Partager:
Le Hamas a averti samedi qu'une offensive sur Rafah pourrait faire "des dizaines de milliers de morts et de blessés" dans cette ville du sud de Gaza, où sont réfugiés des centaines de milliers de Palestiniens que le Premier ministre israélien veut évacuer, suscitant l'inquiétude à l'étranger.
De nouvelles frappes israéliennes ont visé samedi Rafah, où vivent à présent plus de 1,3 million de Palestiniens, selon l'ONU, en grande majorité des civils ayant fui la guerre qui fait rage depuis quatre mois entre Israël et le Hamas.
Cinq policiers ont été tués dans deux frappes distinctes, selon des sources de sécurité palestiniennes. Les forces israéliennes ont indiqué que deux hauts responsables militaires du mouvement islamiste palestinien avaient été tués dans l'une d'elles.
Après avoir ordonné mercredi à l'armée de préparer une offensive sur Rafah, le Premier ministre Benjamin Netanyahu lui a demandé vendredi de lui soumettre un "plan combiné" d'"évacuation" des civils et de "destruction" du mouvement islamiste palestinien dans cette ville.
"Il est impossible d'atteindre l'objectif de la guerre sans éliminer le Hamas et en laissant quatre bataillons du Hamas à Rafah", et cela requiert que "les civils évacuent les zones de combat", a-t-il affirmé.
"Nous mettons en garde contre une catastrophe et un massacre qui pourraient aboutir à des dizaines de milliers de martyrs et de blessés", a répondu le Hamas.
Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell a mis en garde samedi contre une éventuelle offensive de l'armée israélienne à Rafah qui s'apparenterait, selon lui, à "une catastrophe humanitaire indescriptible".
A quelques kilomètres au nord, à Khan Younès, les combats se concentrent dans l'enceinte de l'hôpital Nasser, le plus grand du sud de Gaza, assiégé par les chars israéliens où se trouvent encore 300 employés, 450 blessés et 10.000 déplacés, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien.
"De nombreux commandants (du Hamas) ont été tués et nous voulons en éliminer encore plus, ainsi que des hauts responsables militaires", a affirmé le chef de l'armée, Herzi Halevi, en visite à Khan Younès auprès des forces israéliennes.
- Un gigantesque campement -
La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël, qui a fait plus de 1.160 morts, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël a juré de "détruire" le Hamas, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne. L'armée israélienne a lancé une offensive qui a fait 28.064 morts à Gaza, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste, au pouvoir dans le territoire depuis 2007.
Environ 250 personnes ont par ailleurs été enlevées en Israël le 7 octobre et emmenées à Gaza. Une trêve d'une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël. Selon Israël, 132 otages sont toujours détenus, dont 29 seraient morts.
Dans la ville de Gaza, dans le nord, une petite fille de six ans, Hind Rajab, disparue depuis près de deux semaines au milieu des combats, a été retrouvée morte samedi, selon sa famille.
La fillette était en voiture avec des proches lorsqu'ils se sont retrouvés face à des chars qui auraient ouvert le feu, d'après la famille. Hind avait dans un premier temps survécu, comme en atteste des appels téléphoniques à des secouristes, alors que les autres passagers étaient morts.
L'armée et l'agence de la sécurité intérieure israéliennes ont par ailleurs affirmé samedi avoir découvert dans la ville de Gaza un tunnel du Hamas sous le quartier général de l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa). Le chef de la diplomatie israélienne, Israël Katz, a demandé la "prompte démission" du chef de l'agence onusienne, Philippe Lazzarini.
L'Unrwa, qu'Israël accuse d'être "totalement infiltrée" par le mouvement islamiste, a souligné que le bâtiment avait été évacué le 12 octobre.
Environ 1,7 million de personnes, selon l'ONU, sur un total de 2,4 millions d'habitants, ont fui leur foyer depuis le 7 octobre, beaucoup d'entre elles déplacées plusieurs fois à travers le territoire dévasté, assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure.
Rafah, adossée à la frontière fermée avec l'Egypte, est le dernier grand centre urbain où l'armée n'a pas encore pénétré. Cette ville, transformée en un gigantesque campement de fortune, est le principal point d'entrée pour l'aide humanitaire, toujours insuffisante.
"Nous sommes entre la vie et la mort. Nous vivons dans l'instant", a témoigné Bassel Matar, un homme réfugié à Rafah.
Le déplacement forcé de plus d'un million de Palestiniens "sans trouver un endroit sûr où aller (...) aurait des conséquences catastrophiques", a averti Nadia Hardman, spécialiste des droits des migrants et des réfugiés pour Human Rights Watch.
- Riposte "excessive" -
L'ONU et même les Etats-Unis, principal allié d'Israël, s'inquiètent du sort des civils. Le président américain Joe Biden avait haussé le ton jeudi contre Israël, jugeant "excessive" sa "riposte" à l'attaque du 7 octobre.
L'Arabie saoudite a mis en garde samedi contre les "répercussions extrêmement dangereuses" d'une offensive sur Rafah. L'Allemagne a dénoncé "une catastrophe humanitaire annoncée".
Même si "le traumatisme des Israéliens est réel" après le 7 octobre, "la situation à Gaza est injustifiable", a souligné le ministre français des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné.
Selon un média américain, le directeur de la CIA William Burns se rendra la semaine prochaine en Egypte pour soutenir un accord de trêve.
La guerre à Gaza menace également de s'étendre à la frontière nord d'Israël avec le Liban, où les échanges de tirs sont quotidiens entre l'armée israélienne et le Hezbollah libanais, allié du Hamas.
Trois personnes, dont deux civils, ont été tuées samedi dans des frappes israéliennes au Liban, dont l'une visait un responsable du mouvement palestinien Hamas qui a survécu, ont indiqué des sources de sécurité libanaise et palestinienne à l'AFP.