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Le président américain Donald Trump a confirmé jeudi sa volonté d'user à discrétion de son droit de grâce, dont il a fait bénéficier un conservateur polémiste très anti-démocrate.
M. Trump a gracié Dinesh D'Souza, un chroniqueur et réalisateur extrêmement critique de l'ancien président Obama, qui avait été condamné pour infraction aux lois sur le financement électoral.
Contrairement à ses prédécesseurs --Bill Clinton, George W. Bush et Barack Obama-- qui ont chacun attendu plus de deux ans avant d'accorder leur première grâce, Donald Trump montre qu'il n'hésite pas à utiliser ce droit régalien quand il considère que la justice a fait fausse route. C'est souvent ses supporteurs qui en profitent.
"Je vais accorder une grâce totale à Dinesh D'Souza aujourd'hui. Il a été traité de façon très injuste par l'Etat", a tweeté le président américain.
M. D'Souza avait plaidé coupable en 2014 d'avoir fait verser, par deux associés utilisés comme hommes de paille, 20.000 dollars à une candidate républicaine au Sénat américain en 2012. Wendy Long se présentait pour l'Etat de New York.
La limite légale, de la part d'un particulier, était à l'époque de 5.000 dollars. Le réalisateur avait ensuite remboursé ses associés.
Il avait été condamné à 30.000 dollars d'amende et à cinq ans de mise à l'épreuve, dont huit mois dans un centre de liberté surveillée.
La condamnation avait été annoncée par le procureur de Manhattan, Preet Bharara, qui par la suite a été limogé par Donald Trump.
- Anti-Hillary, anti-Obama -
MM. Bharara et D'Souza, tous les deux nés en Inde, ont poursuivi jeudi leur joute sur Twitter, le premier rappelant la réalité du délit du second.
"Le karma est une garce", a vertemement répliqué Dinesh D'Souza. "Preet Bharara voulait détruire un concitoyen indo-américain pour progresser dans sa carrière. Puis il a été viré et moi je suis gracié".
Dans un récent tweet qui a suscité une vive indignation, Dinesh D'Souza s'est moqué d'élèves rescapés d'une tuerie dans leur lycée en Floride, après que le Sénat de cet Etat eut rejeté une proposition de loi visant à interdire les fusils d'assaut.
Dans d'autres tweets plus anciens, le chroniqueur a été accusé d'utiliser des sous-entendus racistes, notamment en associant à Barack Obama les mots "boy" et "ghetto", insultants pour les Noirs.
Il n'avait pas hésité à présenter M. Obama comme un "Trayvon adulte", en référence à Trayvon Martin, un adolescent noir abattu par un vigile en Floride.
Dinesh D'Souza reste toutefois très apprécié de certains cercles conservateurs.
Il est l'auteur du livre "The roots of Obama's rage" ("les racines de la rage d'Obama") sorti en 2010, et le réalisateur du film "2016: Obama's America", documentaire férocement anti-Obama sorti en 2012.
Dinesh D'Souza a ensuite réalisé "L'Amérique d'Hillary". Ce documentaire a remporté en 2017 le titre de "pire film" aux Razzies, les anti-Oscars.
En route jeudi pour le Texas à bord de l'avion Air Force One, M. Trump a relaté avoir informé de sa grâce Dinesh D'Souza la veille au soir. "Il a failli avoir une crise cardiaque", a dit le président.
Le locataire de la Maison Blanche a confié envisager de nouveaux gestes de clémence, au bénéfice de Rod Blagojevich ou de Martha Stewart.
Le premier, un ex-gouverneur démocrate de l'Illinois, purge une peine de 14 ans de réclusion pour avoir tenté de vendre le siège de sénateur laissé vacant par Barack Obama en 2008.
M. Trump s'est dit prêt à réduire la durée de cette sentence selon lui trop sévère.
- "Ma grande supportrice" -
La seconde est une femme d'affaires qui a construit un empire en conseillant les Américains sur la manière de décorer leur intérieur, faire la cuisine ou le jardinage.
Elle avait été condamnée en 2004 dans dans une affaire de délit d'initié, ainsi que pour des fausses déclarations et une entrave à la justice. Elle avait été emprisonnée cinq mois.
"Martha Stewart a été traitée de façon dure et injuste. Et c'était ma plus grande supportrice, avant que je ne me lance dans la politique. Mais cela n'a pas de rapport", a déclaré Donald Trump.
Selon la Constitution, le président américain peut soit annuler une condamnation rendue par la justice fédérale, soit commuer la peine d'un condamné, c'est-à-dire en raccourcir la durée.
M. Trump a notamment gracié l'an dernier l'ancien shérif Joe Arpaio, condamné pour ses méthodes policières discriminatoires envers les immigrés clandestins.