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Jack Hausman, 101 ans, ancien combattant américain de la Seconde guerre mondiale et pacifiste depuis toujours, éclate en sanglots quand il est fait chevalier de la Légion d'honneur entouré des siens qui se serrent dans son petit pavillon new-yorkais.
La voix brisée par l'émotion, les larmes coulant sur son visage, Jack Hausman -- installé depuis près de huit décennies dans sa maison du Queens, arrondissement populaire de New York, exprime sa "peine pour ceux qui ne sont plus là aujourd'hui".
Ces disparus que le vieil homme veut "honorer" en cette radieuse après-midi de fin avril sont les 250 hommes de son régiment d'ingénieurs et de démineurs de l'armée de terre américaine qui ont combattu l'Allemagne sous les ordres du général George Patton en Algérie, Italie, dans le sud de la France, en Europe centrale et en Rhénanie de 1943 à 1945.
"Vous avez fait de moi un gars important", lance ce natif de Brooklyn, le 30 septembre 1922, d'une voix chevrotante mais avec l'humour et l'espièglerie qui font rire ses deux filles septuagénaires, petits-enfants et arrière-petits-enfants, amis et représentants des autorités municipales new-yorkaises et consulaires françaises.
"J'ai le sentiment d'accepter cette récompense pour 250 hommes. Ce sont eux qui ont travaillé dur et je veux leur accorder cet honneur", répond Jack Hausman au consul général de France par intérim Damien Laban venu le faire chevalier dans l'ordre de la Légion d'honneur pour son "rôle dans la libération de la France et de l'Europe".
- Derniers anciens combattants -
A l'approche du 80e anniversaire du Débarquement des Alliés en Normandie le 6 juin 1944 et de la capitulation de l'Allemagne nazie le 8 mai 1945, l'ambassade de France aux Etats-Unis décore les tout derniers anciens combattants américains vivants qui ont combattu sur les théâtres européens.
Les plus jeunes ont 96, 97 ans et les cérémonies de décoration sont de plus en plus chargées en émotions.
"Il est de notre devoir de remercier les héros qui ont permis de libérer notre nation durant la Seconde guerre mondiale, tant que nous le pouvons. Nous leur devons notre liberté, notre démocratie et notre mode de vie", estime M. Laban.
Certains ont été invités aux commémorations du Jour-J en Normandie le 6 juin.
Mais Jack Hausman ne retraversera pas l'Atlantique.
Il n'a d'ailleurs jamais voulu remettre les pieds en Europe après la guerre.
Car le jeune homme engagé à 20 ans dans l'armée de terre comme démineur, constructeur et ingénieur de ponts et de routes pour l'acheminement de marchandises et d'armements à l'infanterie dit qu'il a toujours été pacifiste et tourné vers son prochain.
- Un monde en paix -
"Nous voulons un monde en paix", souffle-t-il.
"Entré dans l'armée, je ne savais pas tirer. Je n'avais rien contre les Allemands. J'étais tout jeune (...) Je tirais au-dessus de leurs têtes et je leur ai fait très peur et ils ont capitulé", raconte Jack Hausman à l'AFP.
Puis, "nous les avons capturés. Ils étaient affamés, je leur ai donné une partie de mes rations. Mon plaisir était d'essayer d'aider les gens".
Interrogé sur la guerre en Ukraine et une hypothétique intervention américaine, Jack Hausman hausse les épaules: "Personne ne gagne. Quand on tire, il y a un mort de chaque côté".
"Et grâce à Dieu, je me suis débrouillé pour rester en vie", lâche le New-Yorkais à la fine moustache, dans son fauteuil roulant et visiblement heureux.
- Retraité à 98 ans -
A son retour en 1945, il avait retrouvé son amour de lycée, Beatty. Ils seront mariés 76 ans.
Ayant repris l'entreprise familiale qui fabrique des boîtes en carton ondulé, l'une des plus importantes de la côte est, l'ex-industriel, toujours en chemise et veste, a pris sa retraite en... 2020, à 98 ans.
En partageant des photos de leur père élégant en uniforme lors de sa mobilisation en 1943, ses filles Sandy Gottfried et Linda Margolis se disent "très fières".
"On attendait cela depuis longtemps", reconnaît Mme Gottfried à propos de la Légion d'honneur après qu'une belle-fille francophone a chanté a capella l'hymne des Etats-Unis "The Star-Spangled Banner" et "La Marseillaise".
"Il ne reste plus beaucoup d'anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale. Et il a toute sa tête pour comprendre ce qui se passe", conclut Mme Gottfried.