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Procès Troadec: le récit d'une haine familiale mystérieuse

"Dans ma famille, on fait toujours semblant": Lydie Troadec, l'ex-compagne du principal accusé dans l'affaire Troadec, a décrit mardi à la barre le contexte d'une haine familiale ancienne et mystérieuse entre elle et son frère Pascal, au premier jour du procès du quadruple meurtre de la famille.

L'accusée de 52 ans, longs cheveux bruns et pull blanc, a été longuement interrogée sur ses relations avec son frère Pascal, sa belle-sœur Brigitte et leurs enfants Sébastien et Charlotte, tués à coups de pied de biche en février 2017 par Hubert Caouissin, compagnon de Lydie.

Hubert Caouissin, 50 ans, comparaît depuis mardi matin et pendant trois semaines devant la cour d'assises de Loire-Atlantique. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. La cour se penchera mercredi sur le profil de cet ancien ouvrier chaudronnier de l'arsenal de Brest.

Lydie Troadec, elle, comparaît libre. Elle encourt trois ans de prison et 45.000 euros d'amende pour modification de scène de crimes et recel de cadavres.

Souvent confuse, elle a d'abord décrit à la barre leur mère Renée, "une personne gentille" mais "handicapée des sentiments", "pas très câline" et "soumise naturellement" à un père, Pierre "très autoritaire" et parfois violent avec ses enfants, mort en 2009.

Avec Pascal, son frère de deux ans son aîné, c'est la jalousie qui dominait. "Pascal ne supportait pas que je réussisse à l'école alors que lui n'arrivait pas", a-t-elle décrit. "Il me cassait des choses mais en même temps, j'avais besoin de lui."

Elle reconnaît cependant que ces différends ne dépassaient pas les chamailleries enfantines. Quand Pascal rencontre Brigitte dans une discothèque de Guipavas, près de Brest, "j'étais contente pour eux", dit-elle ainsi.

"Correcte, gentille, plaisante, agréable: je l'ai trouvée très bien", insiste la quinquagénaire. Elle se souvient aussi de "bons moments" avec son neveu Sébastien et sa nièce Charlotte.

Au début des années 2010, les relations deviennent "distantes" entre Pascal et Lydie. D'où vient cette rupture? "Je n'ai pas de réponse", répond Lydie qui a été rongée par un cancer du sein en 2009.

- "Cette histoire d'or n'a jamais existé" -

Quelques années auparavant, le 6 mars 2006, Lydie avait rencontré sur Meetic Hubert Caouissin, dont elle apprécie le "côté pétillant, son intelligence, sa façon de parler, son allure, sa gentillesse, son humour", liste-t-elle. De leur union naît Jean (prénom modifié) en juillet 2008, avant la conclusion d'un PACS l'année suivante.

En 2013, la situation se dégrade: Hubert Caouissin fait des crises, se tape la tête contre les murs et est arrêté pour burn-out. Et deux ans plus tard, le couple achète une ferme isolée de 26 hectares à Pont-de-Buis (Finistère), sans en informer personne.

"Au départ, c'était pas le but de se cacher", assure Lydie. "Disons qu'on s'est coupé du monde".

C'est dans cette ferme qu'Hubert Caouissin a découpé les corps de ses victimes avant de les brûler ou de les jeter dans les ronciers pour que des animaux les mangent. "C'est difficile pour moi d'y aller par rapport à tout ce qu'il s'est passé là-bas", éclate la quinquagénaire, en sanglots à l'évocation de la ferme.

Pour expliquer les crimes, Hubert Caouissin avait évoqué un trésor de lingots d'or prétendument volé par Pascal Troadec à sa mère Renée. Mais "cette histoire d'or n'a jamais existé, c'est une question de relations", admet aujourd'hui Lydie.

Toujours en larmes, elle confie sa "colère" contre Hubert et contre elle-même. "Je culpabilise, je ne savais pas qu'Hubert était malade. Je suis passée à côté, j'ai rien vu", hoquète-t-elle, en affirmant avoir aussi "mal" pour les victimes.

Aujourd'hui séparée d'Hubert Caouissin, Lydie Troadec a été détenue quatre mois en 2017, après la découverte des crimes. Elle habite désormais avec sa mère à Guipavas (Finistère) et suit une formation pour devenir assistante de vie scolaire.

"Elle ne croit plus à cette histoire de trésor, le temps a fait son œuvre sans doute, les éléments du dossier aussi lui ont ouvert les yeux sur un certain nombre de choses sur lesquelles elle avait pu peut-être s'illusionner à un moment", résume son avocat Me Loïc Cabioch.

Le verdict est attendu le 8 ou le 9 juillet.

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