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Crise à LFI, incertitudes chez Renaissance, interrogations existentielles persistantes au PS ou chez LR, érosion des bases militantes: à l'exception du RN, l'année 2022 a maintenu dans l'ornière les principaux partis politiques, qui misent sur un cru 2023 sans élection directe pour se relancer.
Grande nouveauté chez La France insoumise: les divergences s'étalent sur la place publique. Sur fond d'affaire Quatennens, la fronde gagne contre "un système vertical" et pour "une démocratie interne plus juste", selon les termes d'une tribune signée dans Le Monde par un millier de militants.
Jean-Luc Mélenchon est visé. Le fondateur de ce "mouvement" --et non "parti"-- politique, au fonctionnement réputé "gazeux" (comprendre: évolutif et horizontal) voit son autorité contestée au moment où, pourtant, son oeuvre a pris l'ascendant sur le reste de la gauche, coalisée aux législatives sous l'étiquette Nupes.
"On peut avoir une organisation qui est valable quand vous êtes en campagne présidentielle, où on est tous derrière le candidat (...) mais quand vous êtes dans le temps long, vous devez avoir une autre forme d'organisation", estime la députée Danielle Simonnet.
Un tableau qui évoque également Renaissance. Dans le parti présidentiel, personne ne conteste Emmanuel Macron. Mais cet autre "mouvement" pas comme les autres, qui a perdu la majorité à l'Assemblée, soigne désormais sa mue en "vrai parti" avec de premières élections locales fin janvier, et compte à présent faire payer ses adhérents.
Un atterrissage potentiellement brutal. "On avait dit 400.000 ?", feignait, cet été, de s'interroger un dirigeant au sujet du nombre d'adhérents "internet" revendiqués depuis 2017. Mais en septembre, moins de 27.000 votants ont pris part à l'élection du candidat désigné par l’Élysée, Stéphane Séjourné.
C'est un fait notable: les trois candidats en tête à la présidentielle --Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon-- s'appuyaient tous trois sur des partis entièrement dédiés, qui n'ont jamais organisé de primaire.
Dans le reste de la gauche, on élit ses dirigeants --les écologistes (10.000 adhérents) viennent d'adouber Marine Tondelier, le PS (20.000) tient congrès fin janvier--, parfois même son candidat, mais aux élections nationales les résultats ne suivent pas.
- Rangs dégarnis -
A droite, Les Républicains peuvent arguer d'un reste de base militante et d'un nouvel exercice réussi de "démocratie interne": 70% des 91.000 adhérents ont participé à l'élection d’Éric Ciotti. Mais de Nicolas Sarkozy à Valérie Pécresse en passant par François-Xavier Bellamy --tête de liste aux Européennes de 2019--, on y a désormais appris à se méfier des meetings pleins à craquer qui débouchent sur des urnes désertées.
Même constat, la démocratie interne en moins, chez Reconquête, le jeune parti d'extrême droite d’Éric Zemmour aux 134.000 adhérents revendiqués, aux meetings particulièrement soignés, mais aux échecs électoraux répétés.
"Ma conviction est que le seul parti en réelle dynamique aujourd'hui, c'est le Rassemblement national", s'inquiète un député Renaissance. En 2022, Marine Le Pen a amélioré son score à la présidentielle, obtenu un bataillon inédit de 89 députés et voit même, à en croire l'Ifop, son parti bénéficier de la meilleure côte d'opinion (37%), à égalité avec EELV.
Mais la popularité des partis en général est à relativiser. Malgré un petit regain en cette année électorale, seul 19% des Français leur font confiance, selon une étude Opinionway pour le Cevipof.
Leurs effectifs n'ont cessé de chuter depuis des années. A titre de comparaison, en Espagne, le Parti socialiste au pouvoir revendiquait 163.847 adhérents à jour de cotisation en 2021. En Allemagne, bien qu'en baisse, les deux mastodontes SPD et CDU alignent respectivement 420.000 et 405.000 adhérents.
La comparaison est également délicate avec les syndicats, la CFDT et la CGT comptant environ 600.000 adhérents. Dans un pays où, pour autant, les récents mouvements sociaux --contrôleurs SNCF, médecins généralistes-- ont éclos en dehors des cadres syndicaux, quatre ans après les "gilets jaunes".
Pour les principaux dirigeants politiques, les partis, malgré leurs évidentes insuffisances, n'en restent pas moins un passage obligé. Depuis Macron, "on sait maintenant qu’on peut gagner une présidentielle avec une petite machine créée pour l’occasion", explique un impétrant qui, comme ses concurrents, compte sur une année 2023 sans élections, sénatoriales exceptées, pour se structurer. Avant le retour aux urnes pour les Européennes de 2024.