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Le Hamas a averti dimanche qu'une offensive israélienne contre Rafah, la ville où sont réfugiés des centaines de milliers de civils palestiniens, anéantirait les espoirs de libération des otages détenus dans la bande de Gaza.
Le président américain Joe Biden, dont le pays est le principal allié d'Israël, a exhorté le Premier ministre Benjamin Netanyahu à "garantir la sécurité" de la population palestinienne tandis que plusieurs Etats ont mis en garde contre une "catastrophe humanitaire" en cas d'assaut sur la ville surpeuplée.
Rafah est devenue le dernier refuge pour les Palestiniens coincés à la frontière fermée avec l'Egypte, au nombre d'1,4 million selon l'ONU, en grande majorité des déplacés ayant fui la guerre qui fait rage depuis quatre mois entre Israël et le mouvement islamiste.
Les combats se poursuivaient dimanche à quelques kilomètres au nord, dans la ville en grande partie détruite de Khan Younès, où l'armée israélienne traque les combattants du Hamas.
Des correspondants de l'AFP ont entendu des explosions et vu des panaches de fumée noire s'élever dans le ciel.
L'armée israélienne a diffusé des images montrant des soldats à pied et des chars progressant dans les ruines de Khan Younès, où résonnaient des tirs.
- "Plus d'endroit pour s'échapper" -
"La victoire est à portée de main", a déclaré sur la chaîne américaine ABC News Benjamin Netanyahu, qui a ordonné à son armée de préparer une offensive sur la ville. "Nous allons prendre les derniers bataillons terroristes du Hamas et Rafah, qui est le dernier bastion", a-t-il assuré.
Israël assurera "un passage sécurisé à la population civile pour qu'elle puisse quitter" la ville, a-t-il ajouté, sans préciser où les civils pourraient se réfugier.
Lors d'une visite dimanche sur une base militaire du sud d'Israël, le Premier ministre a déclaré vouloir "parvenir à la démilitarisation de la bande de Gaza". "Cela nécessite notre contrôle (...) en matière de sécurité sur toute la région située à l'ouest de la Jordanie, y compris la bande de Gaza", a-t-il affirmé.
"Je ne sais pas où nous irons" en cas d'offensive sur Rafah, a témoigné Farah Mohammad, qui a fui la ville de Gaza, dans le nord du territoire.
"Il n'y plus d'endroit pour s'échapper. Je n'ai pas d'argent pour aller dans le centre, les routes sont dangereuses et la mort est partout", dit cette mère de famille de 39 ans, qui a perdu tout contact avec son mari depuis un mois.
"Toute attaque (...) sur la ville de Rafah torpillerait les négociations" en cours, via une médiation du Qatar, de l'Egypte et des Etats-Unis, sur un échange entre les otages et des Palestiniens détenus par Israël, a affirmé dimanche à l'AFP un responsable du Hamas.
Cette guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent menée par des commandos du Hamas dans le sud d'Israël, qui a fait plus de 1.160 morts, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
En représailles, Israël a juré de "détruire" le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu'il considère comme une organisation "terroriste", de même que les Etats-Unis et l'Union européenne. L'offensive israélienne a fait 28.176 morts dans la bande de Gaza, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du mouvement islamiste.
Le Hamas a affirmé dimanche que près de 100 corps avaient été découverts dans deux quartiers de la ville de Gaza après le retrait des troupes israéliennes, la plupart tués par des "tireurs d'élite" israéliens, selon lui.
- Encore une centaine d'otages -
Environ 250 personnes ont été enlevées en Israël le 7 octobre et emmenées à Gaza. Une trêve d'une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël. Selon Israël, 132 otages sont toujours détenus à Gaza, dont 29 seraient morts.
La branche armée du Hamas a affirmé dimanche que deux otages étaient morts et huit autres avaient été gravement blessés dans des bombardements ces quatre derniers jours.
Par ailleurs, la police et l'armée israéliennes ont annoncé avoir tué dimanche soir deux Palestiniens auteurs d'attaques au couteau, une à un barrage de police à Jérusalem-Est occupé et annexé, et une contre un soldat israélien à un barrage près de Bethléem, en Cisjodanie occupée.
Le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne, qui gouverne les zones autonomes de Cisjordanie, a fait état d'un Palestinien de 35 tué par les forces israéliennes près de Bethléem.
Face à la perspective d'une offensive majeure à Rafah, la pression internationale s'accroît tandis que les Etats-Unis haussent le ton vis-à-vis d'Israël.
Les Emirats arabes unis se sont alarmés des "répercussions humanitaires" d'un assaut israélien. Le Qatar a "fermement condamné" les menaces d'Israël.
A Rabat, des milliers de Marocains ont défilé en soutien au peuple palestinien.
Pour le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, une offensive à Rafah provoquerait "une catastrophe humanitaire indescriptible".
Environ 1,7 million de personnes, d'après l'ONU, sur un total de 2,4 millions d'habitants, ont fui leur foyer depuis le 7 octobre dans le territoire palestinien dévasté, assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure. Beaucoup ont été déplacées plusieurs fois, fuyant toujours plus vers le sud à mesure que les combats s'étendaient.
Rafah, devenue un gigantesque campement, est le dernier centre urbain où l'armée israélienne n'a pas encore pénétré et le principal point d'entrée de l'aide humanitaire, insuffisante pour répondre aux besoins de la population menacée en plein hiver par la famine et les épidémies.
Un représentant de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, Hossam al-Sharqawi, a affirmé dimanche que "chaque jour, des ambulanciers sont tués ou blessés" à Gaza, estimant que "les ambulances sont devenues une cible". bur-sg/ila/sst/ib