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Poniatowska, la plus française des Mexicaines, honorée au pays d'Octavio Paz

Hasard des dates: la plus française des auteures mexicaines, Elena Poniatowska, a été couverte d'honneurs mercredi, le jour du 25e anniversaire de la mort de son ami, le prix Nobel de littérature Octavio Paz, dont un musée honore désormais la mémoire à Mexico.

Elena Poniatowska, née à Paris en 1932 d'un descendant de la noblesse polonaise et d'une mère mexicaine, a reçu la distinction suprême du Mexique (la médaille Belisario Dominguez octroyée par le Sénat).

Arrivée enfant au pays de sa mère, "Elenita" -son surnom- est l'auteure de "La nuit de Tlatelolco", un récit sur la répression sanglante du mouvement étudiant le 2 octobre 1968 à Mexico.

Comme quelques-uns de ses dizaines de titres, "La nuit..." a été traduit en français, son autre langue dans laquelle elle aime toujours lire.

Le Sénat a salué son "engagement social, son esprit civique, le service rendu à la patrie, à l'humanisme et la liberté".

Journaliste, elle a aussi interviewé des grands noms de la culture comme le peintre Diego Rivera, l'écrivain Octavio Paz ou les actrices Maria Felix et Dolores del Rio.

"Les récompenses sont comme une porte qui s'ouvre soudain, un cadeau, la possibilité d'un avenir et une reconnaissance du passé pour ceux qui comme moi prennent congé", a-t-elle déclaré au Sénat.

- Un cousin ministre de l'Intérieur -

L'activiste garde un souvenir aigre-doux de son cousin Michel Poniatowski, ministre de l'Intérieur du président libéral de centre-droit Valéry Giscard d'Estaing dans les années 70. Il faisait le "sale boulot", soupire-t-elle.

"Je suis une personne qui penche vers les causes de la gauche, car je vis dans un pays où je vois qu'il y a de grande différence sociale", explique cette proche du pouvoir en place au Mexique, qui prétend rompre avec le "néo-libéralisme".

L'AFP lui a rendu visite lundi dans sa jolie maison fleurie dans l'un de ces quartiers sud de Mexico aux allures de village, avec ses parcs, ses rues pavées et arborées, ses petites églises coloniales, ses façades aux couleurs vives, des havres de paix au coeur de la mégapole.

Il s'agissait aussi de parler de son ami Octavio Paz, décédé il y a tout juste 25 ans.

Son héritage survit "dans ses grands livres, comme +le Labyrinthe de la solitude+, dans sa poésie qui nous grandit, dans son amour du Mexique, dans son amour des femmes", estime Elena Poniatowska.

Le musée d'Octavio Paz a été inauguré fin mars dans la bâtisse du XVIIe siècle où le prix Nobel 1990 a vécu avec sa deuxième femme, une Française, Marie José Tramini.

Des milliers de livres et 476 oeuvres d'art entrouvrent les portes de l'intimité d'un couple qui s'est connu dans les années 1960 en Inde, où Paz était ambassadeur du Mexique.

La collection est appelée à s'étoffer, après quelques procédures légale: son épouse est décédée en 2018 sans laisser de testament.

Après le décès de Tramini, un groupe d'intellectuels emmenés par Elena Poniatowska a suggéré d'inscrire cet héritage au patrimoine national.

Essayiste, poète, traducteur et diplomate, Paz avait démissionné de son poste d'ambassadeur en Inde en 1968 pour dénoncer le "massacre" des étudiants de Tlatelolco.

Dans les années 1970, à rebours de nombreux intellectuels de gauche en Amérique latine et ailleurs, il a pris ses distances avec Fidel Castro à Cuba et les Sandinistes au Nicaragua.

Son oeuvre la plus connue est sans doute l'essai "El laberinto de la soledad" (le labyrinthe de la solitude), dans lequel il tente de percer les mystères du Mexique, la psychologie, la culture et les valeurs d'un peuple métissé. Un livre toujours indispensable pour tout étranger de passage au Mexique.

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