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Le Sénégal vers l'apaisement après la promesse de Sall de ne pas retarder la présidentielle

Le Sénégal semble samedi sur la voie de l'apaisement après que Macky Sall, sous pression de toutes parts, s'est engagé à organiser la présidentielle "dans les meilleurs délais", conformément à l'avis du Conseil constitutionnel.

Le chef de l'Etat a rompu le silence sous la forme d'un communiqué publié vendredi par ses services pour assurer qu'il allait "faire pleinement exécuter la décision" des Sages qui avaient opposé la veille un veto retentissant à sa décision de reporter l'élection initialement prévue fin février.

M. Sall "mènera sans tarder les consultations nécessaires pour l'organisation de l'élection présidentielle dans les meilleurs délais", dit le texte.

"Dans les meilleurs délais", c'est précisément la fenêtre impartie jeudi par le Conseil constitutionnel quand il a invalidé l'ajournement de la présidentielle au 15 décembre. Depuis, les appels se sont élevés de toutes parts, dans le pays et à l'étranger.

Le Sénégal traversait l'une des pires crises politiques de son histoire post-indépendance depuis l'annonce le 3 février par M. Sall du report de facto de la présidentielle, prévue le 25 février.

L'Assemblée nationale a ensuite repoussé le scrutin au 15 décembre, après avoir fait évacuer l'opposition de force, prolongeant le mandat du chef de l'Etat jusqu'à l'installation de son successeur.

Cet ajournement a provoqué des heurts qui ont fait trois morts lors de manifestations réprimées, qui ont donné lieu à des dizaines d'interpellations.

Seules quelques dizaines de personnes ont répondu à des appels à manifester vendredi à Dakar et ont été dispersées à l'aide de gaz lacrymogène.

Une marche silencieuse d'opposants prévue samedi à Dakar a été autorisée, contrairement à toutes celles des dernières semaines, a indiqué à l'AFP Elimane Kane, du collectif de la société civile Aar Sunu Election ("Protégeons notre élection") qui l'organise.

- Décision saluée -

La décision du Conseil constitutionnel a été largement saluée comme un facteur d'apaisement.

"C'est une décision qui était attendue par le peuple sénégalais", estime Babou Cissé, juriste de 40 ans, en remarquant que "la tension a un peu baissé".

L'opposition et la société civile criaient au "coup d'Etat constitutionnel" après le report, accusant le camp présidentiel de vouloir éviter la défaite de son candidat, le Premier ministre Amadou Ba, et suspectant M. Sall de vouloir se maintenir au pouvoir.

Le président a juré qu'il ne se représenterait pas pour un troisième mandat, justifiant le report par la crainte d'une contestation du scrutin susceptible de provoquer de nouveaux accès de violence après ceux de 2021 et 2023.

Le Conseil constitutionnel, saisi par des opposants au report, a invoqué le principe d'"intangibilité" de la durée de cinq ans du mandat présidentiel.

La Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao), l'Union européenne, la France et le Royaume-Uni avaient appelé les autorités à se conformer à la décision du Conseil.

Les Etats-Unis ont eux exhorté toutes les parties prenantes à s'entendre pour "soutenir une élection libre et juste, conduite de manière pacifique et dans un délai convenable", selon un communiqué du département d'Etat.

L'ONU a demandé à toutes les parties de tenir une "élection inclusive et transparente dans le cadre de la Constitution".

L'ajournement de la présidentielle avait alarmé d'importants partenaires internationaux, inquiets qu'un pays réputé pour sa stabilité dans une région troublée ne cède à la violence.

- "Historique" -

Dans les rues de Dakar, Mamadou Caba, employé de 55 ans, a comme d'autres exprimé son soulagement.

"C'est heureux que le Conseil constitutionnel prenne une décision telle qu'il l'a prise. Au moins, là, on est à la moitié du chemin de la bonne solution", a-t-il dit.

Pour Babacar Gueye, un constitutionnaliste coordinateur de Aar Sunu Election opposé au report, son invalidation est "historique".

Face à l'inquiétude partagée par les partenaires étrangers du Sénégal, le système a "finalement montré qu'il (avait) des ressorts pour surmonter de très grosses crises", a-t-il dit à l'AFP.

Les interrogations portent désormais sur la date du scrutin et la liste des concurrents. Le Conseil constitutionnel avait validé 20 candidatures en janvier.

Le porte-parole du gouvernement, Abdou Karim Fofana, a noté que le Conseil n'imposait pas de date. Il a laissé entrevoir des discussions entre le président et les acteurs politiques, "qui permettront d'organiser les choses".

Le chef de l'Etat "doit prendre ses dispositions pour qu'on discute, pour qu'on voie comment mettre en oeuvre la décision du Conseil", a dit à la presse l'un des principaux candidats, Khalifa Sall.

L'opposant n'a pas dit si l'élection devait avoir lieu avant ou après le départ du président Sall. Mais il a partagé une perception commune après la décision du Conseil: le 2 avril, à l'expiration de son mandat, le président Sall "doit partir".

Dans l'opposition, Amadou Ba a déclaré que "Macky doit organiser l'élection présidentielle avant la fin de son mandat le 2 avril 2024, qui reste la date de passation", a rapporté le quotidien Walf.

Amadou Ba est le mandataire de Bassirou Diomaye Faye, numéro deux du parti dissous Pastef, qui a livré au pouvoir après 2021 un bras de fer ponctué d'épisodes meurtriers.

Des centaines de sympathisants de ce parti et des membres de la société civile ont été arrêtés.

Dans un geste d'apaisement, 134 d'entre eux ont été libérés depuis jeudi et 90 devaient l'être vendredi, selon le ministère de la Justice.

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