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Le président Rodrigo Duterte se profilait mardi comme le vainqueur des élections de mi-mandat aux Philippines, selon de premiers résultats officieux, ce qui devrait lui donner les coudées franches pour mettre en oeuvre ses projets controversés de rétablissement de la peine de mort et de réforme de la constitution.
Selon des chiffres rendus publics par le PPCRV, un organisme catholique accrédité par le gouvernement pour compter les voix, et portant sur 94% des bulletins dépouillés, les candidats du camp Duterte remporteraient neuf des douze sièges en jeu au Sénat.
Le Sénat, qui compte 24 membres et est renouvelé par moitié tous les six ans, est traditionnellement considéré comme plus indépendant face au pouvoir exécutif que la chambre basse du parlement. De fait, il a joué un rôle crucial depuis trois ans pour bloquer certaines des initiatives les plus controversées de M. Duterte.
Plus de 18.000 mandats nationaux et locaux étaient remis en jeu à l'occasion des élections générales de lundi, dont les 297 sièges à la Chambre des représentants, la chambre basse du parlement.
La commission électorale a déclaré qu'aucun résultat officiel ne devrait être attendu avant mardi après-midi. L'annonce des résultats finaux pourrait prendre plusieurs jours.
Elu en 2016, M. Duterte a été la cible de critiques des capitales occidentales en raison de sa politique violente de lutte contre le trafic de drogue et de tirades parfois ordurières.
Mais il conserve une très forte popularité dans l'archipel, en raison notamment de son franc parler, une partie des Philippins continuant de le voir comme un recours crédible face à l'inefficacité prêtée aux élites politiques traditionnelles.
M. Duterte s'est engagé à rétablir la peine capitale pour les crimes liés au trafic de drogue dans le cadre de sa campagne très dure contre les stupéfiants, au cours de laquelle des milliers de trafiquants et de consommateurs présumés ont péri.
- Responsabilité pénale à 12 ans -
Son programme de fermeté sur la criminalité avait joué un rôle crucial dans sa très confortable élection à la présidence en 2016. M. Duterte espère notamment faire tomber l'âge de la responsabilité pénale de 15 à 12 ans.
Au total, 61 millions de Philippins étaient appelés aux urnes.
"J'ai voté pour nombre de candidats soutenus par le président Duterte parce que son gouvernement fait son travail", a expliqué à l'AFP Myrna Cruz, 51 ans, à sa sortie du bureau de vote.
"Je soutiens son programme, et notamment la campagne antidrogue. Mais j'espère que le bain de sang va cesser", a-t-elle ajouté.
Obtenir la majorité au Sénat facilitera indéniablement la tâche législative du président, qui sera libre de faire ce qu'il veut en matière de sécurité et de réforme constitutionnelle.
L'opposition n'a cessé de mettre en garde contre le fait que M. Duterte pourrait abolir la limite constitutionnelle actuelle, qui est d'un mandat unique de six ans pour le président. L'ancien avocat a cependant plusieurs fois affirmé qu'il n'entendait pas rempiler.
- Violences électorales -
Comme c'est souvent le cas dans l'archipel, ces élections ont été endeuillées par des violences.
Au moins 20 personnes ont été tuées pendant la campagne, selon les autorités. L'armée a par ailleurs annoncé que neuf personnes avaient été blessées lundi dans une fusillade près d'un bureau de vote de l'île de Jolo, bastion de combattants islamistes et de puissants clans locaux.
A 74 ans, le président n'a pas lésiné sur les efforts pour soutenir ses candidats au Sénat. On a pu le voir prononcer des discours de deux heures ponctués d'insultes contre ses opposants, dont un qu'il a traité de "pédé".
Si M. Duterte ne compte pas rester aux affaires, sa famille est bien partie pour poursuivre son oeuvre. Sa fille Sara - à laquelle on prête de potentielles ambitions présidentielles en 2022 - briguait lundi sa propre succession à la mairie de Davao.
Son fils Sebastian n'avait pas d'adversaire pour le fauteuil de maire adjoint de cette ville, et son aîné Paolo briguait un siège à la chambre des représentants.
La peine capitale avait été abolie en 1987 dans l'archipel, rétablie six ans plus tard puis de nouveau abolie en 2006, à l'issue d'une campagne de lobbying de l'Eglise catholique, qui compte 80% de fidèles dans l'archipel.
En 2017, la Chambre des représentants avait voté une loi punissant de mort ceux qui seraient pris en possession de 500 grammes de marijuana ou 10 grammes de cocaïne, d'héroïne ou d'ecstasy. Mais le texte n'a jamais été validé par le Sénat.