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Des milliers de partisans de l'ex-président brésilien d'extrême droite Jair Bolsonaro ont pris d'assaut dimanche 8 janvier les lieux des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire à Brasilia, assurant que l'élection présidentielle remportée par le candidat de gauche Luiz Inacio Lula da Silva leur avait été "volée".
Plus d'un millier ont été arrêtés, notamment pour les dommages causés aux bâtiments et aux oeuvres qu'ils contiennent.
La justice a ouvert plusieurs enquêtes pour déterminer les responsabilités ou complicités. Vendredi soir, le parquet a demandé à la Cour suprême d'ouvrir une enquête sur l'éventuelle responsabilité de jair Bolsonaro.
Voici ce que l'on sait des attaques contre le coeur politique du Brésil.
Des centaines d'arrestations
La police fédérale a arrêté 1.843 personnes à l'issue des émeutes survenues une semaine après la prise de fonction du président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva Lula pour un troisième mandat. La plupart se trouvaient dans un campement, installé depuis deux mois devant un centre de commandement de l'armée, où ils réclamaient une intervention militaire pour empêcher l'accession de lula au pouvoir.
Mercredi, 1.159 personnes avaient été interpellées, et 684 personnes âgées ou malades, parents de jeunes enfants ou sans-abri libérés.
Les chefs d'inculpation retenus contre les émeutiers sont terrorisme, association criminelle, attaque de l'Etat démocratique, participation à une tentative de coup d'Etat et incitation au crime.
Les autorités de Brasilia dans le collimateur
Le juge de la Cour suprême Alexandre de Moraes a ordonné jeudi l'ouverture d'une enquête sur la conduite du gouverneur de district fédéral de Brasilia, Ibaneis Rocha, suspendu de ses fonctions pour 90 jours, et celle des commandants de la sécurité publique de la capitale lors des "actes terroristes".
Des enquêtes sont en cours contre M. Rocha mais également contre Anderson Torres, secrétaire de la sécurité à Brasilia et ancien ministre de la justice de Jair Bolsonaro, Fernando de Sousa Oliveira, ancien secrétaire à la sécurité par intérim, et Fabio Augusto, commandant de la police militaire dans le district fédéral.
Mardi, M. Moraes a émis un mandat d'arrêt contre MM. Augusto et Torres (ce dernier était en vacances aux Etats-Unis au moment des violences et a promis de rentrer au Brésil) pour "omission et collusion".
Le gouvernement, quant à lui, est convaincu que certains membres des forces de sécurité étaient de "connivence" avec les manifestants.
Les financeurs également
Lula veut découvrir qui a financé les agitateurs, dont beaucoup ont été transportés par autocar depuis d'autres Etats brésiliens. Le bureau du procureur général a identifié jeudi 52 personnes et sept entreprises soupçonnées d'avoir financé la mobilisation.
Le président de gauche veut également que la lumière soit faite sur un possible financement des campements installés devant plusieurs commandements militaires dans différentes villes du pays, tous démantelés lundi après les émeutes. "Il n'est pas possible qu'un mouvement dure aussi longtemps devant les casernes s'il n'y a pas de personnes pour le financer. Nous allons enquêter et découvrir qui les a financés", a-t-il dit.
Dommages matériels
Les trois lieux de pouvoir vandalisés à Brasilia, le palais présidentiel du Planalto, la Cour suprême et le Congrès, sont des trésors classés de l'architecture moderne du célèbre Oscar Niemeyer.
"La plupart des dommages subis par les bâtiments sont réversibles", a assuré jeudi Mauricio Goulart, coordinateur technique de l'Institut du patrimoine historique et artistique. Ces bâtiments regorgent de meubles rares, d'oeuvres de grands artistes et des dons d'oeuvres d'art internationales. Parmi elles, la statue de granit "Justice" (1961) du Brésilien Alfredo Ceschiatti, une horloge réalisée par Balthazar Martinot, horloger du roi français Louis XIV, et le tableau "Les femmes mulâtres" (1962) d'Emiliano Di Cavalcanti, l'un des maîtres du modernisme brésilien.
Anticommunisme et désinformation
Les bolonaristes radicaux refusent le retour de Lula au pouvoir, l'accusant de vouloir implanter le "communisme" au Brésil, un argument répété à l'envi par Jair Bolsonaro durant la campagne présidentielle. Comme leur leader, qui nie tout lien avec les violences à Brasilia, ils assurent, sans preuve, que l'élection présidentielle d'octobre est entachée de fraude.
Selon les experts consultés par l'AFP, la diffusion de fausses informations sur les réseaux sociaux, a joué un rôle-clé dans les attaques de Brasilia. "Nous allons être plus durs contre les fausses informations, ce peuple ne peut pas être subordonné aux mensonges", a déclaré Lula.