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Le sort d'un grand hôpital du sud de la bande de Gaza suscite des inquiétudes croissantes vendredi, après une opération de l'armée israélienne qui en a pris le contrôle, et la mort, selon le Hamas, de plusieurs malades faute d'oxygène.
La communauté internationale multiplie pendant ce temps ses appels pour dissuader Israël de lancer une offensive dans la ville surpeuplée de Rafah, où sont piégés près d'un million et demi de civils contre la frontière fermée avec l'Egypte.
A quelques kilomètres plus au nord, les combats entre l'armée et le mouvement islamiste palestinien font rage dans la ville de Khan Younès, transformée en champ de ruines.
Selon le ministère de la Santé du Hamas, les soldats israéliens y ont pris le contrôle de l'hôpital Nasser, le plus grand du sud de Gaza, où cinq patients sont morts à la suite de coupures d'électricité consécutives à la pénurie de carburant, qui ont provoqué l'arrêt de la distribution d'oxygène après cet assaut.
Le ministère a ajouté craindre pour la vie de sept autres patients, et tenir les forces israéliennes pour "responsables" des décès.
- Des dizaines d'interpellations -
Jeudi, le ministère avait indiqué que plusieurs centaines de patients, personnel médical et autres civils se trouvaient encore dans le complexe.
L'armée avait alors annoncé avoir mené une opération dans l'hôpital après avoir reçu des renseignements selon lesquels le Hamas y aurait retenu des otages.
Vendredi soir, l'armée a indiqué que les troupes y avaient trouvé des médicaments avec les noms d'otages écrits dessus.
Elle a par ailleurs affirmé avoir réparé le générateur de l'hôpital qu'elle dément avoir visé.
Le général israélien Yaron Finkelman, chef du Commandement Sud, a déclaré dans un communiqué que l’opération à Khan Younès, "précise", de "haute qualité", avait permis d’appréhender "des dizaines de terroristes", notamment dans l’hôpital.
Des médecins ont décrit une situation intenable dans cet hôpital cerné par les combats, où s'étaient réfugiés des milliers de déplacés avant de commencer à fuir.
Médecins sans Frontières a annoncé que ses employés avaient "dû fuir, laissant les malades derrière eux".
"La situation était chaotique, catastrophique", a déclaré à l'AFP Christopher Lockyear, secrétaire général de MSF.
L'hôpital Nasser est "la colonne vertébrale" du système de santé dans le sud de Gaza et "doit rester opérationnel", a affirmé vendredi l'Organisation mondiale de la santé, rappelant que quelques hôpitaux seulement du territoire continuaient à fonctionner partiellement.
La guerre a été déclenchée par l'attaque menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
Israël a juré d'anéantir en représailles le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne. L'offensive israélienne à Gaza a fait 28.775 morts, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
Dans un contexte de tensions en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, une attaque qualifiée de "terroriste" par la police a fait au moins deux morts vendredi à Kiryat Malakhi, une ville du sud d'Israël, où un homme a ouvert le feu.
- "Nous mourons lentement" -
L'armée israélienne se prépare pendant ce temps à une offensive sur Rafah, où le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, a promis de détruire le "dernier bastion" du Hamas. Il a assuré que l'armée permettrait auparavant aux civils "de quitter les zones de combat", sans expliquer vers quelle destination.
Cette ville, transformée en un gigantesque campement, abrite, selon l'ONU, 1,4 million de Palestiniens, pour la plupart déplacés par la guerre.
Rafah est en outre le principal point d'entrée de l'aide humanitaire depuis l'Egypte, contrôlée par Israël et insuffisante pour répondre aux besoins d'une population menacée par la famine et les épidémies.
"Nous mourons lentement à cause des pénuries et du manque de médicaments", a témoigné un homme réfugié à Rafah, Mohammad Yaghi.
- "Désastre humanitaire" -
Une offensive à Rafah conduirait à un "désastre humanitaire sans précédent", a prévenu vendredi le président français, Emmanuel Macron.
Le président américain, Joe Biden, avait réitéré la veille, lors d'une conversation téléphonique avec Benjamin Netanyahu, son opposition à une telle opération "sans un plan crédible (...) assurant la sécurité des civils".
Des négociations complexes en vue d'une trêve incluant de nouvelles libérations d'otages se poursuivent au Caire par l'intermédiaire des pays médiateurs, Qatar, Egypte et Etats-Unis.
Selon Israël, 130 otages sont encore détenus à Gaza, dont 30 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées sur son territoire le 7 octobre. Une trêve d'une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 Palestiniens détenus par Israël.
Le Hamas a indiqué vendredi que les otages "luttent pour leur survie" car ils sont exposés aux mêmes "souffrances" que les Gazaouis, comme "la faim (...) ou le manque de médicament".
Joe Biden a lui dit qu'il "fallait un cessez-le-feu temporaire" dans la bande de Gaza "pour faire sortir les otages".
Selon le Wall Street Journal, citant des responsables égyptiens, l'Egypte construit une zone sécurisée entourée d'un mur dans la péninsule du Sinaï afin d'y accueillir des Palestiniens de Gaza.
Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz a de son côté assuré que son pays se coordonnerait avec l'Egypte avant son opération à Rafah.
"Nous offrirons aux civils des zones de sûreté où ils pourront se rendre et nous nous occuperons du Hamas", a-t-il dit.
Alors qu'Israël est aussi confronté à sa frontière nord à des tirs du Hezbollah, allié du Hamas, auxquels il riposte, le chef de cette puissante formation libanaise Hassan Nasrallah a juré vendredi qu'il lui ferait payer "par le sang" le prix des civils tués au Liban cette semaine, assurant que les missiles de précision de son parti pouvaient atteindre l'extrémité sud du pays ennemi.