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Scandale Wirecard: l'ex-PDG laisse les députés allemands sur leur faim

L'ancien patron de Wirecard, attendu pour de premières explications sur la faillite retentissante de cette société, a refusé jeudi de répondre aux députés allemands chargés de l'auditionner, réservant ses déclarations à la justice.

"Je ne ferai aucun commentaire et j'invoque mon droit au silence", a lancé Markus Braun à la commission d'enquête parlementaire, devant laquelle il s'est présenté, à Berlin.

C'est la première fois que M. Braun, incarcéré dans une prison du sud de l'Allemagne, s'exprimait en public depuis la révélation, avant l'été, de la gigantesque fraude dont les responsables de Wirecard sont accusés.

Dans une courte allocution, il a affirmé qu'il s'exprimerait "bientôt", devant les enquêteurs judiciaires, sur ce scandale à 1,9 milliard d'euros qui éclabousse les organes de régulation et responsables politiques allemands.

"A aucun moment je n'ai constaté, ou eu d'informations indiquant que les autorités (...) ne se sont pas comportées de façon correcte", a-t-il simplement ajouté.

Vêtu de son habituel col roulé sombre à la Steve Job et de ses lunettes ovales, l'Autrichien de 51 ans s'est ensuite enfermé dans le silence et l'audition s'est rapidement achevée.

Chez les députés agacés par ce comportement, le conservateur Matthias Hauer (CDU) a lancé au témoin qu'il ne pouvait pas "agir de la sorte avec le Bundestag", la chambre basse du Parlement.

L'ancienne membre du conseil de surveillance de Wirecard, Tina Kleingarn, également auditionnée, a expliqué qu'elle avait démissionné en 2017 de son mandat car les méthodes de gouvernance de l'entreprise ne lui convenaient pas.

Le directoire travaille "de manière trop autonome" et voit le travail de surveillance de l'entreprise comme "un poids", a-t-elle écrit dans sa lettre de démission en septembre 2017 et dont l'AFP a eu une copie.

"Tôt ou tard ces lacunes se retourneront" et les "risques pris (par l'entreprise) vont se matérialiser", conclut son écrit prémonitoire.

L'associé de M. Braun, Jan Marsalek, ancien responsable des opérations sur qui pèse de graves soupçons de fraude, était le grand absent du jour, étant en fuite depuis des mois.

- Avance technologique -

L'ascension fulgurante de Wirecard, spécialiste des paiements en ligne, a longtemps été mise au crédit de M. Braun, patron charismatique qui l'a créée en 1999. La société valait davantage en Bourse que Deutsche Bank lorsqu'elle a fait son entrée triomphale en 2018 dans l'indice Dax à Francfort.

Malgré des doutes relayés par des analystes et la presse sur un modèle opaque, M. Braun convainc en louant l'avance technologique de sa société sur le créneau porteur des paiements dématérialisés.

Le ciel se couvre en 2019, quand le Financial Times (FT) publie une série d'articles accusant Wirecard de fraude massive en Asie ou dans le Golfe.

- Dette en milliards -

Après plusieurs reports de la présentation des comptes 2019, le couperet tombe le 18 juin 2020: le groupe avoue que 1,9 milliard d'euros d'actifs, soit un quart de la taille du bilan, n'existent pas en réalité.

Le titre va perdre environ 98% de sa valeur au fur et à mesure des révélations publiques sur ce scandale.

Endetté pour 3,2 milliards d'euros, Wirecard a été mis en liquidation fin août.

Le scandale a tourné au roman d'espionnage lorsque des allégations sur les liens de Jan Marsalek avec divers services de renseignement ont circulé dans les médias.

Les créanciers, banquiers et investisseurs ne peuvent compter récupérer qu'une infime partie de la somme via une vente par appartements du groupe. Le total des réclamations, qui inclut celles des actionnaires, atteint la somme record de 12 milliards d'euros.

L'autorité de surveillance financière Bafin et le cabinet d'audit EY sont critiqués dans cette affaire, comme le monde politique.

Les députés veulent savoir si et quand le gouvernement fédéral était au courant des irrégularités et s'il en a trop peu fait.

La commission souhaiterait entendre la chancelière Angela Merkel, qui avait plaidé la cause de la fintech bavaroise devant les autorités chinoises en septembre 2019, et le ministre des Finances, Olaf Scholz.

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