-- n'en suscite pas moins déjà la fébrilité des marchés.
- Enjeu politique -
Pour lever la menace d'un défaut de paiement, Joe Biden a besoin de convaincre une partie des sénateurs républicains, faute de majorité suffisante à la chambre haute.
Il lui faut surtout trouver un terrain d'entente avec Kevin McCarthy.
Le président démocrate et le chef républicain jouent gros: la crédibilité de la dette américaine, mais aussi leur crédit politique.
Le premier, à 80 ans, est candidat à sa réélection et n'arrive pas à faire décoller sa faible cote de popularité. Le second, élu difficilement à la tête de la chambre basse par une mince majorité, doit consolider sa position.
Le plafond de la dette est fixé actuellement à quelque 31.000 milliards de dollars --le record de toutes les dettes souveraines dans le monde en valeur absolue.
Ce montant a été atteint mi-janvier mais le gouvernement fédéral a jusqu'ici géré la situation par des manoeuvres comptables.
Si l'impasse se poursuit, pour la première fois, des porteurs de bons du Trésor américains, le placement roi de la finance mondiale, ne pourraient plus récupérer leur mise.
Alors, la Maison Blanche l'assure, finie la reprise robuste dont le président américain s'attribue le mérite: les marchés s'effondreraient, la récession serait historique et le chômage flamberait brutalement aux Etats-Unis --avec des conséquences sur toute l'économie mondiale.