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Prodigieux: au terme d'un duel sensationnel avec la prometteuse Sydney McLaughlin, l'Américaine Dalilah Muhammad a encore repoussé les limites sur 400 m haies en améliorant son propre record du monde pour remporter le premier titre mondial de sa carrière, vendredi à Doha.
Dans une ambiance de feu, contrastant avec l'atonie du début de la compétition, l'affrontement entre Muhammad et sa jeune compatriote (20 ans) a, comme prévu, tenu en haleine le Khalifa stadium et débouché sur une performance historique. Trois mois après avoir supplanté au bilan de tous les temps la Russe Yulia Pechonkina (52 sec 20) lors des sélections US à Des Moines (Iowa), la championne olympique de 2016 a récidivé en abaissant de 4 centièmes son propre chrono (52 sec 16) pour conforter encore un peu plus sa place dans la légende de l'athlétisme.
Au moment de tirer le bilan de ces Mondiaux, nul doute que la victoire de l'ancienne étudiante de l’Université de Californie du Sud sera forcément en tête de liste.
Le défi était pourtant de taille face à la dernière pépite américaine, Sydney McLaughlin, qui l'avait battue à deux reprises cette saison avant de débarquer au Qatar (le 13 juin à Oslo et le 29 août en finale de la Ligue de diamant à Zürich). Mais Muhammad, fervente musulmane dont le père est imam dans le Queens, son quartier de naissance à New York, était portée par une foi inébranlable et prête à soulever des montagnes.
- Course d'anthologie -
Auteur d'un départ supersonique, la coureuse de 29 ans a su résister au retour express de sa compatriote dans les derniers mètres pour sauvegarder un avantage minime mais suffisant. McLaughlin a tout de même bouclé ce 400 m haies en 52 sec 23, devenant la 2e performeuse de tous les temps, ce qui donne la mesure de cette course d'anthologie.
"Cela veut dire tellement pour moi que c'est difficile à décrire, a réagi Dalilah Muhammad. Je voulais surtout le titre de championne du monde mais battre une nouvelle fois le record du monde, c'est fantastique. Je m'étais mis une énorme pression sur les épaules et j'ai pris la décision de partir vite pour aller chercher le titre mais j'ai senti Sydney revenir après la 9e haie et j'ai ensuite donné tout ce qu'il me restait. Je ne savais même pas qui avait gagné en franchissant la ligne."
Muhammad revient de loin. Partie sur de très bonnes bases avec une médaille d'argent aux Mondiaux 2013 à Moscou, sa carrière a connu un creux soudain en raison d'un virus puis d'une blessure. Mais elle a su se hisser de nouveau au plus haut niveau en s'adjugeant l'or olympique à Rio avant d'exploser sur le plan chronométrique cette année.
Si Muhammad est entrée dans les annales, l'avenir s'annonce également radieux pour McLaughlin et son temps exceptionnel à Doha lui ouvre de grandes perspectives. Nommée révélation de l'année en 2018 par la Fédération internationale (IAAF), elle n'est passée professionnelle qu'il y a tout juste un an après avoir couru sous les couleurs de l'Université du Kentucky. Autant dire que la planète athlétisme n'a pas fini d'en entendre parler.
- Etincelles attendues aux JO -
"Je savais que la course serait rapide mais je n'imaginais pas que ce serait à ce point, a-t-elle déclaré. J'ai donné tout ce que j'avais et au moins les Etats-Unis font un et deux. Je suis encore jeune et tous les jours passés ici auront représenté une nouvelle expérience pour moi."
Si elle poursuit sur sa lancée, nul doute que McLaughlin aura tout le loisir et le temps de s'attaquer au record de Muhammad dans les années à venir. Leur prochain rendez-vous aux Jeux Olympiques de Tokyo en 2020 promet déjà de faire des étincelles.
Au cours d'une soirée complétement folle à Doha, le héros local Mutaz Essa Barshim (2,37 m), de retour au sommet après une grave blessure à la cheville, a lui raflé sa 2e couronne consécutive à la hauteur alors que le Bahaméen Steven Gardiner a survolé le 400 m en se plaçant au 6e rang des performeurs de l'histoire en 43 sec 48.
Il y a eu aussi un énorme suspense sur le 3000 m steeple qui s'est joué d'un cheveu au profit du champion olympique Conseslus Kipruto (8 min 01 sec 35), sacré pour la 2e fois d'affilée sur le plan mondial face à l'Ethiopien Lamecha Girma (8 min 01 sec 36).