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"Il faut arrêter l'usine définitivement": pour Florence, qui habite dans le quartier de l'usine Lubrizol de Rouen depuis 20 ans, le spectaculaire incendie de jeudi, c'est l'accident de trop.
A Petit-Quevilly (Seine-Maritime), à quelques dizaines de mètres seulement de l'arrière du site industriel, dans une rue de maisons de brique rouge, des habitants s'interrogent sur les conséquences de l'incendie mais plus encore sur les risques à vivre à proximité de cette usine chimique classée Seveso qui a déjà connu plusieurs accidents en 1989, 2013 et 2015.
Camille, 28 ans, habite le quartier depuis cinq ans. "Jusque-là ça ne m'inquiétait pas de vivre à proximité. Avec cet accident, je revois mon jugement. Apparemment, il y a quelques petites choses qui ne vont pas", relève la jeune femme, salariée de la SNCF.
Bien que voisine de l'usine, elle estime avoir eu "un peu de chance puisque les fumées sont parties à l'inverse de chez nous, vers le nord". "Ce matin, on sent un peu les odeurs qui retombent. Si les vents avaient été dans l'autre sens, on n'aurait plus de maison à cette heure. Les fûts de produits sont à quelques mètres seulement de ma maison, derrière la clôture".
Consciente de vivre dans une zone à risque, elle "pensait que c'était une zone à risque surveillée". Elle reproche aux autorités une information "catastrophique". "On nous dit que ce n'est pas toxique mais les policiers portaient des masques à pastille", relève-t-elle.
- "maison invendable" -
C'est "la colère qui domine" aussi chez Florence, 49 ans, agente administrative, en raison du "manque d'information" alors que les habitants interrogés disent de pas avoir eu connaissance des instructions de la préfecture ordonnant jeudi matin l'évacuation d'un périmètre de 500 mètres autour de l'usine. "Je n'allais plus aux réunions d'information organisées avec Lubrizol car on ne nous écoutait pas. De toute façon, la vérité ne ressortira jamais. Il faut arrêter l'usine définitivement", selon elle.
Fermer l'usine ? C'est le vœu de plusieurs habitants de Petit-Quevilly.
Étudiante de 19 ans, Sirine, raconte avoir cru à un attentat et avoir quitté sa maison jeudi matin "vers 4h30 en entendant les explosions". "Personne n'est venu nous chercher", dit-elle.
Au lendemain du sinistre, alors que les équipes de secours s'affairent toujours devant l'usine et que les odeurs nauséabondes commencent à se dissiper, elle et sa famille sont "inquiètes". "Ce serait mieux que l'usine soit plus loin. On demande à ce que l'usine s'arrête définitivement".
Marie, 41 ans, va plus loin. "Il faut que l'usine s'arrête. Si ce n'est pas fait, on fera en sorte de se faire entendre avec les voisins. On ne nous dira jamais tout sur cet accident", déplore-t-elle, accusant les autorités de "minimiser une partie de ce qu'il s'est passé".
Obtenir la fermeture de l'usine... ou partir. "Je veux qu'on me rachète ma maison. C'est invendable à cause de l'accident d'hier. Elle a dû perdre 50.000 euros", se désole Camille.
"C'est comme si on existait pas", lâche Marie.