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Pour les Cubains, tout président sera forcément meilleur que Trump

Pour la majorité des habitants de Cuba, Joe Biden reste un inconnu, de même que la politique qu’il mènera vis-à-vis de l’île socialiste, mais ils sont sûrs d’une chose: n’importe quel président des Etats-Unis sera meilleur pour eux que Trump.

"Je ne suis pas du genre à faire confiance à un président américain, mais bon, vu la situation, je préfère l'autre plutôt que Trump", confie à l'AFP Pablo Zaldivar, un surveillant de parking de 57 ans.

Après un rapprochement historique fin 2014 et la politique d'ouverture menée par Barack Obama, l'arrivée de Donald Trump à la Maison blanche a fait l'effet d'une douche froide à l'île socialiste.

Sa réélection aurait été "un désastre ou une menace d'apocalypse" pour Cuba, assure le politologue Jorge Gomez Barata.

En quatre ans, l'administration Trump a appliqué 130 mesures pour renforcer l'embargo, dont beaucoup ont affecté la population et le balbutiant secteur privé: restriction de l'envoi d'argent vers les familles cubaines (remesas), suspension des croisières américaines et de la plupart des vols directs des Etats-Unis, fermeture du consulat américain à La Havane...

- "Trump, pas en peinture!" -

"Trump, je ne peux pas le voir en peinture!", fulmine Aidelvis Blanco, employée du restaurant Le mandarin, disant espérer qu'une victoire de Biden serve "pour que nous allions mieux".

Pour Oniel Diaz, dirigeant du cabinet de consultants privé Auge, son élection est "vraiment une bonne nouvelle pour la communauté d'entrepreneurs de Cuba. Le secteur privé a été l'un des plus durement frappés par la politique envers Cuba de l'administration Trump".

Mais les Cubains n'oublient pas une chose: depuis la révolution menée par Fidel Castro en 1959, l'île a affronté 12 présidents américains... et ce sont les démocrates qui lui ont appliqué les mesures les plus fortes.

L'invasion de la Baie des Cochons, l'entrée en vigueur d'un embargo en 1962, la crise des missiles? L'oeuvre de John F. Kennedy (1961-63).

La loi Helms-Burton, qui a renforcé encore l'embargo? Bill Clinton (1993-2001).

Joe Biden a toutefois un point en sa faveur: même s'il reste peu connu sur l'île, il a, comme vice-président d'Obama, encouragé la collaboration entre les deux pays dans nombre de secteurs et contribué à la réunification familiale entre l'île et la Floride.

Son élection "signifie un retour à l'équilibre en politique étrangère qui était le principe de la politique d'Obama, dans laquelle l'engagement à soutenir la démocratie est compatible avec le dialogue politique, la fin de l'isolement et la fluidité des relations entre les deux pays", estime le dissident Manuel Cuesta Morua.

- Biden, "une opportunité à saisir"-

Dimanche, le président cubain Miguel Diaz-Canel a réagi prudemment à l'élection de Biden, saluant "la nouvelle direction" prise par le peuple américain et disant croire "en la possibilité d'une relation bilatérale constructive et respectueuse des différences".

Lors d'un entretien au média en ligne d'opposition Cibercuba, Biden a certes promis, une fois élu, "l'élimination des restrictions de Trump sur les remesas et les voyages, qui ont nui au peuple cubain et séparé les familles".

Mais il a prévenu: "J'exigerai la libération des prisonniers politiques (estimés à une centaine par des ONG, ndlr) et je défendrai les droits de l'homme à Cuba".

"Biden ne va pas insister sur la levée de l'embargo", son objectif sera d'"émanciper le peuple cubain et de promouvoir la démocratie sur l'île", prédit Jorge Duany, directeur de l'Institut de recherches cubaines de l'Université internationale de Floride.

"Ce qui n'est pas très clair, c'est quels engagements ou concessions il exigera à ce gouvernement pour améliorer les relations entre Cuba et Etats-Unis".

Si les accusations de Trump qualifiant Biden de socialiste ont fait leur effet chez les Cubano-Américains de Floride, sur l'île, après six décennies de socialisme, elles font plutôt sourire, personne ne s'attendant à un virage à gauche.

Mais Biden est "une opportunité qu'il faudra savoir saisir", avance Jorge Gomez Barata en référence à la nécessité de réformes économiques.

"L'arrivée de Biden à la Maison blanche, ajoutée aux récentes mesures économiques du gouvernement cubain pour donner plus d'espace au secteur privé, peut générer potentiellement une situation très bénéfique", espère aussi Oniel Diaz.

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