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Nouvelle mobilisation de policiers contre la réforme de la PJ

Des centaines de policiers se sont à nouveau rassemblés lundi en France contre la réforme de la police judiciaire, après la publication la semaine dernière de deux rapports, dont l'un venu du Sénat qui étrille le projet voulu par Gérald Darmanin.

Des rassemblements ont notamment eu lieu à Marseille, Lille, Bordeaux, Versailles, Rennes ou Nanterre, devant le siège de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ).

Sans la "DCPJ = la France à la mafia", pouvait-on lire sur des feuilles tenues par des policiers rassemblés de dos devant l'antenne de la PJ de Nantes.

Les rassemblements "spontanés" sont venus "de la base" à la suite des "déclarations du ministre (Gérald Darmanin) après la publication des rapports", a dit à l'AFP Yann Bauzin, président de l'Association nationale de la PJ (ANPJ), créée en août contre la réforme.

Au total, selon l'ANPJ, plus de 1.100 policiers se sont mobilisés (la PJ compte 5.600 agents dont 3.800 enquêteurs).

L'association a appelé lundi soir dans un communiqué à "un grand rassemblement national, intersyndical et interprofessionnel, le 11 mars à Paris".

La semaine dernière, deux rapports ont été publiés, dont l'un piloté par le sénateur LR Philippe Dominati qui a jugé le projet inadapté et a demandé au ministre de le modifier.

L'autre, mené par les inspections générales de l'administration (IGA), de la police (IGPN) et de la justice (IGJ), n'a pas remis en cause le bien-fondé du projet mais a formulé 19 recommandations, dont des garanties sur les moyens à accorder à la lutte contre la criminalité organisée.

Mardi, un troisième rapport, celui de la mission d'information de l'Assemblée nationale, doit être à son tour publié.

Yann Bauzin reproche à Gérald Darmanin, qui a déjà annoncé la désignation de "préfigurateurs" de la réforme, de vouloir faire passer sa réforme en force.

"Le rapport des inspections est très circonspect et pas du tout triomphal. Le rapport Dominati sabre le projet en ce qui concerne la PJ. Et le ministre semble passer outre", a-t-il déploré. "Il est incompréhensible que le ministre prennent le risque d'imposer cette réforme. Les collègues ne l'acceptent pas".

- "Malaise général" -

Le projet de réforme prévoit de placer tous les services de police d'un département - renseignement, sécurité publique, police aux frontières et PJ - sous l'autorité d'un seul directeur départemental de la police nationale (DDPN), dépendant du préfet.

La réforme, qui doit être mise en œuvre tout au long de l'année 2023, a suscité une fronde inédite au sein de la police judiciaire.

Celle-ci craint un "nivellement vers le bas" de la filière qui intègrera les services d'investigation de la sécurité publique, plombés par un stock énorme d'affaires en souffrance, et un renforcement du poids du préfet dans les enquêtes.

Des rassemblements d'enquêteurs avaient déjà eu lieu un peu partout en France à l'automne.

"Il faut ouvrir les yeux, on n'est pas devant des gens qui demandent plus de salaire ou des heures de travail, il faut prendre en compte leurs inquiétudes", a souligné à l'AFP un représentant de l'ANPJ à Marseille, identifié sous le prénom de Thomas.

Dans cette ville, le limogeage du très respecté directeur zonal de la PJ Eric Arella, après une manifestation de policiers opposés à la réforme, avait suscité l'indignation en octobre.

A Bordeaux, certains policiers brandissaient des pancartes "Soutien au groupe Stups de la PJ d'Annecy". Selon ces manifestants, la réforme va contraindre les policiers chargés localement de la lutte contre les trafics de drogue à déménager d'Annecy à Annemasse. "S'ils restent, ils feront autre chose", a accusé une enquêtrice sous couvert d'anonymat.

Devant l'hôtel de police de Rennes, une vingtaine d'agents de la police judiciaire ont dénoncé une "réforme vouée à tuer le métier", selon un policier de la brigade des stupéfiants qui préfère rester anonyme, et un "malaise général à la PJ".

"Il faut que notre ministre nous entende", a renchéri un de ses collègues identifié comme Christophe, présent avec une trentaine d'autres devant le commissariat central de Toulouse. "On ne demande pas de choses exubérantes, on demande juste à préserver notre outil de travail".

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