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Une femme accuse 5 hommes de viol en groupe: la décision de la justice choque l'Espagne

Cinq Espagnols se surnommant "la meute" ont été condamnés ce jeudi à neuf ans de prison en Espagne pour des abus sexuels commis sur une jeune femme qu'ils avaient eux-mêmes filmés. Le viol n'a cependant pas été retenu, suscitant une vague de protestations.


Ils se sont vantés de leur agression en diffusant une vidéo

Les cinq Sévillans âgés de 27 à 29 ans s'étaient eux-mêmes vantés de leurs actes. Sur un groupe de messagerie WhatsApp intitulé "la meute", ils s'étaient envoyé une vidéo des faits, avec le message "en train d'en baiser une à cinq". Ce petit film est devenu une des pièces centrales de leur procès.

Le jugement du tribunal de Navarre (nord) était particulièrement attendu en Espagne, sept semaines après la "grève générale féministe" sans précédent et les énormes manifestations du 8 mars. Ce jour-là, une Espagnole sur deux aurait revendiqué ses droits d'une façon ou d'une autre, selon une enquête de l'institut MyWord.

Ce n'est pas un abus sexuel, c'est un viol

Les juges ont condamné chacun des cinq prévenus à neuf ans de prison pour "abus sexuel" sur une jeune Madrilène de 18 ans, aggravé d'"abus de faiblesse". Ils devront verser une indemnisation de 50.000 euros à la victime, qu'ils n'ont plus le droit d'approcher ni de contacter pendant 15 ans. Mais les magistrats n'ont pas retenu l'accusation de viol, pour lequel le Code pénal espagnol stipule qu'il doit y avoir "intimidation" ou "violence".

La peine de prison infligée est très inférieure aux réquisitions du parquet qui demandait 22 ans et 10 mois à l'encontre de chacun des prévenus.

Aussitôt après sa publication, la décision des juges a choqué et suscité la polémique. Aux portes du tribunal, des manifestants criaient "ce n'est pas un abus sexuel, c'est un viol". Et de nombreux usagers de Twitter relançaient le slogan "moi je te crois, ma soeur" à l'attention de la victime.

Une manifestation de protestation contre le jugement était annoncée dans la soirée à Madrid, ainsi qu'à Barcelone où la maire de gauche, Ada Colau, s'est adressée à la victime sur Twitter en affirmant: "cela m'indigne qu'après un viol collectif, tu doives supporter la violence d'une justice patriarcale".

Je ne savais plus comment réagir... J'ai réagi en me soumettant

Survenue le 7 juillet 2016 pendant les fêtes populaires de la San Fermin en Navarre (nord), l'affaire avait abouti en novembre 2017 au "procès de l'année" à Pampelune.

La jeune femme avait raconté avoir bu de la sangria, dansé et fait la fête avec des amis, avant de se retrouver seule sur un banc, où un des jeunes était venu lui parler "football" et "tatouage" selon elle. Puis elle avait embrassé un des garçons et suivi le groupe, sans "penser qu'allait se produire ce qui s'est produit". "Quand je me suis vue cernée... Je ne savais plus comment réagir... J'ai réagi en me soumettant", avait-elle résumé devant le tribunal, en décrivant fellations et rapports imposés sans préservatif.

Les prévenus, arrêtés dès le lendemain des faits, sont en détention provisoire depuis. L'un d'eux est membre de la Garde civile - suspendu de ses fonctions -, un autre a appartenu à l'armée et plusieurs étaient des supporters "ultras" du Séville FC.

Leurs avocats n'avaient admis que le vol du téléphone de la victime, abandonnée à demi-nue dans une entrée d'immeuble, en soutenant qu'elle était consentante. A l'image, "on ne voit pas d'agression sexuelle, on voit des relations sexuelles, point", avait plaidé l'avocat de trois d'entre eux, Agustin Martinez Becerra.

La procureure Elesa Sarasate avait rejeté ces arguments en disant que "l'intimidation, gravissime, avait empêché la résistance ou la fuite". Elle expliquait que la jeune fille, qui ne s'était jamais adonnée au sexe en groupe, avait rencontré ses agresseurs sept minutes avant le "viol".

Durant les manifestations du 8 mars, de nombreuses pancartes s'étaient référées à ce fait divers retentissant, notamment avec le slogan "la pornographie crée des meutes". L'Espagne est cependant pionnière dans la lutte contre les violences faites aux femmes, s'étant dotée dès 2004 d'une loi spécifique, présentée comme un "modèle" par le Conseil de l'Europe.

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