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Emmanuel Macron est passé jeudi aux travaux pratiques du déconfinement prévu à partir du 11 mai, en annonçant un cadre "adapté aux territoires" avec l'appui des élus locaux, une école sur la base du volontariat des parents et des masques sans doute obligatoires dans les transports.
A l'issue d'une réunion avec des élus et à moins de trois semaines du début du déconfinement, le chef de l'Etat a annoncé que le cadre national devra être adapté et "territorialisé", selon des propos rapportés par l'Elysée.
Mais pas par régions, "qui ne correspondent pas aux réalités des territoires" diversement touchés par l'épidémie de coronavirus.
La fin du confinement entamé le 17 mars devra se préparer avec les maires, a insisté le président de la République. Selon des participants à cette réunion, les maires ont demandé des consignes nationales qui soient adaptables localement.
Nombre de ces élus locaux avaient fait part de leurs inquiétudes, en particulier s'agissant du retour des élèves en classe alors que le virus continue de circuler.
Sur ce point, la rentrée du 11 mai se fera sur la base du volontariat des parents, a avancé l'Elysée, et priorité sera sans doute donnée aux "plus jeunes, ceux qui ne sont pas autonomes", ainsi qu'aux enfants "les plus en difficulté".
La rentrée sera "progressive, concertée avec les élus locaux et adaptée aux réalités locales", notamment en fonction de la taille des communes, a encore expliqué la présidence. Le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, avait déjà annoncé un retour à l'école étalé sur trois semaines par niveaux, avec des groupes de 15 élèves au maximum.
De quoi susciter de nouvelles interrogations chez les syndicats d'enseignants, qui attendent surtout des garanties sanitaires. "Il faut arrêter ce jeu d'annonces, qui sont comme les morceaux d'un puzzle", a réagi Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, demandeuse d'"un projet abouti".
Les maires sont en outre encouragés à acheter massivement des masques grand public, selon l'Elysée, qui annonce par ailleurs qu'"il faudra probablement imposer le port du masque" dans les transports publics.
Un pas de plus vers les recommandations de l'Académie de médecine qui, de son côté, souhaite que les masques anti-projections soient dès maintenant "obligatoires dans l'espace public".
Pour le chef de file des sénateurs Les Républicains, Bruno Retailleau, il s'agit là d'annonces "totalement incompréhensibles", faites "de manière précipitée et brouillonne".
- "Echanges de population" -
Les ministres concernés ont remis mercredi à Matignon une première mouture de leurs plans sectoriels, qui seront intégrés d'ici la fin du mois dans un projet global aux allures de casse-tête.
Si l'hypothèse d'un déconfinement différencié selon les zones géographiques est retenue, le gouvernement mettra-t-il en place des restrictions de circulation entre des zones aux règles différentes ? Aucune indication précise n'a été livrée à ce stade.
Mais pour le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, "ce qu'il faudra éviter, ce sont les transports interrégionaux et les échanges de population entre des zones massivement touchées et des zones peu touchées".
Le Premier ministre Edouard Philippe devait s'entretenir jeudi après-midi en visioconférence avec les présidents de région pour préparer cette "stratégie de déconfinement", et vendredi avec les représentants des départements.
Plus globalement, le contexte sanitaire reste toujours aussi incertain.
Le bilan reste élevé avec 21.856 morts en France jeudi soir, 516 de plus en 24 heures: 13.547 sont décédées dans les hôpitaux et 8.309 dans les Ehpad et autres établissements médico-sociaux.
Le nombre de patients en réanimation poursuit toutefois sa baisse, continue depuis quinze jours.
- "Reprise épidémique" -
Pour autant, "le risque de reprise épidémique existe, il faut nous y préparer", a insisté le Pr Salomon devant la mission d'information de l'Assemblée nationale sur le Covid-19.
Selon des estimations de l'Institut Pasteur, seuls 6% des Français auront été infectés par le coronavirus le 11 mai.
Une étude épidémiologique dans un lycée de Crépy-en-Valois, un des foyers de l'épidémie dans l'Oise, a d'autre part révélé que 26% des enseignants, lycéens et leur famille possédaient des anticorps contre le virus. Des chiffres là aussi bien trop faibles pour atteindre une immunité de groupe suffisante pour stopper l'épidémie.
"A moins d'un effet lié à la température, à la saisonnalité comme certains l'espèrent, on aura une vague" de nouveaux malades "probablement fin mai, début juin", due au déconfinement et à laquelle il faudra ajouter d'autres patients "qui ont des maladies qu'il faut traiter et qui eux avaient un peu disparu de nos radars", a estimé sur RTL le Pr Philippe Juvin, chef des urgences de l'hôpital parisien Geroges-Pompidou.
Sur le plan économique et social, le tableau se noircit de jour en jour. Le chômage partiel concerne désormais plus de 10 millions de salariés, et le déficit de la Sécurité sociale atteindra le niveau abyssal de 41 milliards d'euros cette année.
L'Etat a mis sur la table un plan d'aide massif de 110 milliards d'euros. L'Assemblée a donné jeudi son ultime feu vert, avant le vote du Sénat dans la soirée, pour une adoption définitive.
De nombreuses voix, dont celle du Haut Conseil pour le climat, appellent toutefois à ne pas reproduire la même erreur qu'en 2008, quand le plan de relance avait favorisé des activités polluantes.
Pour aider les plus modestes, touchés de plein fouet par les conséquences de l'épidémie, 39 millions d'euros supplémentaires alloués à l'aide alimentaire ont par ailleurs été débloqués.
Enfin, sur le plan patrimonial, un peu plus d'un an après l'incendie de Notre-Dame de Paris, le chantier de reconstruction mis en sommeil en mars en raison de l'épidémie reprendra progressivement à partir de lundi.
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