Partager:
Un rendez-vous "hyper-rapide" et "à côté de chez moi": Juliette savoure sa première dose de Moderna, reçue dans une pharmacie parisienne, où les vaccins ARN attendus depuis des mois arrivent enfin, au rythme de seulement deux flacons par semaine.
Vaccinée sur un coup de chance: "Je suis passée récupérer quelque chose à la pharmacie hier, j'ai demandé s'ils faisaient par hasard des vaccins. Ils m'ont mis sur leur liste d'attente et ils m'ont appelée dans la soirée. J'ai eu le rendez-vous aujourd'hui, c'est hyper rapide", raconte la jeune mère de 33 ans, accompagnée de ses deux enfants.
Du pain béni avant les vacances "chez les grands-parents au Portugal", alors qu'elle "n'arrivai(t) pas à avoir de date dans les prochains jours sur Doctolib, ou alors en banlieue, ce qui ne (l)'arrangeait pas du tout". Ici, en face de la bibliothèque François-Mitterrand, "c'est vraiment à côté de chez moi, donc plus pratique", ajoute-t-elle.
Une histoire qui ressemble beaucoup à celle de Gabriel, 23 ans. Trouver un créneau sur Doctolib, "c'était assez compliqué", mais en passant à la pharmacie, on lui a proposé "une possibilité sur une liste d'attente" et "ça s'est fait en une semaine".
"Pas besoin d'attendre, ni de réessayer", sourit-il, "content et rassuré" de pouvoir bientôt voyager et "retourner voir la famille de l'autre côté de l'Atlantique". A ses côtés, son épouse américaine Courtney, 25 ans, se remet de ses émotions: elle était "un peu effrayée" à l'idée de recevoir sa première dose, mais parce qu'elle a "peur des piqûres, pas du vaccin".
Destiné à tous les adultes - sans limite d'âge -, le Moderna semble donc rencontrer son public. Ce sont "généralement des personnes actives, de moins de 55 ans, qui ont envie de reprendre une vie normale", observe le pharmacien Yorick Berger, qui a déjà vacciné "une quarantaine de personnes depuis la semaine dernière" dans son officine.
- "Force de frappe" -
Un bon début, compte tenu des quantités reçues: deux flacons de 10 doses maximum par semaine et par pharmacie, un seul pour les médecins libéraux, dans la limite de 300.000 doses hebdomadaires, attribuées aux premiers arrivés quand les réservations sont ouvertes.
Cette sélection ne garantit pas une livraison en temps et en heure. Les soignants de quatre régions du sud en ont fait l'expérience la semaine dernière, quand la panne d'un camion a retardé de plusieurs jours l'acheminement de 145.000 doses, heureusement sans rupture de la chaîne du froid.
A Paris, Yorick Berger ne constate "pas de retard par rapport à ce qui était annoncé", mais regrette tout de même de ne pas avoir pu utiliser de vaccin à ARN messager plus tôt.
"On les avait demandés rapidement, on est déçu de les avoir si tard, parce qu'on aurait pu vacciner plus largement", avec la "force de frappe" des 22.000 pharmacies françaises, qui ont démontré lors de la dernière campagne anti-grippale qu'elles "pouvaient augmenter la couverture vaccinale".
Il faut y ajouter quelque 50.000 médecins généralistes, dont certains "sont très en colère", comme le Dr Agnès Gianotti, qui attend toujours son flacon de Moderna commandé il y a presque trois semaines.
Comme pour AstraZeneca, puis pour Janssen, la logistique est laborieuse, à croire que "l'Etat ne sait pas travailler avec nous", fulmine la vice-présidente du syndicat MG France, installée dans le nord de la capitale.
Pas résignée pour autant - "quand je vaccine quelqu'un, je me sens utile" - elle s'inquiète de voir la population éligible aux deux premiers vaccins "se réduire comme peau de chagrin", car "plus personne n'en veut".
Le Moderna ne suffira pas à crever le plafond de verre qui se dessine déjà chez les plus âgés, que les centres de vaccination n'ont pas attirés. Pour les atteindre, le Dr Gianotti l'affirme, "il faut qu'on nous donne du Pfizer".